vendredi 27 novembre 2015

L'homme égaré

« Tu ne sais pas comme est bien ma mort, par une nuit superbe, ma fenêtre grande ouverte sur Paris... » (Dernière lettre de Pierre Drieu la Rochelle à Victoria Ocampo). 
Drieu se suicide le 15 mars 1945. Victoria et Pierre se sont rencontrés au mois d'avril 1929, à Paris, chez Isabel Dato. Sa présence raffinée et sa mise élégante la séduisent, son « éloignement », la distance qui s'établit naturellement entre les autres et lui, tout cela l'intrigue. Il moque son « pull-over de déménageur », elle lui répond que c'est un tailleur de Chanel. Ils deviennent amants. Il tournera mal, il finira mal, ou peut-être apaisé. Elle lui conserva bien au-delà de la mort, un tendre intérêt. Il aura employé le temps que lui laissait la tentation de l'ennui à se rendre odieux. Il n'y parviendra pas. Ses rares amis lui témoignèrent une affection, qui ne se démentit jamais. Plus que tout, sans doute, il aima la solitude et l'égarement dans les songes : il fut un inlassable arpenteur de Paris, nuit et jour.



Et cette chanson, que je replace ici, inspirée à Daniel Darc par Drieu la Rochelle : 



Sur Drieu et sur la Ocampo : La belle argentine et l'homme perdu, L'amour aux enchères, Fin de partie 2 – Avec amitié, 

Tanya from Russia, America and Paris

Le choix d'un frère

Et l'argent de mes cheveux…

L'autre Keyserling

Mensonge d'automne

Bruissement

Drieu via Visconti, Joël H. via Guidoni 


3 commentaires:

Nuagesneuf a dit…

Allez comprendre, mon cher Patrick, vous écrivez "Drieu se suicide le 15 mars 1945" et je lis "Dieu se suicide le 15 mars 1945" !

J'ai lu DLR aux temps où j'étais jeune. Je ne l'ai jamais relu dès lors que je fus averti de drames imprescriptibles. Le bonjour vous va, mon cher Patrikck

Patrick Mandon a dit…

Très cher Nuage, votre « Dieu se suicide » me donne le vertige. Certains disent que les hommes, après avoir créé Dieu, ont fini par le tuer. À ce même Dieu, vous accordez la profondeur du désespoir, qui conduit certains de ces mêmes hommes à se tuer. C'est proprement vertigineux. Il me paraît que si Dieu « existe » (de quelle manière existe-t-il ? Différemment de nous, assurément), s'il connaît les sensations humaines et les troubles qu'elles provoquent (sans d'ailleurs les éprouver, sauf par le Christ chez les chrétiens), il ne saurait résoudre par la mort, laquelle à ses yeux ne met fin à rien, l'énigme insupportable que nous impose la conscience (j'emploie ce mot à défaut d'un autre, qui ne me vient pas). C'est ainsi que se côtoient le bonheur de vivre et le chagrin d'être né, et c'est sans doute pourquoi nous sommes des êtres inconsolables.
Pour Drieu (la Rochelle), je comprends votre recul, votre refus, j'en sais les raisons, je les trouve légitimes.
Pour moi, je le considère comme un frère douloureux, acharné à se perdre et à brouiller sa trace sur la terre. Il a cherché le point extrême où s'abolissaient ses contradictions. Je me souviens d'un article rempli de la bile jaune et nauséabonde d'un certain Loret (ou Moret) dans le journal Libération : il disait tout le mal que peut exprimer un pompeux imbécile de Drieu, et, ce faisant, tout le mal que celui-ci souhaitait qu'on dît de lui. Ce monsieur Moret (ou Loret), en cherchant à nuire, au contraire, a fort bien servi sa victime : les imbéciles sont des valets malgré eux.

a dit…

Gracias, Patrick.
Miles de abrazos para ti :)