lundi 24 novembre 2014

L'indésirable 3

Bardot évoque son unique rencontre avec Marilyn.
Bardot telle qu'en elle-même : la grâce et le vocabulaire, la détermination tranquille, l'élégance sans apprêt, l'effronterie aimable, la vivacité du regard comme un reflet de l'esprit. C'est aussi l'idée que je me fais de mon pays.
Ce que Brigitte dit du drame de Marilyn, du rôle néfaste de ses proches est évidemment très juste. Et son admiration, intacte, est celle d'une enfant éblouie.



Ci-dessous : Le 7 novembre 1954, Marilyn est hospitalisée à Los Angeles, au Cedars of Lebanon hospital.  Enceinte, et si désireuse d'avoir un enfant, elle s'est inquiétée d'un malaise et de douleurs persistants. Elle sera opérée d'une inflammation de l'endomètre, et n'accouchera jamais.
Son arrivé à l'hôpital est dramatique. Elle n'avait averti personne et se croyait anonyme. Or, les photographes l'assaillent, la traquent dans les couloirs, où elle tente de dissimuler son visage nu, sans maquillage. Elle a peur, elle est seule, elle veut disparaître. Les flash crépitent comme autant de coups de fusil.























Sur Bardot : Une vitrine pour ma cousine  Faites la moue Grello » qui tintinnabule, une tartine qui dégouline ... Fin de partie - 11 -

dimanche 23 novembre 2014

L'indésirable 2

Relativement aux choses de l'amour, ces deux-là, Marilyn M. et Marlon B., furent des ogres. Elle ne détestait pas les étreintes un peu rudes, voire crapuleuses, dans des lieux improbables ; il couchait ici et se réveillait ailleurs, avec quelques hommes et de nombreuses femmes. Ils furent les plus désirés d'entre tous.
Ils furent amants, et, semble-t-il, demeurèrent liés par un sentiment tendre. Quelque chose maintenait un lien entre ces deux superbes spécimens d'humanité, modifiés par la fabrique hollywoodienne de demi-dieux payés au cachet : peut-être le sentiment d'appartenance au peuple, plus rare encore, des élus de la grâce et de l'enfer.

Ci-dessous : Maurice Chevalier, parfait gentleman, préfère regarder ailleurs…




















« Je ne nourrissais aucune illusion d'être bonne actrice. Je savais que j'étais un troisième choix. En fait, je ressentais mon manque de talent comme un vêtement bon marché, que j'aurais porté intérieurement. Mais, Dieu, que je voulais apprendre, changer, m'améliorer ! » (M.M).
« Si, jouant le rôle d'une idiote, je dois poser une question stupide, j'y vais franchement. Suis-je supposée paraître intelligente ? » (M.M.).




















Ci-dessous : En 1961, Marilyn est hospitalisée dans un service pudiquement dénommé « neurologique ». Elle connaît alors une très profonde dépression. Brando se manifeste sans tarder. On peut considérer ce message comme un acte de tendre solidarité.




















Ci-dessous, Marlon Brando : Il tourne Le Dernier tango à Paris. Il est dans une période de régime alimentaire strict. Ses joues creuses, son air d'isolement, et la maturité des épreuves, lui confèrent une beauté sombre. Le cachemire va bien à sa peau…
























On lira Brando sur le trottoir,  Le fantôme du métro aérien 1,  Le fantôme du métro aérien 2,  Retour sur le pont  Le principe de fascination,  Marlon B, for Lady Tanya, and for all Tous les garçons' ladies  

mercredi 19 novembre 2014

L'indésirable

















Hollywood a méprisé Marilyn Monroe, du début à la fin. La fausse vénération dont elle y fit l'objet ne reposait que sur sa valeur financière. Elle a dit elle-même qu'elle avait passé plus de temps à genoux avec les producteurs et autres hommes d'influence, qu'à tenter de les persuader de son talent. Quant à l'une de ses plus belles conquêtes, John Kennedy, celui-ci ne fut ni plus ni moins attentionné que la moyenne basse de toutes les autres…
Il y a quelque chose de curieusement incompatible entre Marilyn et Hollywood. En apparence, elle est une créature des studios, qui la façonnent et la soumettent. Puis elle s'en émancipe, mais alors totalement, c'est à dire qu'elle se dégage de leur emprise matérielle et morale. Elle imagine et invente une renommée, qui n'est plus celle qui lui était destinée. Elle n'existe que pour être une star, puis, progressivement, elle excède ce statut, qui lui semble réducteur. Elle ne renie nullement son ambition, mais elle lui donne une autre dimension. Elle devient incontrôlable.
C'est qu'elle a eu accès, essentiellement par elle-même, à un monde « englouti », où s'anime des ombres et des songes obscurs. Or, elle ne craint nullement de l'affronter, elle se risque même à espérer qu'il lui permettra d'améliorer encore son jeu. Elle a raison. Dans le même temps, elle s'approche d'un précipice.   Ni la psychanalyse, ni le cinéma hollywoodien ne pouvaient l'empêcher d'y tomber.
Alors, il lui restait à accomplir son destin, seul moyen de démontrer l'impossibilité dans laquelle elle se trouvait d'être tout à la fois surnuméraire et désirée.

Lorsque John Huston, pour The Misfits (1961),  réunit à l'écran Marilyn, Montgomery Clift et Clark Gable, qu'avait-il en tête ? Il les éloigna d'Hollywood, la colline en manque d'inspiration, pour les plonger dans la chaleur suffocante du désert, près de Reno, Nevada. L'affaire sera rude à mener à son terme. Marilyn, certes, leur donnera à tous du fil à retordre, mais, semble-t-il, les envoûtera tous. La seule personne indésirable fut sans contestation cette épouvantable bonne femme, nommée Paula Strasberg, qui prétendait veiller sur le psychisme de Monroe. Son mari, Lee Strasberg, avait succédé au grand Elia Kazan à la direction d'une sorte d'école d'acteur. Kazan, qui se méfiait de Strasberg, lui avait recommandé de ne pas vendre sa camelote prétendument émotionnelle, introspective… Il fallait s'appeler Kazan pour susciter chez Brando le surgissement du chagrin fondateur, inconsolable. On mesurera la distance entre Kazan et Strasberg en observant le jeu pitoyable, misérable, de l'infortuné Paul Newman, le plus mauvais acteur américain de son temps. Il y aurait beaucoup à dire sur tout cela, mais ce billet imparfait traîne en longueur, je l'interromps donc.

Quelques photographies, prises hors champ, des « Misfits », comme autant d'instant dérobés à la joie simple d'exister tout en se sachant menacé de disparaître prochainement : c'est ainsi, par hasard, que s'installe en nous l'effet d'une puissante, d'une tendre mélancolie.


























 Ci-dessus, deux photographies d'Eve Arnold, en qui Marilyn avait toute confiance.



















Dans cette chanson de Bruce Springteen, il est question d'une jeune femme, abattue à bout portant (point blank) :

« Dis-tu toujours tes prières, petite chérie ?
Vas- tu toujours au lit
En priant le ciel, pour que tout aille bien le lendemain ? »




Si l'on veut, on lira  Her heart belongs to daddy