jeudi 29 décembre 2011

Nouvelles de la brume 2






















Fermez vos portes, cachez vos enfants, ce voile de brume qui engourdit toutes les formes annonce l'arrivée du Roi des Aulnes :

[…]
Mein Sohn, was birgst du so bang dein Gesicht ?
Siehst Vater, du den Erlkönig nicht ?
Den Erlenkönig mit Kron und Schweif ?
Mein Sohn, es ist ein Nebelstreif.

[…]
Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832), Erlkönig

(Mon fils, pourquoi caches-tu ton visage d'effroi ?
Père, ne vois-tu pas le Roi des Aulnes ?
Le roi des Aulnes avec sa couronne et sa traîne ?
Mon fils, c'est une nappe de brouillard.)

Photographie PM

samedi 24 décembre 2011

L'enfance d'un chef

Ce soir, je pardonne à tous ceux que j'ai offensés.
D'où je me trouve, où que vous soyez, si vous passez par ici, acceptez le salut chaleureux que je vous adresse.

Hector Berlioz, Le chœur des bergers, extrait de L'Enfance du Christ.



Berlioz n'aimait pas les contraintes, et ne s'estimait pas mieux servi que par lui-même, aussi, écrivit-il souvent les paroles de ses chants. C'est le cas pour cette œuvre, qui connut un succès retentissant à sa création, en 1854.

Il s’en va loin de la terre
Où dans l’étable il vit le jour.
De son père et de sa mère
Qu’il reste le constant amour,
Qu’il grandisse, qu’il prospère
Et qu’il soit bon père à son tour.

Oncques si, chez l’idolâtre,
Il vient à sentir le malheur,
Fuyant la terre marâtre,
Chez nous qu’il revienne au bonheur.
Que la pauvreté du pâtre
Reste toujours chère à son cœur.

Cher enfant, Dieu te bénisse!
Dieu vous bénisse, heureux époux!
Que jamais de l’injustice
Vous ne puissiez sentir les coups.
Qu’un bon ange vous avertisse
Des dangers planant sur vous.

(Le texte ci-dessus provient du site créé par Michel Austin et Monir Tayeb, entièrement consacré à Hector Berlioz : http://www.hberlioz.com/Libretti/accueil.htm)

mercredi 30 novembre 2011

Nouvelles de la brume

Deux français, Lucie Galibois et François Grimaud, ont superbement assimilé l’esprit musical de la Roumanie ; ils l’ont marié à des influences serbes et croates, et ils font chanter tout cela sous l’archet d’un violon et dans le souffle d’un accordéon. Je dédie ce morceau à la belle brune Nadia, comme un rappel heureux de ses longues origines roumaines et ashkénazes :



Le cher Jean-Michel Théaux me souffle à l'oreille une autre tonalité de notre Europe centrale tant aimée, un son tzigane modifié yddish, klezmer pour tout dire, joyeux, accompagné, s'il-vous plaît, par Itzhak Perlman en personne :



À quelques autres, je suggère d'entendre ce pur moment de belle humeur, extrait du film Ko To Tamo Peva, film yougoslave (1980) écrit par Dušan Kovačević, mis en scène par Slobodan Šijan.




À toutes celles et à tous ceux qui m’ont fait la grâce de suivre mes petits chemins de contrebande, j'offre cet instant, en compagnie de Volodia (Vladimir) Poliakoff. Il fut la très belle voix de basse de la chanson tzigane. À Paris, il se mêla souvent à la famille Dimitrievitch, et fit les belles nuits des cabarets. Il put compter sur l'amitié de Joseph Kessel, qui ne fut pas avare d’admiration ni de soutien au génie tzigane :



La musique tzigane est désormais délaissée, elle ne paraît plus combler l’attente sentimentale de mes contemporains ; bien sûr, je le déplore, mais je me réjouis de l’excellent travail de mémoire qu’accomplit notre ami RusNasledi, dont vous trouverez l’adresse dans la liste « Gotha » ci-contre.

Je vois bien que quelque chose se trame, un grand « remuement », et que s’annoncent des temps difficiles. Je suis partagé entre la double tentation du neuf et de l’ancien. J’appartiens au signe du verseau. Feue Madame Soleil, qui officiait jadis à Europe 1, et que j’ai bien connue, le regardait comme le parfait signe de l’air. Germaine Soleil était une femme très étonnante, bien supérieure à la pittoresque pythie périphérique, dont la mémoire s’éteint avec les derniers lecteurs de France-Dimanche. Elle me dit un jour, sur le ton de la confidence navrée, que nous quittions progressivement l’ère du verseau, née avec le Christ, expansive, dilatée, voyageuse, avide de science, de découverte, de sensation. Elle fixait le terme de cet accomplissement, progressif, vers l’année 2010.
Je me trouve, bien loin d’ici, dans un pays de brume et d’eau. Depuis quelque temps, je ne cesse de me déplacer, tel un tzigane de luxe. Il y a une sorte d’enchantement des brumes crépusculaires, un envoûtement : elles semblent vouloir nous entraîner après elles, nous envelopper, nous ensorceler de vapeur froide. Je crains la terre sombre, la dure logique de la glaise, qui se tient sous nos pieds, toujours prompte à nous blesser, impatiente de nous ensevelir.
Mon sang mêlé aime les métamorphoses.
Le vent passera sur tout cela, et le dissipera.

mardi 22 novembre 2011

Ma vie ne tient qu'à un « feelgood »

À Vincent, qui s'inquiète, ou plutôt m'interroge : « Comment allez-vous ? », voici ma réponse :



Pour le reste, vive l'Europe centrale !

samedi 5 novembre 2011

J'aimais les femmes atroces dans les quartiers énormes (4)

Voir épisodes précédents, in Jolie femme (mes liens ne fonctionnent plus !)



Métropolis a été récemment restauré. Le film est commercialisé, sous la forme d'un DVD, dans sa nouvelle apparence, par MK2 productions. La Cinémathèque française reprend une exposition de la Deutsche Kinemathek de Berlin, qu'elle enrichit de sa propre documentation, « … suite à la découverte en 2008 à Buenos Aires d’une version quasi complète du film. Composée de projections d’extraits et de pièces uniques (dessins originaux des décorateurs, robot de la « femme machine », costumes, appareils, photographies de plateau…) ».




Samedi soir, il y avait une lecture publique de la longue et belle correspondance
que Fritz Lang entretint avec son amie Eleanore Rosé. Ils s'étaient rencontrés avant la Seconde guerre mondiale, à Munich. Eleanor a vécu à Paris, puis à Londres. Ces lettres rapportent avec une belle lucidité les mouvements d'humeur, mais aussi les convictions de Lang, viennois d'origine, allemand par conviction, exilé, naturalisé américain, refusant toute appartenance à « cette race qui avait causé tant de mal au monde », revenant enfin, tel un vieil Ulysse, dans son ancienne patrie, dont il ne voulait plus parler ni écrire la langue. Les échanges entre César (Fritz Lang) et Cléopâtre (Eleanore Rosé), ainsi qu'ils se nommaient, sont toujours passionnants, parfois très émouvants. Eleanore est une remarquable personne, très fine, très cultivée ; Fritz, de son côté, se présente sans masque, veut expliquer son travail et ses intentions de cinéaste. Ces deux êtres éprouvent l'un pour l'autre une estime, une amitié, qui ne dissimulent pas une vraie tendresse :
« Ma très chère Cléopâtre,
Comme d'habitude, nos deux dernières lettres se sont croisées.C'est drôle – (pas drôle = ha ha, mais drôle = étrange) – que deux personnes qui éprouvent une telle affection l'une pour l'autre ressentent au même moment, alors qu'elles sont séparées l'une de l'autre par près de huit milles kilomètres ou plus, le besoin de s'écrire... – c ‘est l'un des mystères du monde !
»(Fritz Lang à Eleanore Rosé, janvier 1976, peu de temps avant la mort du metteur en scène).

Vous trouverez plus de détails à cette adresse : http://www.cinematheque.fr/fr/musee-collections/actualite-collections/actualite-patrimoniale/fritz-lang-eleanor-rose-dialogues-exiles.html

lundi 31 octobre 2011

Le dernier bain de Diane











































Diane Arbus est au musée du jeu de Paume. J'attendais cette exposition avec impatience. J'y retournerai, car il est impossible, non de tout voir, mais de tout assimiler en une seule visite. Enfin, c'est bouleversant ! L'œil d'Arbus n'est pas d'une voyeuse mais d'une voyante. J'imagine qu'elle discernait dans l'humanité des individus, des singularités admirables.
Sujette à d'importantes variations d'humeur, qui lui procuraient, parfois, un sentiment de peur, elle se suicida en juillet 1971. Son ami, Marvin Israel, également photographe et peintre, inquiet de son silence, se rendit à son appartement, où il la trouva « morte, recroquevillée dans la baignoire sur le flanc gauche […] portant une chemise rouge, un short en jean bleu, pas de socquettes » (rapport du médecin légiste).
Ci-dessus, trois photographies de Diane Arbus :
Barmaid chez elle avec un chien en peluche, La Nouvelle-Orléans, Louisiane, 1964
Jeune famille de Brooklyn sortant pour une promenade dominicale, New York, 1966
Femme en voilette sur la Cinquième Avenue, New York, 1968

Quittons-nous sur une petite valse mélancolique, une brève splendeur dont Franz Schubert avait le secret.
Je cherchais l'interprétation de Kuppelwieser Walzer, par Brigitte Engerer, mais ne l'ai point trouvée. Celle que je vous propose ne bénéficie pas d'une bonne qualité d'enregistrement, mais elle est délicate, et l'on peut s'imaginer passant, un soir d'été, près d'une maison, d'où s'échappent, par la fenêtre ouverte, ces quelques notes…




L'interprète se nomme Meguy Djakeli, elle mériterait une renommée à laquelle d'autres atteignent sans démontrer autant de don et de grâce. Géorgienne d'origine, elle vit en France depuis 2002. Elle enseigne le piano à La Baule.

mardi 25 octobre 2011

Ma mère, femme d'automne

Il n'est pas vain de penser à nos morts et, en particulier, à nos mères, quand elles sont mortes.


Jean-Roger Caussimon - Ma mère par Leboc




Et pour mon ami Thierry O., kiosquier très singulier, qui vient de perdre son père, cette chanson, de et par Barbara :



PS : L'accès à Lettres de Moscou se fait désormais sur invitation. Qui pourrait m'obtenir un carton ?

dimanche 18 septembre 2011

L'affranchi




Il a eu raison de ne pas nous dire « ce qui s'était réellement passé » dans la chambre su Sofitel, mais il aurait pu nous épargner cette mauvaise mise en scène, notre Casanova du Bronx, notre séducteur à la taille épaisse. Défendre son honneur, soit, mais dans ce décor de confessionnal pour reality show ? Tout cela sentait la fabrique et la récitation d'élève plus appliqué que doué. On y apercevait de la grosse ficelle de communicant : les besogneux qui sont chargés de son « image » continuent à lui souffler, depuis la coulisse, le monologue d'un cabotin vieillissant. DSK, hier plus que jamais, a démontré qu'il n'était qu'un produit politicien pour temps de disette, imaginé, conçu par des professionnels malhabiles et des affidés. L'ensemble de la séquence TF1 fut un curieux mélange de sueur et de paillettes, un pauvre scénario co-signé par des plumitifs d'Hollywood-sur-Seine. Quelle forme de sincérité résisterait à ce traitement ? Que penser d'une confession « en direct live », dont chaque « période » est balisée par un titre et une photographie, retransmis par un écran judicieusement placé derrière la journaliste : « La justice américaine », « Nafissatou Diallo », « Les primaires socialistes », « L'avenir » ?

En mauvais perroquet, DSK a repris les mimiques et les « grimasques » de Robert De Niro dans le film de Martin Scorsese, « Les Affranchis ». On conviendra peut-être qu'il méritera prochainement un Gérard (1) plutôt qu'un Oscar.

(1) Les Gérard du cinéma et de la télévision : joyeux et cruel mélange de cérémonie dérisoire et de revue satirique annuelle, qui vient « récompenser» les plus mauvais films et acteurs du cinéma français, ainsi que les pires animateurs et émissions de télévision.

Photographie : Robert De Niro est attentif aux recommandation du metteur en scène Martin Scorsese (scène du film Les Affranchis. Hélas, la communication des politiciens ne bénéficie pas d'aussi talentueux personnages !

lundi 12 septembre 2011

Delon, sans retouche






















Cela se passait jeudi dernier, dans les locaux d'une chaîne de télévision. On y présentait à la presse un film, un documentaire sur la période de l'Occupation. Vous le verrez prochainement, je vous en reparlerai ; d'ores et déjà, je peux vous dire qu'il s'agit d'un très beau travail historique, d'une œuvre forte, audacieuse.
Son commentaire est dit par Alain Delon et par sa propre fille, Anouchka. Ils étaient présents jeudi. J'ai pu observer Delon. Le temps, sans l'épargner, ne l'a pas « déconstruit ». On lit sur ce visage les mêmes traces, plus profondes, de mélancolie que celles de sa maturité lisse. Il y a, chez cet homme, un dépôt, une sédimentation de tristesse que le cinéma aurait pu exploiter, comme on creuse une mine pour en trouver un filon d'or. Qui donnera à Delon son dernier grand rôle ? Il se tient debout, solitaire et sans emploi, il porte en lui la grande douleur d'un monde perdu.

Photographie PM

Sur Delon, voir également Alain, sors de ce corps !, Delon ne mégote pasNico, une allemande dans la FactoryLe décor d'une vie -3-

jeudi 11 août 2011

Madame Grès bissée.








































































































(Voir, sur le même sujet, le message précédent).Je sais, ces photographies manquent de piqué, elles sont mal éclairées, et bien d'autres défauts encore. Rendez-vous sur le site du musée Bourdelle, on y voit des photographies prises par les plus grands.

Une japonaise passe près de la tête d'Adam Mickiewicz. Elle lui accordera un long regard. Les japonais se sentent bien en France, nous les accueillons pourtant, comme nombre d'étrangers, fort mal.

Adam Mickiewicz, par Bourdelle, 1910.

La robe et le Christ.




Photographies PM

Madame Grès































































Cristobal Balenciaga, Coco Chanel, Christian Dior, Madeleine Vionnet, Paul Poiret, Jeanne Lanvin, Elsa Schiaparelli, Lucien Lelong, Yves Saint-Laurent, Maggy Rouff, Hubert de Givenchy, Philippe Venet, Jacques Fath… Tous ces noms, augmentés de quelques autres, figurent dans mon panthéon. Je sais bien que tout cela, après tout, n'est que du chiffon, mais du chiffon « émerveillé », du chiffon animé du principe d'élégance et du souci de perfection. « Vêtir ceux qui sont nus. » dit Matthieu, dans son évangile (25,35-45). Certes, ces grandes griffes n'appliquaient pas précisément cette recommandation, mais ils ont largement contribué à enchanter le monde. Un autre jour, je vous parlerai de mode, ce soir, je n'ai guère le temps, je m'éloigne, je gagne des contrées lointaines. Je pars donc avec l'illusion bienfaisante que je vous manquerai.
J'ai rendu visite à Madame Grès, dont le musée Bourdelle expose d'admirables modèles. J'invite celles et ceux qui se trouvent actuellement à Paris à se rendre à cette exposition, ils seront éblouis. En outre, les robes étant exposés parmi les sculptures de Bourdelle, ils auront un plaisir redoublé. Le temps de la haute couture est passé. Madame Grès est morte oubliée. Son retour à Bourdelle nous est une grâce (jusqu'au 28 août).

Modèles ci-dessus :
Natté de soie noire (avec Christ en croix), 1976.

Le triangle inversé est une invention de Madame Grès. Cela vous fait des épaules !

Automne-hiver 1958-1959, robe de cocktail en faille de soie noire.

Grande robe buste, 1976.

Photographies PM

Métro-pompes








Il en va des souliers comme du reste, quand ils présentent bien, qu'ils sont soignés, ils ont du succès. Deux chaussures de bonne apparence ne demeurent jamais longtemps seules.
La preuve, en deux stations de métro.

samedi 6 août 2011

On enterre Charles





Paris, église de la Madeleine, le 23 février 2001, messe des funérailles de Charles Trenet : Jean-Michel di Falco-Leandri, alors évêque auxiliaire de Paris, plus spécialement chargé des relations avec les artistes, prononce l'homélie.



« La mort d'un homme est toujours un événement. Qu'il soit célèbre ou inconnu, l'Église le confie à la miséricorde de Dieu, car chacun se présente devant lui avec ce qui fut beau et grand dans sa vie mais aussi ce qu'il y eut de pauvre et de misérable. Chacun a besoin que ses frères, qui sont encore sur la terre, s'écrient dans la ferveur de leur espérance : "Seigneur, prends pitié ! ". Cet appel est le nôtre ce soir. Croyants, nous prions pour Charles Trenet. Ceux qui ne partagent pas notre foi se recueillent. C'est l'amitié pour Charles qui nous rassemble en une seule famille.

« La parabole du fils prodigue, que nous venons d'entendre se suffit à elle-même. La commenter risquerait d'en édulcorer la force. La pointe du récit n'est pas de montrer du doigt le fils qui a mené une vie dissolue. C'est de donner la mesure de l'amour et du pardon du père, c'est à dire de Dieu, lorsqu'on se tourne vers lui.
Ces paroles de miséricorde et d'espérance sont d'un grand réconfort pour les chrétiens, au moment où ils entourent un être aimé, pour un dernier adieu.

« Dans la nuit de dimanche à lundi Charles Trenet s'est placé sous le regard de Dieu, dans la vérité de ce qu'il a été. Sans masque ! Ces masques dont nous savons habilement nous parer pour donner l'apparence de la joie, là où se trouvent la détresse, le doute, l'angoisse et le désarroi. N'est-ce pas ainsi, dans chacune de nos vies, pétries dans les larmes de la douleur et dans celles de nos éclats de rire ?

« L'annonce de la mort de Charles Trenet a déclenché un déferlement d'éloges. Unanimement on a reconnu le talent exceptionnel de l'artiste qu'il a été et qu'il restera. Il a su toucher les cœurs en répandant l'optimisme, la joie de vivre et en redonnant l'espoir.

« Dieu se réjouit lorsque nous mettons à la disposition des autres les dons que nous avons reçus. Charles Trenet l'a fait largement. Notre assemblée et la foule rassemblée à l'extérieur en témoignent. En revanche la notoriété, les décorations et les titres ne pèsent pas lourd dans la balance divine. Pour Dieu il n'y pas d'espace VIP où seuls quelques privilégiés auraient le droit de pénétrer. Si cet espace VIP (les personnes vraiment importantes selon les critères humains) existe, tout le monde y a sa place, car, aux yeux de Dieu, tout être humain a la même poids : le poids de l'amour. Ne nous trompons pas, il ne s'agit pas de n'importe quel amour. Le Christ le décrit ainsi : " Il n'y a pas de plus grandes preuves d'amour que de donner sa vie pour ceux que l'on aime. "

« Charles Trenet, comme tout être humain, a rêvé d'aimer et d'être aimé. Sa passion pour la vie s'exprimait comme une soif d'infini, un désir absolu. Ne pourrait-on y voir un avant-goût de la vie en Dieu ? Dieu seul peut donner cette plénitude, pour apaiser nos passions, non en les niant, mais en leur donnant tout leur éclat, tout leur sens. Seule la vie en Dieu, que la mort inaugure, abolit les limites de la sensibilité, du temps et de l'espace.

« Pas plus que chacun d'entre-nous Charles Trenet n'a été un saint ! On pourrait débattre pour savoir s'il avait une foi pleine d'assurance, mais nous ne sommes pas ici pour justifier un homme. Les funérailles religieuses ne sont pas une canonisation, une consécration, une récompense pour chrétiens exemplaires. Tout baptisé, quelle que fut l'histoire de sa vie, a toujours sa place dans l'Église, parce qu'il a une place dans le cœur de Dieu. La miséricorde de Dieu est offerte à tous, elle n'est pas sélective. Personne n'est définitivement enfermé dans son passé. Seuls sont prisonniers de leur destin ceux qui ont perdu l'espoir.

« Je garde en mémoire ce que me disait un jour un artiste : " Je n'attends pas que l'Église me dise que mes actes sont bons alors que je sais qu'ils sont mauvais. Mais j'attends qu'elle m'aime et qu'elle me dise que Dieu m'aime malgré mes péchés. ". C'est pourquoi j'affirme au nom de l'Église : " Charles, Dieu vous aime ! " N'oublions pas cette phrase de la Bible : " Si ton cœur te condamne, Dieu est plus grand que ton cœur. "

« Oui le Christ nous assure qu'au-delà de la mort quelqu'un nous attend. Quelle qu'ait pu être notre vie, nous sommes aimés. Dieu n'humilie pas, car son jugement est toujours pardon et accueil. Seuls les hommes humilient durement, car ils sont capables de jugements impitoyables.
Personne ne peut prouver que nous avons raison ou tort de croire à la vie après la mort. Aujourd'hui, devant le mystère de la mort, quelqu'un nous demande un acte de foi. Quelqu'un dont l'image est clouée sur ce cercueil : Jésus-Christ. Quelqu'un qui ne s'est pas contenté de parler, mais qui a vécu ce qu'il disait, qui a signé son évangile de son sang, qui a mis toute sa vie dans ses paroles.

« La mort engloutit avec elle ce qui n'a pas de valeur réelle, tant de choses auxquelles nous donnons par erreur de l'importance et qui nous font passer à côté de celles qui comptent vraiment. La mort ne peut rien contre l'amour. L'amour ne peut mourir ! Pour les chrétiens, la mort n'est pas le dernier mot de notre existence. C'est l'amour qui est le dernier mot.

" Au revoir, mes amis ", ces lignes que Charles Trenet écrivait en 1952, il nous les adresse aujourd'hui :

"Au revoir, mes amis
Au revoir, à bientôt, j'espère.
Au revoir, bonne nuit,
Que vos rêves soient choses légères.
Et demain, chantez-les, mes chansons.
Qu'elles gardent à foison
La joie dans votre maison.
A présent, c'est fini,
Au revoir, à bientôt mes amis
! " ».



Les relations entre Charles et l'église de France n'ont pas toujours été aimables. Il se trouve que, dans les années soixante me semble t-il, les autorités religieuses avaient refusé qu'il donnât un récital à Notre-Dame, parrainé par le Rotary (je ne suis pas très assuré des détails, je n'ai que le souvenir de l'« incident »). Ce refus catégorique se fondait, plus ou moins officieusement, sur les préférences sexuelles du chanteur.
En souvenir de cet épisode déplaisant, Charles Trenet écrira une chanson, qui donne le titre de l'album posthume, paru en 2006 : Je n'irai pas à Notre-Dame.

mercredi 27 juillet 2011

D'elles à lui, lady Dali et l'Hardy
























http://youtu.be/qKN5ij9D11Q


C'est une chanson sentimentale, avec un air de rien et des paroles propres à émouvoir les cœurs simples. Elle a donc tout pour me plaire. Elle est signée Michel Rivgauche, parolier talentueux et prolifique, dont le nom de baptême était Mariano Ruiz (1923-2005). Pour mémoire, et pour le saluer, rappelons qu'il a signé « La foule », chantée par Edith Piaf.
Françoise Hardy, qui connaît la chanson, ne s'y est pas trompée, elle a donné de ce texte délicat sa propre interprétation.

La photographie est de mon ami Jean-Louis Castelli (Jeanne Moreau dans « Ascenseur pour l'échafaud », de Louis Malle), mort brutalement, un dimanche après-midi. Nous puisions dans son trésor de documents, amassé au cours de cinquante années d'une belle vie de photographe de cinéma. Jeune homme, il s'était retrouvé sous l'uniforme français, à Berchtesgaden, dans le « nid d'aigle » de l'oncle Adolphe, évidemment déserté par celui-ci. Le récit de sa visite de la bibliothèque de Hitler était impressionnant. Il en avait d'ailleurs rapporté un ouvrage.
Jean-Louis, photographe de plateau, confident des plus belles actrices, homme du monde, titi parisien, corse, compagnon d'Audiard, de « Bob » Dalban, de Paul Mercey, témoin du génie comique naissant de Louis de Funès, je te salue depuis la terre.


Francoise Hardy - Parlez moi de lui par antonychris

Qui n’est pas contre moi, est contre moi. Ou pas. Et inversement !








« Ne courez pas, c’est inutile, vous n’irez jamais aussi vite qu’une balle ! J’en vois qui s’éloignent à la nage, ceux-là ont une chance de s’en sortir. J’ai trop à faire sur la terre ferme pour me soucier d’eux. Mais en vérité, je vous le dis : en me fuyant, ils se perdent, car j’accomplis un paradoxe. Ceux qui connaîtront mon paradoxe seront tués ou blessés, mais ceux-là seront sauvés. Arrête de râler, toi ! Tu te fais remarquer pour que j’abrège tes souffrances, c’est ça ? Mais tu dois souffrir ! Tu es né dans le pays le plus paisible du monde. Le moindre de tes actes était sous contrôle : tu triais tes déchets, tu roulais sur les pistes cyclables, et ton dernier rhume a été entièrement remboursé par la sécurité sociale. Tu pensais que le monde était à l’image de ta terre natale : grave erreur ! C’est moi, ta terre natale.

« Regarde-moi bien : je suis ta peur fondamentale, la muraille noire griffée par une bête d’Apocalypse. Je suis la nuée qui porte l’orage. Désormais, tu connais ma foudre. Je viens de loin, je descends d’une hache et d’un drakkar. Hier, je maîtrisais les océans ; j’ai découvert l’Amérique en l’an Mille. Je semais la terreur partout où j’abordais. Je pillais, je tuais, je violais. Je soumettais les peuples, j’engrossais les femmes sur les corps ensanglantés de leurs enfants, j’assommais les bœufs avec mon poing, et les loups fuyaient à mon approche. J’aimais le vin et le sang, et je les mêlais dans le crâne de ma dernière victime. J’ai brûlé et bâti des maisons, j’ai fondé des colonies ; j’aimais le bruit que produisaient, sous le choc de mon fer, les os broyés de mes ennemis. Le vent me rapportait les récits de ma légende abominable. J’entendais, dans la nuit, les plaintes des agonisants et les gémissements des veuves. Comprends cela, jeune social-démocrate à l’agonie : on m’a cru disparu, enseveli mais je suis une force obscure, qui ne se retire que pour surgir, plus mauvaise, plus déterminée. Je veux le bien de mon peuple. Je veux ton bien, cher concitoyen que je viens d’énucléer. Et pour qu’advienne le bien, il faut que je sème le mal ! Je te l’ai dit, petit socialisant, je suis paradoxal. J’incarne le paradoxe de l’île d'Utoeya !

« Que dis-tu ? Je ne comprends rien : articule, à la fin ! Et tout ce sang entre tes lèvres ! Tu souilles mes bottes ! Parle dans l’hygiaphone, sinon, je n’entends que tes postillons ! Ah, ah ! Elle est bonne, celle-là, tu ne l’attendais pas, hein ? Je t’abandonne, à présent, il me reste tant à faire ! Je me suis donné une centaine de morts pour objectif, et je suis loin d’avoir achevé ma besogne. Je te laisse, ami, sois heureux ! Respect à toi, autour de toi, ainsi qu’en dessous de toi, et au-dessus ! Puisses-tu longtemps encore traverser dans les clous !

« Sur cette île, soudain, je suis comme un dragon de Komodo au milieu d’une harde de biches. Les proies sont si abondantes ! Je mords celle-ci, j’éventre celle-là, j’arrache, je blesse, j’estropie. Ma bave est un poison, mon baiser est mortel. Je massacre. J’avais prévenu mes contemporains ; aujourd’hui, j’accomplis mes écritures. Regardez-moi, étudiez les traits de mon visage, soutenez mon regard d’iguane, imaginez le contact de mes veines froides sur votre peau ! Je suis légion ! Une armée numérique annonçait mon triomphe : je suis celui qui devait venir.

« Une sirène retentit, voilà les policiers : ils vont m’entendre, ceux-là !
Une heure ! Ils ont mis une heure pour arriver jusqu’à moi.
Mais que fait la police ? »




http://youtu.be/hQ77p1kXPwQ

mercredi 13 juillet 2011

Gabrielle et Georges





























































Georges Pompidou était un homme très raffiné, un dilettante, avec cela ombrageux, autoritaire, volontiers cassant, et le plus aimable des promeneurs. Il connaissait les poèmes les plus rares de langue française, et pouvait reprendre le ministre des finances, Valéry Giscard d'Estaing, lorsque ce dernier commettait une erreur dans une addition. À l'époque où cela avait encore un sens, il soutenait l'art contemporain.
Alors qu'il était président de la République, une jeune femme nommée Gabrielle Russier, professeur, amoureuse de l'un de ses élèves, fut accusée de détournement de mineur et condamnée. Elle se suicida. L'affaire fit grand bruit.
Le 10 juillet 1969, fraîchement élu président, Georges Pompidou tient sa première conférence de presse. Un excellent journaliste, Jean-Michel Royer, l'interroge sur ce terrible drame. Pompidou reste coi pendant un long moment, puis répond sobrement :
« Je ne vous dirai pas tout ce que j'ai pensé sur cette affaire. Ni même d'ailleurs ce que j'ai fait. Quant à ce que j'ai ressenti, comme beaucoup, eh bien :
Comprenne qui voudra !
Moi, mon remords, ce fut
la victime raisonnable
au regard d'enfant perdue,
celle qui ressemble aux morts
qui sont morts pour être aimés.

C'est de l'Éluard. Mesdames et Messieurs, je vous remercie ! »

Or, ce poème, Éluard l'avait écrit dans la tourmente de la Libération, pour dire son dégoût des procédés odieux, que les héros « empinardés » de la dernière heure, cocufiés par leurs femmes avec les vainqueurs, faisaient subir aux infortunées « collaboratrices horizontales ».

La dernière année de sa vie fut une manière d'agonie publique. Il souffrit en silence, montrant un visage et un corps soufflés par l'action de la cortisone. Il n'aimait que la compagnie des artistes et des écrivains.


Photographies PM : Statue de Georges Pompidou, par Louis Derbré, avenue Gabriel, à un jet de marbre du parc de l'Élysée, Paris, VIIIe arrondissement.

mardi 28 juin 2011

dimanche 26 juin 2011

Mé-Tron

Si leurs pas sont perdus, leurs pieds ne le sont plus…











































































(Le sujet des pieds est d'actualité, au point que je peux craindre de passer pour la branche éloignée d'un certain tron… Qu'importe ! Le thème est bon, mais je reconnais volontiers que les photographies manquent de qualité graphique.)

(Photographies PM)

mercredi 22 juin 2011

La voix de Jeanne



Le hasard d'une programmation m'a fait entendre une voix exceptionnelle, mais mal connue, que j'avais oubliée, celle de Jeanne Lee (1939-2000).
Entendez, je vous prie, sa tendre puissance vocale d'alto, qui évoque à la fois la tradition gospel et l'audace harmonique. Elle se marie parfaitement avec le piano seul. Il n'y a pas de recherche d'effet, mais de perfection. Son jazz est sophistiqué, cérébral et sensuel, sans prétention, sans abstraction rébarbative. Elle aime la scène, les clubs, la nuit. Née à New York, Lee est une femme de la ville.
Physiquement, elle avait une allure folle.
Quant au couple musical qu'elle a formé avec le pianiste Ran Blake, il ne me semble point éloigné de l'idée de la perfection.

http://youtu.be/QCZzrOklCVE

Entendez à présent Ran Blake, seul au piano : que serait la musique de notre temps, sans Claude Debussy, et privée des racines du blues, je vous le demande ?
Blake est grand, Jeanne, immense !

http://youtu.be/PjIZFvk5_JU

Vous connaissez, bien sûr, « Laura » (musique de David Raskin, paroles de Johnny Mercer, pour le film éponyme d'Otto Preminger. Au fait, Otto preminger n'était pas n'importe qui !). Voyez ce qu'en fait Jeanne Lee, toujours accompagnée, au piano, par Ran Blake :

http://youtu.be/HjBqKqfgOzw

mardi 21 juin 2011

Chez le moscovite



Vous irez, d'un seul clic, chez Lettres de Moscou (adresse ci-contre), et vous serez, comme je le fus, saisi par sa traduction d'une suite de poèmes du polono-russo-judéo-arménien (il n'était point d'Arménie, mais il connut et aima ce pays mélancolique, qu'on a martyrisé), Ossip Mandelstam (1891-1938).
Je trouve admirable le choix et le rythme du vocabulaire de Vincent, pour sa traduction de textes que je ne connaissais pas. Décidément, ce garçon est plein de ressources. Nous avons eu des débuts difficiles, mais j'ai appris à connaître et à apprécier ses nombreux talents. Il me plaît de savoir que des personnalités, si différentes de la mienne, et parfois rudes, existent et prospèrent intelligemment. La fréquentation des blogues m'aura conforté dans cette idée simple : nous sommes des individus, des êtres uniques, à la fois vains et nécessaires. Ce qui fait notre humanité n'est peut-être pas ce qui nous unit aux autres, et nous rend semblables à tous, mais ce qui nous en sépare et révèle notre lueur pâle. (Tout cela est bien sérieux ! Veuillez m'excuser de cette soudaine séquence « gravité ». Je finirai boursouflé !)
Autre chose étrange : hier, je marchais, lorsque le nom et le visage de Mandelstam me sont revenus. Il y a bien longtemps que je n'avais songé à ce grand poète, romantique et moderne (il n'appartient pas au mouvement futuriste). Je l'ai retrouvé, tout à l'heure, chez Vincent. Ce n'est pas exactement le hasard objectif, mais c'en est une variante.
Une dernière chose : j'avais lu un récit des dernières années de Mandelstam, par Robert Littell (le père de Jonathan). Celui-ci l'avait écrit après après avoir rendu visite à la veuve d'Ossip, Nadejda*, à Moscou (il était correspondant de Times ou de Nesweek, je ne sais plus).

Voici une traduction, sans doute discutable, d'un texte fameux de Mandelstam, qui lui fut fatal. Après l'avoir lu à un cercles d'amis, Mandelstam, connut la geôle, la torture, la déportation, et la mort solitaire, atroce.
Portrait de Staline :

Nous vivons sans sentir sous nos pieds de pays,
Et l'on ne parle plus que dans un chuchotis,
Si jamais l'on rencontre l'ombre d'un bavard
On parle du Kremlin et du fier montagnard,
Il a les doigts épais et gras comme des vers
Et des mots d'un quintal précis: ce sont des fers!
Quand sa moustache rit, on dirait des cafards,
Ses grosses bottes sont pareilles à des phares.
Les chefs grouillent autour de lui, la nuque frêle.
Lui, parmi ces nabots, se joue de tant de zèle.
L'un siffle, un autre miaule, un autre encore geint...
Lui seul pointe l'index, lui seul tape du poing.
Il forge des chaînes, décret après décret!
Dans les yeux, dans le front, le ventre et le portrait.

De tout supplice sa lippe se régale.
Le Géorgien a le torse martial.

(Tristia et autres poèmes)

* « Contre tout espoir », et « Fin de l’espoir », témoignages de Nadejda Mandelstam, parus aux éditions Gallimard

dimanche 19 juin 2011

C'est Paris qu'on emballe !





















































Place de la Concorde, en septembre 2010, on soignait les deux lions dits de Florence, d'après Flaminio Vacca.
Celui qui paraît ici, est situé au départ de la rue de Rivoli, dans le jardin des Tuileries, à l'angle que forme la terrasse des Feuillants (côté musée du Jeu de paume) avec la perspective des Champs-Élysées. Pour cette opération délicate, il fut mis en cage. Et je voyais, chaque matin, son œil fou et sa crinière Louis XIV derrière cette manière de tulle de chantier.
(Photographies PM)

Alexandrie…






















































































Cet homme, qui s'éloigne du lieu où nous nous sommes retrouvés, a joué un rôle considérable dans le renouveau du cinéma français, après la Seconde guerre.
Dans quelque temps, vous en saurez plus…
(Photographies PM)

lundi 13 juin 2011

Merci Rusnasledi !

Sur l'excellent blogue de RusNasledie (l'un des premiers référencés chez nous ; voir, ci-contre, Gotha ou Les très fréquentables), cette version, fort belle, de Deux guitares, par Lida Goulesco :

http://youtu.be/vkGuW7faMMI

Lida Goulesco appartient à la légende de la chanson tzigane. Elle connut une certaine popularité, à Paris, qui fut naguère la ville préférée des artistes tziganes désireux de sortir du folklore. Elle mêlait une sobre élégance à la gouaille de la plaine et du vent. RusNasledie connaît son affaire, et traite de ce genre musical avec autant de soin que de ferveur. Je lui fais donc toute confiance, même si je ne reconnais pas tout à fait ici la voix de la Goulesco.

vendredi 10 juin 2011

Belle gueule d'ombre

Était-ce en 1980 ? Un an avant, ou après ? Une sorte d'ange déchu surgissait du fond d'un paysage post-atomique, un grand type mince. Il chantait des textes habiles, contenant un peu d'obscurité, et sa voix, comme une lime sur une feuille de fer rouillée, annonçait une apocalypse. Il s'appelait Jean-Patrick Capdevielle. Il connut un succès foudroyant.
Il fut l'objet d'attaques violentes de la part des critiques, qui virent en lui un Bob Dylan « mercerisé ». Puis il disparut. Je me souviens de sa belle gueule et de ses chansons lancinantes.

« Quand t'auras trainé trop longtemps dans les rue jaunes,
En d'ssous du soleil qui sanglotte,
Et quand l'ironie viendra pour te d'mander l'aumône
[…] »
(Les rues jaunes)


http://youtu.be/TEAe_WzYrl0

Et ceci, encore, qui pourrait vous étonner :

http://www.deezer.com/en/music/playlist/43881013 (choisissez « Salomé »)

Et encore, ce beau texte d'étrangeté :

http://youtu.be/sYbN0rpbueY

Pour celles et ceux qui n'étaient pas nés, pour celles et ceux qui se souviennent vaguement, pour en finir, aussi, avec la séquence Capdevielle, cette chanson, qui fut un immense succès.

http://youtu.be/Mkzw7Wop9pU

Après cela, Capdevielle devint l'objet d'un véritable lynchage, dans la presse spécialisée : une opération punitive, conduite par MM Manœuvre et de Caunes. Le premier vit confortablement de sa rente de notaire de la pop, le second tente désespérément de nous convaincre qu'il est un metteur en scène…
Dans cette vidéo, où il chante en direct, me semble-t-il, Capdevielle se démarque nettement de toute la production de son temps.
Belle gueule d'ombre, n'est-ce pas ?

Comme un frère

Longue conversation avec un homme, un ami, d'un grand âge : « Maurice Ronet fut pour moi comme un frère. ».
Jamais je ne déambulerai la nuit, dans Paris, en compagnie de Maurice Ronet, mais cette seule « transmission » émouvante, par un compagnon du « Feu follet » m'a servi de relais de mémoire.
Quand on est naturellement mélancolique, la vie, souvent, est atrocement douce.

http://youtu.be/R5Ek1Hdfv0c
(J'ai déjà convié Daniel Darc, pour cette chanson, mais « bis repetita placeo »… Daniel Darc a traversé les flammes de l'enfer. Il a survécu. S'il passe près de chez vous, ne le manquez pas.)

jeudi 9 juin 2011

Fontaine, je boirai toujours de ton eau…

Quelle rencontre ! Arno et Brigitte Fontaine réunis, enfin ! Ils interprètent « Supermarket » et « Inadaptée », dans l'album « L'un n'empêche pas l'autre ». Arno fait le bref récit de leur duo.
Il ne reste plus à la Fontaine qu'à enregistrer les chansons de Kurt Weill (et, accessoirement, de Bertolt Brecht), et nous serons comblés !
http://youtu.be/N1rDNlid604
On peut entendre toutes les chansons à l'adresse ci-après :
http://www.deezer.com/en/music/brigitte-fontaine-arno/l-un-n-empeche-pas-l-autre-1026883
(Je vous recommande également « Rue Saint-Louis-en-L'île », avec Souchon).



Le cher Joël H. nous a confié une adresse (voir son message), qu'il faut recommander à toutes et à tous. M. Jo nous a également donné envie de retrouver la Faithfull dans Weill et Brecht.
La voici :


Brigitte Fontaine et Marianne Faithfull chante... par stilitano


Que mille pétales de fleurs s'ouvrent sous chaque pas de M. Jo !

samedi 4 juin 2011

Cœurs croisés, cœurs gravés (2)

À l'attention de Florence, qui écrit joliment « Intemporel ce Temporel », voici l'interprétation de « Bal chez Temporel », par Guy Béart.
http://youtu.be/xy4W1JOFGAw
J'espère augmenter son plaisir en faisant suivre ce texte magnifique, si bien mis en musique, par « C'était bien » ( Le bal perdu, paroles de Robert Nyel, partition de Gaby Verlor), où l'on retrouve Bourvil.
http://youtu.be/GXV-1ZebdBs
Ces deux chansons sont également dédiées à toutes les dames qui passent…

vendredi 3 juin 2011

Cœurs croisés, cœur gravés

André Hardellet, « L’essuyeur de tempêtes », un garçon délicat, un raffiné, un exigeant. Il a écrit, d’abord sous un pseudonyme, un livre « torride », qu’on lit d’un trait, mais d’une main : Lourdes, lentes. Je crois me souvenir qu’il fut condamné pour outrages aux bonnes mœurs. Il y a si longtemps, et j’étais si jeune !
Entendez le chagrin retenu d’André Hardellet, mis en musique par Guy Béart, chanté par Patachou : Bal chez temporel
http://youtu.be/2555UpuSbjY

Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense à ceux qui tous ont laissé leurs noms gravés
Auprès du nôtre

D'une rencontre au bord de l'eau
Ne restent que quatre initiales
Et deux coeurs taillés au couteau
Dans le bois des tables bancales

Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre Pense à ceux qui tous ont laissé leurs noms gravés
Auprès du nôtre

Sur le vieux comptoir tu pourras
Si le coeur t'en dit boire un verre
En l'honneur de nos vingt carats
Qui depuis se sont fait la paire

Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense aux doigts qui tous ont laissé quelques « je t'aime » Auprès du nôtre

Dans ce petit bal mal famé
C'en est assez pour que renaisse
Ce qu'alors nous avons aimé
Et pour que tu le reconnaisses

Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense aux bonheurs qui sont passés là simplement
Comme le nôtre

vendredi 20 mai 2011

Une chambre à Manhattan






















Poser comme une évidence, en prenant prétexte de l’« affaire » DSK, que la « France est en faillite », relève de la bêtise militante. Ce que l’ex directeur du FMI a fait, ou n’a pas fait, dans la chambre du Sofitel, est de l’ordre du comportement individuel, de la réponse qu’un homme apporte à une pulsion. La position sociale de cet homme détermine l’écho que trouve cette réponse dans les media. Manque de chance, DSK était directeur du FMI. S’il avait été employé des postes, nul n’en aurait parlé, et la France n’aurait donc pas été menacée de « faillite ».
La situation financière de la France est supérieure à celle de l’Amérique. Ses structures sociales, son appareil administratif, la qualité de ses services, l’autorisent à se considérer au moins l’égale des USA.
Pour ce qui est de l’avenir, et dans le seul domaine des rapports humains, la France se rappellera peut-être qu’elle possède le plus beau passé « galant » de toute l’Europe, et qu’il lui serait gravement préjudiciable de s’aligner sur le stupide et vain « égalitarisme » sexuel de nos frères d’Amérique. Les femmes et les hommes sont bien faits pour se plaire, pour se prendre, et pour se quitter. L’amour est une plaisante et cruelle comédie, que les unes et les autres se donnent à eux-mêmes. Il leur revient de n’en être ni les dupes, ni les victimes.
Photographie, PM
Précision : il y aurait beaucoup à dire de l'axe de défense des amis de DSK, en France, et de la position du parti socialiste. On pourrait même voir dans les propos des unes et des autres, un vrai mépris de classe. Lequel mépris ne paraîtra paradoxal qu'aux indulgents, aux aveugles, aux naïfs. Mais cela n'est pas l'objet de ce billet.