mercredi 24 décembre 2014

Râteau de Noël

Ce soir ou jamais ! Du 24 au 25 décembre, s'avance la nuit de l'amour. Certes, il ne s'agit pas de la même nature d'amour que celle chantée par Bruna Giraldi, mais enfin c'est encore de l'amour, et il est « dans l'air », comme dans la chanson.
Et puis, ce slow est impeccable, l'un des meilleurs de la chanson française. Excellente rythmique d'attaque, voix d'imploration, gorge lacrymale… Irrésistible.
- Ah, Bruna Giraldi « Y a de l'amour dans l'air » ! Vous dansez, mademoiselle ?
- Oui… mais pas avec vous !
Râteau !



Bon Noël à toutes et à tous !

On dansera dans la pénombre, ou en observant Le mouvement lent des corps amoureux, et encore en entendant ce jeune homme d'autrefois, et Bob, chansonnier 

lundi 8 décembre 2014

Brandobsession (Brando's session)

Voyez et pleurez !
Il refusa d'apprendre par cœur le monologue, qu'il devait dire au cours de cette scène, préférant improviser sur un canevas. Longtemps, il attendit derrière la porte, où se trouve la dépouille de sa femme, qui s'est suicidée. Puis il pénétra dans la pièce.
Voyez comme il se rapproche du lit, en déplaçant le fauteuil, jusqu'à prendre place sur la couche même.
Il déclare d'emblée, s'adressant à la défunte, que son maquillage excessif lui donne un air ridicule.
Il dit ses propres mots, accomplit le rituel que lui souffle une voix intérieure. En deux minutes, il suggère l'épais mystère de celle qui fut sa femme (« le chef d'œuvre de [sa] mère »), et remplit toute la semi-obscurité de la chambre de son désarroi fondamental.
Voyez et pleurez !
Le crépuscule est avec lui.

(Scène extraite de Le dernier tango à Paris)



Puis, pour le seul plaisir de le revoir, de traquer sa déambulation d'homme provisoirement surnuméraire,   de contempler ce visage d'une beauté dangereuse, ces images extraites du Dernier tango, habillées par la chanson de Leonard Cohen Dance me to the end of love, dans la superbe version qu'en donna Madeleine Peyroux. Son texte énigmatique convient parfaitement à l'histoire de ces deux êtres, que seul le hasard pouvait « apparier ».



Je vois bien ce que ma Brandobsession peut comporter de ridicule et de lassant, mais je ne peux m'en débarrasser.

 L'indésirable 2 Brando sur le trottoir,  Le fantôme du métro aérien 1,  Le fantôme du métro aérien 2,  Retour sur le pont  Le principe de fascination,  Marlon B, for Lady Tanya, and for all Tous les garçons' ladies  Voici Leonard, sortez vos mouchoirs ! L'étrangeté sentimentale

dimanche 7 décembre 2014

L'enfance, notre passager clandestin

Quelle qu'elle ait été, émerveillée ou désastreuse, raffinée ou plus que rude, nomade ou châtelaine, notre enfance nous tient la main, et ne la lâche pas. Nous sentons la pression de ses doigts, sa caresse sur notre joue, la force de sa gifle. Elle fonde notre vaste mélancolie.
Poursuivant dans ma « Brandobsession », je donne ce cliché de l'ogre Sa beauté ne le sauvera pas : il pourra bien se boucher les oreilles, toujours il entendra sa plainte d'enfance
C'est ainsi que les hommes vivent.



















L'interprétation de ces deux chansons connues, très différentes l'une de l'autre, de Ferré par Thiéfaine, leur donne un singulier relief. Pour la première, on pressent quelque chose comme une lassitude, une résignation nerveuse ; pour la seconde, un empressement de virilité. Pour finir, La Ruelle des morts, de sa composition : l'enfance encore…



 L'indésirable 2 Brando sur le trottoir,  Le fantôme du métro aérien 1,  Le fantôme du métro aérien 2,  Retour sur le pont  Le principe de fascination,  Marlon B, for Lady Tanya, and for all Tous les garçons' ladies  

mercredi 3 décembre 2014

Les désirables

Ils ont incarné un moment éblouissant du désir français, du désir qu'on éprouvait pour les français. Ils l'ont incarné non sans une certaine arrogance : mêlée de gouaille pour Belmondo, de tourment pour Delon, d'insolence pour Bardot. Elle venait d'un milieu bourgeois, en possédait toute la solide extravagance, le pas assuré, la bouderie nonchalante. Delon avait fui un destin de garçon boucher, Belmondo était le fils d'un talentueux sculpteur.
Le monde voulait autre chose, il éprouvait un désir neuf. La France lui a proposé ces trois-là, et il s'en est immédiatement épris. Il a aimé la mèche dans les yeux d'Alain le sombre, la sueur sur sa peau si lisse. Il fut séduit pas le charme cabossé de Jean-Paul, le boxeur bien élevé. Il s'affola devant la sensualité innocente et têtue de Brigitte Bardot.
Bardot, Belmondo, Delon : la trinité d'un désir français.

Ci-dessous : Brigitte B., vers 1960, par Daniel Franay ; Jean-Paul B., par Tony Gryla, sur le plateau du film Pierrot le fou, de Jean-Luc Godard, en 1965 ; Alain D. , vers 1965, par Michael Holtz



















































On lira Nico, une allemande dans la FactoryAlain, sors de ce corps !Delon, sans retoucheDelon ne mégote pasLe décor d'une vie -3-Faites la moueUn « Grello » qui tintinnabule, une tartine qui dégouline, Bardot et ses « frères »Une vitrine pour ma cousine


lundi 24 novembre 2014

L'indésirable 3

Bardot évoque son unique rencontre avec Marilyn.
Bardot telle qu'en elle-même : la grâce et le vocabulaire, la détermination tranquille, l'élégance sans apprêt, l'effronterie aimable, la vivacité du regard comme un reflet de l'esprit. C'est aussi l'idée que je me fais de mon pays.
Ce que Brigitte dit du drame de Marilyn, du rôle néfaste de ses proches est évidemment très juste. Et son admiration, intacte, est celle d'une enfant éblouie.



Ci-dessous : Le 7 novembre 1954, Marilyn est hospitalisée à Los Angeles, au Cedars of Lebanon hospital.  Enceinte, et si désireuse d'avoir un enfant, elle s'est inquiétée d'un malaise et de douleurs persistants. Elle sera opérée d'une inflammation de l'endomètre, et n'accouchera jamais.
Son arrivé à l'hôpital est dramatique. Elle n'avait averti personne et se croyait anonyme. Or, les photographes l'assaillent, la traquent dans les couloirs, où elle tente de dissimuler son visage nu, sans maquillage. Elle a peur, elle est seule, elle veut disparaître. Les flash crépitent comme autant de coups de fusil.























Sur Bardot : Une vitrine pour ma cousine  Faites la moue Grello » qui tintinnabule, une tartine qui dégouline ... Fin de partie - 11 -

dimanche 23 novembre 2014

L'indésirable 2

Relativement aux choses de l'amour, ces deux-là, Marilyn M. et Marlon B., furent des ogres. Elle ne détestait pas les étreintes un peu rudes, voire crapuleuses, dans des lieux improbables ; il couchait ici et se réveillait ailleurs, avec quelques hommes et de nombreuses femmes. Ils furent les plus désirés d'entre tous.
Ils furent amants, et, semble-t-il, demeurèrent liés par un sentiment tendre. Quelque chose maintenait un lien entre ces deux superbes spécimens d'humanité, modifiés par la fabrique hollywoodienne de demi-dieux payés au cachet : peut-être le sentiment d'appartenance au peuple, plus rare encore, des élus de la grâce et de l'enfer.

Ci-dessous : Maurice Chevalier, parfait gentleman, préfère regarder ailleurs…




















« Je ne nourrissais aucune illusion d'être bonne actrice. Je savais que j'étais un troisième choix. En fait, je ressentais mon manque de talent comme un vêtement bon marché, que j'aurais porté intérieurement. Mais, Dieu, que je voulais apprendre, changer, m'améliorer ! » (M.M).
« Si, jouant le rôle d'une idiote, je dois poser une question stupide, j'y vais franchement. Suis-je supposée paraître intelligente ? » (M.M.).




















Ci-dessous : En 1961, Marilyn est hospitalisée dans un service pudiquement dénommé « neurologique ». Elle connaît alors une très profonde dépression. Brando se manifeste sans tarder. On peut considérer ce message comme un acte de tendre solidarité.




















Ci-dessous, Marlon Brando : Il tourne Le Dernier tango à Paris. Il est dans une période de régime alimentaire strict. Ses joues creuses, son air d'isolement, et la maturité des épreuves, lui confèrent une beauté sombre. Le cachemire va bien à sa peau…
























On lira Brando sur le trottoir,  Le fantôme du métro aérien 1,  Le fantôme du métro aérien 2,  Retour sur le pont  Le principe de fascination,  Marlon B, for Lady Tanya, and for all Tous les garçons' ladies  

mercredi 19 novembre 2014

L'indésirable

















Hollywood a méprisé Marilyn Monroe, du début à la fin. La fausse vénération dont elle y fit l'objet ne reposait que sur sa valeur financière. Elle a dit elle-même qu'elle avait passé plus de temps à genoux avec les producteurs et autres hommes d'influence, qu'à tenter de les persuader de son talent. Quant à l'une de ses plus belles conquêtes, John Kennedy, celui-ci ne fut ni plus ni moins attentionné que la moyenne basse de toutes les autres…
Il y a quelque chose de curieusement incompatible entre Marilyn et Hollywood. En apparence, elle est une créature des studios, qui la façonnent et la soumettent. Puis elle s'en émancipe, mais alors totalement, c'est à dire qu'elle se dégage de leur emprise matérielle et morale. Elle imagine et invente une renommée, qui n'est plus celle qui lui était destinée. Elle n'existe que pour être une star, puis, progressivement, elle excède ce statut, qui lui semble réducteur. Elle ne renie nullement son ambition, mais elle lui donne une autre dimension. Elle devient incontrôlable.
C'est qu'elle a eu accès, essentiellement par elle-même, à un monde « englouti », où s'anime des ombres et des songes obscurs. Or, elle ne craint nullement de l'affronter, elle se risque même à espérer qu'il lui permettra d'améliorer encore son jeu. Elle a raison. Dans le même temps, elle s'approche d'un précipice.   Ni la psychanalyse, ni le cinéma hollywoodien ne pouvaient l'empêcher d'y tomber.
Alors, il lui restait à accomplir son destin, seul moyen de démontrer l'impossibilité dans laquelle elle se trouvait d'être tout à la fois surnuméraire et désirée.

Lorsque John Huston, pour The Misfits (1961),  réunit à l'écran Marilyn, Montgomery Clift et Clark Gable, qu'avait-il en tête ? Il les éloigna d'Hollywood, la colline en manque d'inspiration, pour les plonger dans la chaleur suffocante du désert, près de Reno, Nevada. L'affaire sera rude à mener à son terme. Marilyn, certes, leur donnera à tous du fil à retordre, mais, semble-t-il, les envoûtera tous. La seule personne indésirable fut sans contestation cette épouvantable bonne femme, nommée Paula Strasberg, qui prétendait veiller sur le psychisme de Monroe. Son mari, Lee Strasberg, avait succédé au grand Elia Kazan à la direction d'une sorte d'école d'acteur. Kazan, qui se méfiait de Strasberg, lui avait recommandé de ne pas vendre sa camelote prétendument émotionnelle, introspective… Il fallait s'appeler Kazan pour susciter chez Brando le surgissement du chagrin fondateur, inconsolable. On mesurera la distance entre Kazan et Strasberg en observant le jeu pitoyable, misérable, de l'infortuné Paul Newman, le plus mauvais acteur américain de son temps. Il y aurait beaucoup à dire sur tout cela, mais ce billet imparfait traîne en longueur, je l'interromps donc.

Quelques photographies, prises hors champ, des « Misfits », comme autant d'instant dérobés à la joie simple d'exister tout en se sachant menacé de disparaître prochainement : c'est ainsi, par hasard, que s'installe en nous l'effet d'une puissante, d'une tendre mélancolie.


























 Ci-dessus, deux photographies d'Eve Arnold, en qui Marilyn avait toute confiance.



















Dans cette chanson de Bruce Springteen, il est question d'une jeune femme, abattue à bout portant (point blank) :

« Dis-tu toujours tes prières, petite chérie ?
Vas- tu toujours au lit
En priant le ciel, pour que tout aille bien le lendemain ? »




Si l'on veut, on lira  Her heart belongs to daddy


jeudi 23 octobre 2014

Les erratiques



La vérité, c'est que tout homme est égaré dans cette vie. Il partage des moments éblouissants, puis il est rendu à sa mélancolie, la mère de tous les hommes.
On entend ici une chanson du groupe Varsovie, constitué en 2005. J'aime le son rock coupant, juvénile,  de ces types rares, la diction « soufflée » du chanteur (Grégory Cathérina), sa rage élégante, et les textes un peu précieux, énigmatiques aussi.

On consultera, si on le souhaite, Comme un frère

dimanche 5 octobre 2014

En vie mais pas envie : de l'air, Duchamp !

À défaut de faire encore envie, je suis toujours en vie. C'est une excellente nouvelle, tout au moins pour moi !
Ce blogue, semble-t-il, a encore de nombreux visiteurs, malgré ma désertion momentanée. Je viendrai donc, prochainement, y déposer deux ou trois choses.
Après, nous aviserons.
En attendant, je vous suggère de vous rendre au centre Pompidou, où se tient une exposition consacrée à Marcel Duchamp. Contrairement à ce que prétend le monsieur de Libération, il s'agit de la plus pertinente recherche des origines de cette œuvre très complexe, depuis l'exposition que Jean Clair avait organisée, dans ce même musée, en 1977, intitulée Duchamp, le grand fictif. On y comprenait parfaitement les fondements culturels, on y décelait les influences multiples de cet aristocrate sarcastique. Jean Clair était remonté à la (aux) source(s), déboulonnant au passage la statue du destructeur, de l'iconoclaste ricanant. Derrière Duchamp, se tiennent les mathématiciens, les géomètres, les physiciens, et encore les symbolistes, le duc Jean Des Esseintes (personnage central de À Rebours, de Joris-Karl Huysmans) et quelques autres. Il faut aller au centre Pompidou, où se donne un festin d'intelligence et de beauté « difficile ». Nous en reparlerons.
Exposition Marcel Duchamp. La peinture, même, centre Pompidou, jusqu'au 5 janvier 2015.

Ci-dessous : Nu descendant un escalier, huile sur toile, 1912
Dessous : Marcel Duchamp descendant un escalier, photographie d'Eliot Elisofon, 1952
En bas : Étude de la marche par le procédé de la chronophotographie, Étienne-Jules Marey, 1882 




mardi 26 août 2014

Joie foraine

« […] Tout n'était que lumière, poussière, cris, joie, tumulte ; les uns dépensaient, les autres gagnaient, les uns et les autres également joyeux. Les enfants se suspendaient aux jupons de leurs mères pour obtenir quelque bâton de sucre, ou montaient sur les épaules de leurs pères pour mieux voir un escamoteur éblouissant comme un dieu. Et partout circulait, dominant tous les parfums, une odeur de friture qui était comme l'encens de cette fête. »
Charles Baudelaire, Le vieux saltimbanque (extrait), in Le Spleen de Paris

















Enfant, la fête foraine m'attirait fortement. Elle me donnait accès à des divertissements, que la vie réelle me refusait, à un monde parallèle, qu'on m'interdisait d'ailleurs, et que je fréquentais clandestinement. La profusion des jeux était amplifiée encore par la forte sonorité des voix, des musiques, des cris. Il se dégageait de tout cela un échauffement électrique, dont j'éprouvais les effets sur ma personne physique. J'ai conservé cette attirance, et dès que j'entends les échos venus de baraques ou de manèges, je m'en rapproche immédiatement. Chose curieuse : je me sens au milieu de cette joie foraine étrangement, délicieusement heureux et seul.
Une fête foraine à Nancy, janvier 2014, photographies PM













 Je veux saluer Maryline Treol, Maria Luisa Arnaiz, Andrés Sánchez Soto, et Ditos & Escritos, qui sont venus jusqu'ici. Ils sont les bienvenus.

samedi 5 juillet 2014

Le mouvement lent des corps amoureux

Elle m'évoque une enfance heureuse, cette jolie femme intelligente, au goût très sûr. Contrairement à nos provocateurs intégrés, qui ne recherchent que la notoriété d'État, et se complaisent dans une modernité plus rageuse que ravageuse, elle savait reconnaître l'esprit nouveau, l'invention talentueuse et durable. Elle s'appelait Michèle Arnaud.
Elle avait l'élégance acidulée des parisiennes et l'intelligence des audacieuses, augmentée de culture et d'esprit de curiosité. Serge Gainsbourg lui doit beaucoup. Elle reconnut son talent de compositeur, le fit connaître ; elle fut son interprète, sa protectrice, sa productrice, son amie très proche.
Si les années cinquante et soixante me paraissent encore lumineuses, nécessaires et définitivement « hostiles » à la terrible régression que nous nous imposons à nous-mêmes, fascinés que nous sommes par le naufrage de notre beau navire, c'est à elle ainsi qu'à quelques-autres que je le dois.

La voici dans une chanson de Gainsbourg. Il s'agit d'un slow : un moment de quête sensuelle tombée en désuétude. Deux corps se frôlent, mesurent leur compatibilité amoureuse, et, l'ayant vérifiée, la signifient par le tendre appui de la tête sur une épaule, l'enveloppement consenti de la main sur une hanche (exemple : Vous dansez, mademoiselle ?)..
Le slow, c'est le temps suspendu de l'amour furtif, sa cadence ralentie, son piétinement dans la pénombre exquise, c'est la première et ultime station verticale et rapprochée avant leur basculement de deux êtres aimables, ontologiquement voués au chagrin, à la solitude et à la contemplation (exemple :  La rumeur lointaine de l'amour).


                       
   
           
La voici encore dans une belle version, rarement entendue, du poème Le Pont Mirabeau, de Guillaume Apollinaire, mis en musique par Jacques Lasry.

Michèle Arnaud : Michele arnaud - écoute gratuite et téléchargement MP3
           
      On entendra une version très « partagée » de Ne dis rien, par Serge Gainsbourg, en compagnie de la délicieuse Anna Karina, en allant d'un bond à Vous dansez, mademoiselle ? Ensuite, et d'un pas décidé, on rendra visite à Une twisteuse dans l'haciendaLa rumeur lointaine de l'amourL'amour aux enchères

mercredi 7 mai 2014

La nuit



Il fait un temps d'illusion.
Hier est incertain et demain improbable. Demeurent quelques heures nocturnes. Elles sont notre avenir immédiat. En finissant, elles effaceront la forme que nous aurons prise : ainsi se dissipe le brouillard au matin, sur la terre lentement réchauffée. La nuit recouvre nos épaules, elle est bleue comme un cachemire sombre :
- I love you baby, and I always will, ever since I put your picture in a frame
- Taisez-vous ! Rejoignez-moi plutôt sous le cachemire bleu-nuit…

























Et aussi :
La nuitWaitin' for WaitsC'est ainsi qu'un soir, on cherche à savoir…Fin de féerie, Slave qui peut !

mercredi 23 avril 2014

Une fille en passant









































Elle ne me voit pas, je ne suis qu'un passant
Si peu considérable, un homme sans passé.
Elle ne croise pas mon regard oppressant,
Elle fixe un lointain de ses yeux lassés.

Derrière sa vitrine elle est là, froide offrande,
Indifférente à tout, et sourde à toute offense.
Nulle plainte ne sort de ses lèvres très grandes,
Son silence de cire est sa seule défense.

Elle ne connaît pas le fardeau d'un humain,
Le poids de son désir, le frisson sur sa chair,
Son souffle soudain court, la paume de ses mains,

Et son regard navré quand il voit la jachère
De sa vie désolée, qu'il perdit en chemin,
Et qui ne vaudra pas la moindre des enchères.

PM








mercredi 2 avril 2014

L'argent fait-il le bonheur des pauvres ?





Une personne très pertinente a attiré mon attention sur un article paru dans le site RAGEMAG. J'ai été étonné de ne pas me trouver en désaccord fondamental avec le contenu de cet entretien. Ronnie Moas, analyste financier très écouté de Wall Street, connaît parfaitement son affaire. Il s'agit peut-être moins d'une question de moralité que de proportion. 
L'extrême misère n'est peut-être pas le résultat de l'extrême enrichissement, mais celle-là ne se soucie guère de celui-ci. 
Et si, un jour, les employés européens d'Apple, se satisfaisaient des salaires misérables, que leur accorderont leurs patrons Indiens. 


En voici un extrait : 


Quand et comment êtes-vous parvenu à l’idée que la morale et l’éthique d’une firme étaient des choses à considérer avant de faire un investissement ?
C’est quelque chose qui me travaille depuis longtemps maintenant. Mon blog a pris quelques années avant d’arriver à maturité, et j’ai moi-même atteint la goutte qui a fait déborder le vase il y a quelques mois. C’en était trop. Quelqu’un, ici, devait parler des comportements dégoûtants de notre société, des exemples extrêmes du capitalisme. Apple a 150 milliards de dollars en banque en cash, et au même moment, ils paient leurs employés en Asie deux à trois dollars de l’heure. S’ils tentaient de faire ça aux États-Unis, ils finiraient en prison. Ils ne peuvent pas s’en sortir comme cela aux États-Unis, du coup ils vont dans des endroits où ils peuvent se comporter de la sorte.
Le PDG d’Amazon vaut à lui seul 27 milliards de dollars et ses employés dans les entrepôts américains ou européens sont payés 7 à 10 dollars de l’heure. Vous ne pouvez pas vivre avec un tel salaire aux États-Unis. Prenez Yahoo ensuite : le directeur de l’exploitation a été licencié il y a quinze mois et ils lui ont donné 109 millions de dollars. L’industrie du tabac n’est pas en reste : 5 millions de personnes meurent tous les ans à cause du tabac et cela reste un produit légal. Nous avons chaque année 3 millions de personnes qui meurent de faim chaque année et personne ne fait rien.
Nous sommes partis en guerre quand 3000 personnes sont mortes lors des horribles attentats du 11 septembre contre le World Trade Center. Depuis, 50 millions de personnes sont mortes à cause du tabac, 40 millions d’enfants sont morts de faim et personne n’en parle. Je veux comprendre jusqu’où tout cela ira, à quel moment nous allons nous réveiller et commencer à traiter les autres comme des êtres humains. Je ne devrais pas pouvoir être payé cent fois la somme qu’est payée la personne travaillant de l’autre côté de la rue au McDonald’s. Je ne vaux pas cent fois cette personne.



La totalité de l'affaire… RAGEMAG | Ronnie Moas : « Quelqu'un à Wall Street devait parler des conséquences du capitalisme. »







lundi 24 mars 2014

Je reste où je me plais

« Je ne conçois qu'une manière plus agréable que d'aller à cheval ; c'est d'aller à pied. On part à son moment, on s'arrête à sa volonté, on fait tant et si peu d'exercice qu'on veut. On observe tout le pays ; on se détourne à droite, à gauche ; on examine tout ce qui nous flatte ; on s'arrête à tous les points de vue. […] Partout où je me plais j'y reste. À l'instant que je m'ennuie, je m'en vais. Je ne dépend ni des chevaux ni du postillon. »
Jean-Jacques Rousseau, Émile, p 423 de l'édition des Œuvres complètes de J. J. Rousseau, citoyen de Genève, tome deuxième,  à Paris, chez A. Belin imprimeur-libraire, 1817

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mercredi 5 mars 2014

Le principe de fascination

Il agit comme un aimant. Je l'évoque irrégulièrement, mais, lorsque son ombre se profile, elle s'installe. Je reconnais mon obsession.
Je ne lui vois pas d'équivalent cinématographique, je veux dire qu'il s'imposa comme un suzerain, et que tous les autres se reconnurent ses vassaux : pour beaucoup, des vassaux fantômes. Il ne chercha pas à dissimuler le malaise originel, qui façonna sa personne morale et physique. Moulé dans une chair musculeuse, la taille bien prise, les épaules larges, il incarna la tentation et sa vanité. Et même à cinquante ans, déjà gagné par la calvitie et la surcharge pondérale, il fut encore le partenaire idéal d'un huis clos à l'éros piégé.
Je reconnais la fascination, intacte, qu'il exerce sur moi. Je reconnais la fatalité de son apparence, je distingue la faille, qui le traverse de part en part. Il est le jouet des fantômes familiers, qui ont commencé à peupler son regard dès l'enfance.
Un sphinx complaisant se satisfait des réponses improvisées, que nous apportons aux questions qu'il nous pose. Mais nos parades de facilité ne nous dispenserons pas toujours d'être confrontés à l'énigme qui nous constitue.




















On sera avisé de consulter Le fantôme du métro aérien 1Le fantôme du métro aérien 2Retour sur le pontBrando sur le trottoirMarlon B, for Lady Tanya, and for all Tous les garçons' ladies

lundi 3 mars 2014

Discrétion assurée…

Une autre version de ce superbe et délicat poème d'Antoine Pol, par Georges Brassens. Derrière lui, on voit un personnage lunaire nommé Pierre Louki (Pierre Varenne), auteur, compositeur, interprète, doué de nombreux talents, d'une discrétion à toute épreuve, qui lui a permis de n'être connu que des meilleurs.

http://youtu.be/OV5bI0tixYQ
(L'intégration de cette vidéo est interdite. Rendez-vous à l'adresse ci-dessus)

Et, de Pierre Louki, ces deux bijoux, choux, genoux…






On consultera  celles qu'on a seulement croisées

mardi 25 février 2014

Et l'argent de mes cheveux…




Il ne fallait pas s'approcher de sa « bouche délicate, abondante, toujours ouverte, comme un fruit qui cède à sa propre succulence » (Pierre Drieu la Rochelle, Blèche).











À gauche, Louis Aragon au début des années trente ; à droite, Pierre Drieu la Rochelle à la même époque. Ils furent inséparables, puis ils se séparèrent : ils devinrent ennemis intimes.On entendra deux versions d'un poème d'Aragon, mis en musique par Jacques Douai.






vendredi 21 février 2014

Le jeune homme est mort





















Ci-dessus : Jean Babilée, dans le ballet Balance à Trois, de J.-M. Damase et Tom Kéogh, créé par sa compagnie, en 1955.

Jean Babilée vient de mourir (1923-2014). Né un 3 février, il est parti un 30 janvier : cet homme presque sévère en apparence était de l'hiver.
Il appartient, depuis mon enfance, à mon panthéon. Je l'ai admiré dès que je l'ai vu, je n'ai cessé de lui accorder l'importance artistique et morale qu'il mérite amplement. On a très peu parlé de ce danseur accompli, qui incarnait l'audace et la technique, et qui libérait sur scène une énergie toujours élégante. Quand on le voit dans Le Jeune homme et la mort, il me semble qu'apparaît évidemment ce qu'on nomme, parfois un peu facilement, la « modernité ». Dans son apparence, d'abord : c'est un garçon d'aujourd'hui, un français charmant, un parisien, sensible, tendre presque, avec ce qu'il faut de belle colère inassouvie.
On le rencontrait dans la rue, même à un âge avancé, et c'est ce jeune homme que l'on voyait d'abord. Mais je vous épargne mon bavardage, et je vous invite plutôt à le retrouver : 





À propos de « Le Jeune homme et la mort », on lira Jeune homme, qu'est-ce que tu crains ?
Sur Noureev et la danse : Pas de deuxPas de côtéLe don d'Avedon
Sur Lifar, les Ballets russes, Jean Cocteau : L'Histoire attendra L'enchanteur du XXe siècle (1)L'enchanteur du XXe siècle (2)Lifar aux enchères -3-

mercredi 19 février 2014

Pixel beauté



Il s'agit, je crois, de l'une des premières démonstrations des effets produits par le logiciel de dessin et de retouche Photoshop. Aujourd'hui, il paraît que nombre de célébrités exigent ce traitement avant de donner l'autorisation de publier. Je ne jette pas la pierre à ces malheureux : l'âge est sacrilège, il ravage nos traits. Cela me fait penser que j'aurais bien besoin d'un « pixel lifting » !

lundi 17 février 2014

Drôle de rime…


Cette chanson fut enregistrée en 1956, chez Pathé. Elle est étonnante par son compositeur-interprète. Joyeux,  coquin, libertaire dans l'âme et dans les faits, il ne versait pas volontiers dans le genre grave. Tout cela est dit avec finesse et sensibilité, comme il se doit. 
On n'oubliera pas les Arméniens, premier peuple menacé de disparaître au XXe siècle, directement victime d'un génocide.
On n'oublie pas. 
Et c'est ainsi que l'on se souvient de René-Louis Lafforgue (1928-1967).




















mercredi 12 février 2014

Je t'ai croisé(e)

— Hier, métro ligne 3, vers 14 H 02 - 14 h 06. Tu es monté(e) station Louise Michel, tu avais Libé à la main. Je t'ai remarqué(e) immédiatement. Toi, style fortement genré, cheveux courts, pas de maquillage, mains épaisses, épaules larges, pantalon de cuir en agneau halal (ou casher ?) , de marque Agnès Bééé. J'ai flashé sur ton regard très féminin, ta mâchoire très masculine, tes pieds très en dedans. Moi, style fortement burné de dos, indéfinissable de face : grand cou, petite tête, épaules égyptiennes époque des pyramides. Je t'ai regardé(e), tu m'as vu(e) : sourires, complicité immédiate, sentiment d'appartenance LGBT. Tu es descendu(e) pas moi : c'est dommage ! Timidité ?  Pourtant, je le sais, tu le sais, tu es mon genre, je suis ton genre, je serai le gendre de ta mère/père. Si tu te reconnais, je t'en prie, écris vite au journal, tant qu'il paraît !

Jeudi dernier, ligne 8, station Opéra, le métro était bourré, moi aussi, et toi de même. Tu avais Libé à la main. Toi : couperosée, cheveux gras, petite, plus large que haute, mais très féminine. Moi : visage rouge, trois chicots noirs dans la bouche, grand, maigre, voûté, avec des mains d'étrangleur, fatigué mais viril. Si tu te reconnais, dépêche-toi, parce que moi, je ne te reconnaitrai pas ! Je ne suis pas sûr d'avoir envie de toi à jeun, mais ivre, ça peut le faire ! Ne laisse pas passer cette chance. Avant, je faisais la manche devant le journal, mais plus maintenant : ils n'ont plus un rond ! Je t'attends, je t'espère, je te veux ! Téléphone au directeur de Libé, c'est un copain, on fait la manche ensemble.

— C'était hier, t'en souviens-tu ? Métro Sablon. Toi : grande, élancée, blonde aux yeux verts, sac Gucci, talons hauts, bas noirs. Tu lisais Libé. Moi : pas mal, surtout de dos, front bas très vaste (chauve), petits yeux gris rapprochés, grand, costaud, un peu inquiétant mais très poli. Je tenais un sac en plastique d'où dépassait un fémur. J'ai tout de suite senti que tu aimais le danger. Si tu te reconnais, viens me retrouver sous les arcades du pont Bir Hackheim, après minuit. Je t'attendrai toute la semaine. Tu vas aimer…

Pour accompagner ces petites rencontres libébètes, ceci, dont la musique est de Dante Pilate Marchetti, les paroles de Maurice de Féraudy (aux alentours de 1900). Il s'agit d'une très belle valse lente, que ma mère me chantait :
Je t'ai rencontré simplement,
Et tu n'as rien fait pour chercher à me plaire…
La voici, dans deux interprétations, que je vous laisse découvrir.



mercredi 5 février 2014

Le beau Serge s'accorde à l'accordéon

L'accordéon encore, et l'accordéoniste, chantés tous deux par Serge Gainsbourg, alors chanteur « rive gauche », présenté par Guy Lux, animateur de télévision, capable du pire et du meilleur. Il aimait la chanson, et bien des débutants lui doivent l'amorce décisive de leur carrière.



Pour l'accordéon, il convient d'aller à Un rat, un chinois, une filleRequiescat in pace !, et, pour le beau Serge, on rendra visite aux bijoux de Lulu bœuf sous un toit, à Madame Lulu, à Taille mannequin, à L'art de s'étendre, à Serge en automne, à Dans la peau de Serge, à Vous dansez, mademoiselle ?, et à Denise

jeudi 30 janvier 2014

Ma correspondance avec la Beauregard, la suite















Illustration : Ron Mueck, Woman in bed




Les choses vont si vite à Paris qu’une nouvelle du matin est ancienne au souper ! Dans le même temps qu’un journal, comme je vous en fis le récit récemment, révélait avec force dessins à l’appui les infidélités « pompières » de François II, il se produisait un embrasement gazetier. Notre roi est-il mécontent de la tournure qu’ont pris les événements ? Au début de son règne, il fut apostrophé dans la rue par une commère, à propos de la Koajélère : « N’épousez pas cette femme, on ne l’aime pas ! ». Il ne répondit pas. Mais n’a-t-il pas suivi le conseil ? Je tiens à vous persuader par ma démonstration que toute l’affaire procède d’une entreprise à laquelle Sa Majesté n’est peut-être pas étrangère. Entendez mon avis, ma coquette, et vous me direz si j’ai tort.
En deux semaines, nos kiosques se couvrirent de couvertures de magazines, montrant la physionomie de Julie Légayée, la théâtreuse dont il s’est toqué, ses traits délicats, sa figure avenante. Il n’y eut pas une feuille d’arrondissement qui n’imprimât un portrait de la nouvelle favorite, qu’on n’a jamais tant vue.
Vous n’ignorez pas que la marquise de Koajélère, avant sa rencontre avec François II, donnait des articles à Paris-Marche, qu’elle continuait d’alimenter en propos sur la littérature parfaitement insipides. Eh bien, ce journal a consacré de nombreuses pages à sa rivale, sur un mode très flatteur ! Appartenant au même personnage, héritier d’un magnat qui portait le nom d’un héros de Paul Féval, Ailes, l’hebdomadaire distribué dans les salons des médecins et des perruquiers ne se trouva pas en reste : la blonde que voilà y connut une vraie consécration. Bref, ma cousine, je prétends que cette affaire d’alcôve n’a pas été rendue publique par la seule indiscrétion d’une gazette à scandale. Elle sert parfaitement les intérêts sentimentaux de notre récent couronné, qui souhaitait mettre définitivement et officiellement fin à sa relation avec la Koajélère. Conduisant un attelage à deux têtes, a-t-il craint l’emballement et l’embardée ?
Décidément, ce roi si falot d’apparence, et si prompt à dire des banalités qu’il mériterait qu’on l’appelât le souverain poncif, est un Barbe-Bleue sans le crime ! on ne comptera bientôt plus derrière lui les femmes abandonnées.
Or, la Koajélère, congédiée sans ménagement, telle une courtisane qu’on choisit au crépuscule, et qu’on fait raccompagner par un valet aux premières lueurs de l’aube, subit une terrible humiliation.
Mon crédit, mon pouvoir ; tout ce que je rêvais,
Tout ce que je faisais et tout ce que j’avais,
Charge, emplois, honneurs, tout en un instant s’écroule
Au milieu des éclats de rire de la foule !
1
Elle a souffert, elle a pleuré, elle ne portera pas le deuil de l’amour. Des personnes de son entourage assurent qu’après qu’elle aura soigné ses plaies, elle ne voudra plus que venger l’affront public fait à sa personne :
Ce misérable ! ce misérable ! il trompe une femme, et renie l’autre ! infâme (*)
Pourrons-nous bientôt nous réjouir d’une indiscrétion suavement murmurée ? Rappelez-vous le mot de Mme de Flahaut sur Talleyrand relativement aux choses de l’amour : « Il agissait suaviter in modo, mais nullement fortiter in re » que vous traduiriez en latiniste accomplie par : « Au lit, si sa manière était douce, il manquait de vivacité dans l’exécution »…
Vous savez que, pour s’asseoir sur le trône, notre roi, aidé de ces nouveaux bourgeois arrogants au teint de fraise éclatée, et de quelques viragos très aigres, a feint d’épouser la cause des Partageux. Il allait sur les places publiques, déclarant à qui voulait l’entendre qu’il n’aimait pas les riches, et que son ennemi se nommait Finance. À présent qu’il a un palais, il ne reçoit que les capitaines d’industrie, et sacrifie aux délices de Capoue, fatals aux carthaginois. Il arrache les masques, qui nous celaient son vraie visage.
Je vous quitte, ma désirable, après vous avoir livré une ultime effronterie. La rue parisienne, devant son éternel sourire qui rappelle une sculpture fameuse de la cathédrale de Reims, et sa promptitude à ôter son pantalon en présence d’une dame, l’a surnommé « La braie des anges ».
Je vous baise les mains, et tout ce qu’il vous plaira de me présenter…
Votre dévoué cousin.



  1. Victor Hugo, Ruy Blas, acte I, scène première. 



À cette lettre, ma cousine Émilie, depuis sa province reculée, répond par une missive, qui me parvient par la diligence de la nuit. 


In cauda venenum !
   In cauda venenum, mon cher cousin, et  dans tous les sens du terme ! « La braie des anges » ! Que je vous reconnais bien là  dans ce trait cinglant et sanglant qui donne à voir le comique quasi troupier de notre souverain angéliste dans ses œuvres viriles !
Voilà de quoi me réjouir de bon matin et me faire réfléchir, comme certaines de vos remarques m’y incitent, au sort réservé dans cette affaire à la condition féminine ! La cause des partageux égalitaristes est bien mise à mal, dites-moi, par ceux-là mêmes qui en ont fait un cheval de bataille ! Avec cet étalon de cirque au pouvoir, qui donne plus dans la goujattitude que dans l’élégance et la noblesse auxquelles son rang devrait le contraindre,  le rouge ne devrait-il pas leur monter au front ? Que fait et que pense donc la propagandiste de la théorie du genre, la très onctueuse et soporifique porte-parole Nagitjamaistracassée, de cet affront fait aux femmes en la personne de la de Koajélère, elle si prompte à  administrer  ses leçons de morale à la manière d’une déléguée-défenseuse (orthographe de gôche !) des élèves en conseil de classe? La voilà soudain devenue bien inerte , muette et sourde à cette répudiation choquante ! Avouez que c’est étonnant !
 J’ai lu dans La Gazette ardéchoise d’hier (car je me suis retirée quelques jours au Château de Chambonas et de ce fait, n’ai pu vous lire que ce matin ) que notre foufounologue royal, non content d’avoir proclamé sa libération en un communiqué laconique et brutal, où se révèlent sans fard sa goujaterie et sa froideur, ose badiner et se railler (et sans doute mirlitonne-t-il grassement)auprès de ses ministres de la femme qu’il a si cruellement blessée !
 Mon bien-aimé cousin, vous connaissez ma pruderie et ma défiance à l’égard des hommes,  eh bien, avouez que ce comportement de butor et de pignouf de basse-cour ne peut que me donner raison de me garder de tout commerce avec eux ! Surtout lorsqu’ ils se disent modernes et progressistes ! Mais en vérité, ne devrait-on pas davantage dire que , c’est parce qu’ils croient moderne de renverser cul par-dessus tête toutes nos valeurs, que ces si bien nommés par vous « partageux », s’autorisent de tels écarts, sans le moindre état d’âme ? Ces benêts doctrinaires, ces stupides commissaires de la pensée conforme s’imaginent que la modernité est une valeur en soi, une qualité à part entière, car tout ce qui est nouveau doit forcément être bon pour l’humanité ! Je rends grâce à Dieu de m’épargner, dans ma campagne, le commerce de ces gens-là qui grouillent chez vous à Paris et que vous êtes contraint de fréquenter : cette caste médiatico-politique bouffie de boboïtude, truffée de bienpensance et tartuffiée de préjugés, qui veut (et n’a pas peur du ridicule !) « produire des possibles » et « faire France » !
 A vrai dire, comme vous , je subodore que la maîtresse répudiée prépare une vengeance à la mesure de l’outrage et je ne la condamnerai en rien pour cela, au contraire, je l’y exhorterais si je le pouvais, car notre bien aimé Beaumarchais l’a dit : « lorsque le déshonneur est public, il faut que la vengeance le soit aussi » ! Je jubile à la pensée qu’elle pourrait, elle aussi, offrir à la presse un communiqué carnassier et à la première personne, qui révèlerait en quelques mots au pays tout entier et à tout jamais, le visage sinistre et glauque de notre triste sire à la morale de pacotille !
 Je vois aussi que depuis la révélation des cinq à sept de François, le bandeur magnifique  ,  la starlette Légayée,  se fait bien discrète ! Peut-être préférait-elle le temps où elle pouvait jouer les back street, rue du cirque, lorsqu’elle attendait impatiemment l’entrée en scène du clown casqué, de cet improbable héros libidineux et masqué ! «  Le monde entier est un théâtre, et tous, hommes et femmes n’y sont que des acteurs » ! Shakespeare, mon cher cousin !
 Vous aussi, mon cousin préféré, vous êtes un coquin et aimez plus que de raison à courir le guilledou, souvent j’ai eu à vous le reprocher, mais je sais que jamais vous ne pourriez afficher autant de mépris pour les femmes qui vous accordent leurs faveurs. Vous avez trop de délicatesse et de noblesse d’âme pour vous vautrer dans cette fange, vous aimez trop les femmes pour consentir à les avilir  un seul instant !
 Et comme d’habitude, cher cousin, c’est avec gourmandise que j’attends de vos nouvelles !
 Émilie de Beauregard