lundi 1 janvier 2024

Mes (A)vœux 2024 (1) Bon début pour une Apocalypse





































Le Déjeûner d'huîtres (1735); son auteur, Jean-François de Troye(1679-1752), représentait remarquablement les faits d'Histoire et les scènes dites « de genre », avec un beau souci du détail vrai, insolite, banal qui donne un air d'observation amusée, presque savante à l'ensemble représenté. Dans ce « déjeuner », on voit des gentilshommes attablés, heureux de se retrouver dans une ambiance de réjouissance élégante. La table est superbement dressée, le lieu est splendide, d'un baroque mesuré, sans être, semble-t-il, par destination une salle à manger (un pavillonn de chasse ?). Voilà pour l'impresson générale. Mais voici quelques détails, qui ne manquent pas d'intérêt.

1) Le saut du bouchon :
Suivez le regard de trois des personnages : ils lèvent les yeux vers… le bouchon qui, venant de jaillir d'une bouteille de champagne (ventrue), s'élève dans les airs. Trouvez le bouchon, il conduit à la bouteille !






































2) Huîtres pour quelques-uns et champagne pour les mêmes :
Au pied d'un convive, un valet ouvre les huîtres destinées au jeune homme qui l'observe. Le gracieux petit meuble de style Louis XV nommé rafraîchissoir contient des assiettes en argent et deux bouteilles de champagne, qui espèrent qu'une main secourable les sortira de leur bain de glaçons, et leur feront connaître, enfin, la volupté d'être bues. Le transport des huîtres par ceux qu'on nommait chasse-marée (Littré recommande cette orthographe au pluriel) jusqu'à Paris, Lyon, Grenoble, enfin vers les villes les plus éloignées de leurs élevages, devait absolument s'accomplir dans les plus brefs délais. Nombre d'ânes et de chevaux mouraient d'épuisement. On notera l'absence de femmes. Serait-ce parce qu'il s'agirait d'une scène de retour de chasse ? Les femmes chassaient rarement, à l'exception de l'admirable princesse Palatine qui suivait son idole, Louis XIV, dans toutes les chasses où il acceptait sa présence.

























Note : Pour contempler ce Déjeuner d'huîtres, on ira au château de Chantilly, dans le beau musée de Condé. Il faut absolument faire ce voyage si l'on veut, ensuite, attendre paisiblement la fin du monde. La beauté est sans doute une illusion, mais enfin il est des lieux, en France (et, par exemple, en Italie) qui nous autorisent à croire que cette illusion est éblouissante.
J'adresse à tous ceux qui passent encore ici et s'y attardent mes vœux d'espérance mesurée, de bonheur partagé autour d'un repas fin ou d'un pot-au-feu bourgeois, dans une modeste cuisine ou dans un palais de marbre.

dimanche 24 décembre 2023

Ça sent le sapin ! Dernier Noël avant la Troisième Guerre Mondiale ?











À ceux qui passent encore ici, je souhaite un joyeux Noël.


Montage photographique : PM

vendredi 1 décembre 2023

Projection


























- Vous m'avez fait peur, qui êtes-vous ?
- Je ne suis personne, mais j'étais à quelqu'un.
- Mais encore…
- J'étais sa compagne silencieuse, d'une fidélité à toute épreuve.
- Une sorte d'esclave, voulez-vous dire ?
- Je lui étais soumise,certes.
- Pourquoi vous mettez-vous au féminin, vous semblez être un homme, votre voix est grave.
- J'appartenais à un homme, en effet. Je l'ai adopté dès qu'il est sorti des entrailles de sa mère, et je ne l'ai plus quitté, jusqu'à ce jour funeste où il m'a congédiée.
- Un valet ? Un homme de main ?
- Ni l'un ni l'autre.
- Écoutez, je ne comprends rien à votre affaire.
- Laissez-moi vous expliquer. J'étais une sorte de doublure, le tracé exact d'un homme, une forme animée, pleine et sombre.
- ?
- J'étais toujours présente, mais je n'apparaissais que sous certaines conditions.
- Quand il vous appelait ?
- Je ne dépendais pas de sa seule volonté, mais aussi de la lumière et de sa position par rapport à la source de cette lumière.
- Quoi ! Vous seriez…
- Je suis…
- Une ombre !
- Son ombre.
- Mais, je ne vois personne alentour ; une ombre n'existe que par la personne qu'elle projette.
- C'est aussi ce que je pensais.
- Allons-donc, vous êtes obligatoirement suscitée par qulqu'un. Mais… C'est vrai, il n'y a personne. Oh, il y a un truc derrière tout cela : ce que je vois est produit par un appareil dissimulé quelque part.
- Cherchez, vous ne trouverez rien. Je suis son ombre, vous dis-je. (à suivre)




Note : Notre ami René Claude, épatant genthilomme suisse qui possède un goût très sûr et gouverne le blog https://pour15minutesdamour.blogspot.com/ indispensable à la survie en milieu durablement hostile, m'a révélé l'existence de cette jeune femme, qui interprète ci-dessus le Concerto pour violon et orchestre de ludvig van …. Ce fut un choc adorable, une découverte dont je le remercie vivement (Voyez nos échanges dans les commentaires de l'article précédent).

mercredi 12 juillet 2023

Subjonctivité




















-Ta beauté est atrocement mélancolique
-Ne me prends pas en photo !
-Comment veux-tu que je te prenne ?
-Je ne veux pas être prise !
-Tu ne dis pas toujours cela.
-Imbécile !
-Ton beau visage voilée de tristesse…
-Niaiserie ! Et cesse de tourner autour de moi avec ton téléphone portable !
-Je lis mes messages.
-Menteur ! Tu cherches à me photographier à mon insu.
-À te prendre par derrière en quelque sorte.
-Goujat !
-Te souviens-tu ?
-J'ai perdu la mémoire.
-J'avais mis mes pas dans les tiens.
-J'aurais dû marcher plus vite.
-Au contraire, tu as ralenti.
-Je ne comprenais pas ce que tu cherchais.
-Nous avions parlé toute la soirée.
-Tu ne m'avais pas semblé stupide.
-Je t'avais trouvée intelligente.
-Mais arrogant.
-Et mélancolique.
-Tu m'avais irritée.
-Tu m'avais séduit
-Je ne voulais rien.
-Dis plutôt que tu ne savais pas ce que tu voulais.
-Ce n'est pas vrai.
-Tu ne savais pas qui tu voulais.
-Ce n'est pas faux.
-Je te cherchais.
-Je me fuyais.
-Je t'ai trouvée.
-Je t'ai giflé.
-Tu m'a tendu tes lèvres.
-Pour me faire pardonner.
-Et je t'ai embrassée.
-Et je t'ai pardonné.
-Tu as caressé ma joue…
-Et ton cou.
-Avec suspicion !
-Je craignais que tu muasses.
-Tu me croyais serpent ?
-J'en étais tentée.
-Je n'espérais pas que tu te lassasses.
-C'est maintenant que je m'en lasse.
-Mais tu veux toujours que je t'enlace !
-Prends-moi donc dans tes bras.
-Bref, je t'ai suivie.
-Si j'avais su !
-Tu aurais pressé mon pas.
-Peut-être…
-Alors, comme au commencement…
-En amour, le début est toujours bien.
-Comme au commencement, disais-je…
-Donnons-nous une fin.
-J'ai bien trop d'appétit.
-J'ai grand faim moi aussi.
-Alors,comme au commencement…
-Ne dis rien, hâte-toi!
-Tu me vois haletant.
-Hâte-toi lentement.

-Et ton portrait ?
-Rends-moi floue.
-Tu me rends fou.


Un peu de beauté mélancolique et européenne en attendant les barbares :







samedi 8 avril 2023

Sex bond

-Il fait beau.
-Non, il fait froid.
-Il fait froid, mais il fait beau.
-Toujours à me contrarier.
-Le contraire de beau n'est pas froid.
-Tu es le contraire de beau.
-Tu me laisses froid.
-C'est du beau !
-Tu n'as jamais été une sex bomb.
-Tu fut toujours une sex tomb
-Tu aimais beaucoup descendre au tombeau.
-J'assistais à tes funérailles.
-Tu t'acquitais admirablement de la pompe funèbre…
-Tu deviens grossier.
-Tu n'es pas Hélène Fischer !
-Tu n'as rien de Tom Jones !

https://www.youtube.com/watch?v=-MZrgXR75Tk

Note : le mot bond signifie lien(s) en anglais.

vendredi 17 février 2023

Considérations

-Tout bien considéré, je vaux la peine d'être reconsidéré.
-Tu vaux beaucoup moins que ce que tu veux.
-Je te veux.
-Tu ne me vaux pas.
-Je veux aller par tes monts et par tes vaux
-Mon relief n'est plus pour toi.
-Pour moi, tu es la seule.
-À mes yeux, tu es vain.
-Mais non, je suis seul !
-C'est si peu !
-Mais pas moins.
-Presque rien.
-Qu'y puis-je ?
-Tais-toi !
-Qui suis-je ?
-Même plus toi !
-Entends mon chagrin.
-Je ne m'en donnerai pa la peine.
-Je ne suis pas celui que tu crois
-Ma colère s'accroît.
-Quant à moi, je sens croître…
-Et moi, je serai crue : « Ta gueule ! ».
-Ah, mon désir s'accroît : j'aime ta crudité.
-Inutile, c'est cuit !
-Je réclame un peu de considération.
-Tu t'es trop déconsidéré.
-Tu me sidères !
-Si j'osais…
-Je t'en prie.
-Espèce de con sidéré !

Reconsider me, chanson de Margaret Lewis et Mira Smith, ici par trois interpètes remarquables, chacun à leur façon. Tantôt sur le mode blues/country, par Narvel Felts, superbe voix évoquant celle du jeune Elvis Presley, qui sonne aussi parfaitement « campagne » que rock; puis par Johnny Adams, qui lui donne une tonalité blues, avec cette chaleur « noire » irrésistible; enfin, par Dayna Kurtz, la plus étonnante, la plus émouvante (émotion accentuée par les images), très imprégnée de gospel, puissante, tendue : une sorte d'imploration.


Dayna Kurtz






Johnny Adams



Narvel Felts



dimanche 5 février 2023

2023, mes a(vœux) 6, suite et fin : La planète des pas et des compas


Longtemps, très longtemps après les faits dramatiques rapportés précédemment, une lueur surgit du fond des espaces infinis. Elle semblait produite par un énergie puissante, certes, mais son rayonnement, à mesure qu'on s'en approchait, n'engendrait nullement l'effroi que suscitait la moindre planète. Et, quand elle se révélait enfin, il se dégageait de sa rondeur comme de sa surface apaisée, une impression d'accueil aimable et la conviction qu'y prospérait une vie heureuse. Plus tard, on apprit qu'elle se nommait NAKUNŒILMAISKELOŒIL,et qu'elle se situait dans la galaxie de la Célestat. Son système était simple et réglait des combinaisons avantageuses. Elle tournait lentement, dans le sens exactement inverse à celui des aiguilles d'une montre raisonnable saisie par l'ivresse des profondeurs et ennivrée de romanée-conti (millésime 1949). Quatre femmes à la silhouette admirable animaient sa rotonde sans jamais se lasser. Quand l'une ou l'autre, ou les quatre ensemble souhaitaient prendre du repos ou du plaisir, elles interrompaient leur service. L'astre n'en subissait nulle modification, au contraire, il se faisait un devoir d'accomplir sa rotation adorablement aberrante, qui diffusait des ondes exquises.
Ainsi s'accomplissait la formule qu'on peut entendre dans le film de François Truffaut, L'homme qui aimait les femmes : « Les jambes des femmes sont des compas, qui arpentent le globe terrestre en tout sens, lui donnant son équilibre et son harmonie. ». Ainsi prend fin ce « cycle des planètes ».

Montage : PM