dimanche 13 mars 2016

Sacha n'opposa aucune résistance…














Sacha Guitry à la mairie du VIIe arrondissement de Paris, après son arrestation, le 23 août 1944 : il n'opposa aucune « résistance ».


À la Libération, Sacha Guitry se retrouva bien seul. Parmi ceux qu'il avait aidés, secourus, assistés, sauvés parfois, ils ne furent pas si nombreux à se manifester en sa faveur, à l'exception notable de l'excellent Tristan Bernard, qui avait de la mémoire, lui !
Le 23 août 1944, vers 10 h du matin, Guitry est arrêté à son domicile, un hôtel particulier situé 18, avenue Élysée Reclus, hérité de son père, Lucien. Il avait transformé ce lieu en un superbe musée privé, un vaste cabinet où il exposait ses « curiosités », des lettres autographes, des tableaux, des meubles, des objets singuliers. Il avait le secret espoir que cette maison devînt, après sa mort, un vrai musée ouvert à tous. Il ne fut pas exaucé.
« J’ai eu quatre épouses, dit-il à Lana Marconi, sa cinquième, une jeune femme d'origine roumaine, vous serez ma seule veuve. ». Veuve de Sacha, elle le fut en effet, mais, pour des raisons sans doute multiples, elle ne conserva pas le bâtiment, qui fut démoli, et remplacé par un immeuble d'une banale laideur. Tout ce qu'il contenait fut dispersé. Sacha Guitry menait un grand train de vie, et avait un constant besoin d'argent. J'ai connu sa dernière infirmière, qui soignait également la maréchale Pétain (coïncidence !). Elle m'a rapporté qu'elle ne parvenait que rarement à se faire payer ses émoluments, mais elle lui prodiguait volontiers les soins qu'exigeait son état de santé, car elle l'admirait. Cette femme était d'ailleurs très intéressante. Déjà âgée, elle s'asseyait sur un banc, dans une rue passante du VIIe, observant le spectacle, sur ses genoux son minuscule chien teckel, aveugle de naissance, qu'elle avait sauvé d'une mort certaine en l'adoptant. Sa discussion était remarquable.

Ce 23 août, donc, il est surpris au lit par des résistants, auxquels il n'oppose, comme à l'accoutumée, aucune… résistance. C'est donc contraint et forcé qu'il consent à… collaborer. Il se retrouve dans la rue, encadré, bousculé par de farouches gaillards, des héros peut-être, ou des rebelles de la dernière heure, accompagné manu militari jusqu'à la mairie du VIIe arrondissement : « Mon pyjama se compose d'un pantalon jaune citron et d'une chemise à larges fleurs multicolores. Je suis coiffé d'un panama exorbitant, et quant à mes pieds, qui sont nus, ils sont chaussés de mules de crocodile vert jade. ».
Il s'était marié tant de fois, qu'il pouvait croire (ou craindre) qu'une « personne du sexe », séduite un soir, le contraignît à l'épouser. Mais l'affaire est encore plus grave. On l'accuse de tous les maux : antisémitisme, intelligence avec l'ennemi, membre de la secte des adorateurs du soleil caché, pétainisme, réfutateur désinvolte de la loi de Newton, ennemi déclaré de la marée montante, etc.
Il sera libéré, bien sûr, et blanchi de toutes ces vaines accusations. Que pouvait-on vraiment lui reprocher ? D'avoir été naïf, aveugle, étranger à son temps, définitivement exilé dans un pays intérieur.Il n'était pas seulement d'une autre époque, il était à lui seul une autre époque.

 http://aii.ensad.fr/projet.php?id=267

http://www.ina.fr/video/3469057001034

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Pour Sacha : L'Histoire attendra   Quant à soi(e)  C'est difficile ! (suite)

 

4 commentaires:

Nuagesneuf a dit…

Heureuse évocation! A 18 ans, j'avais lu tout son théâtre! c'est dire.
Alors que tous" l'abandonnèrnet",Picasso, Cocteau etc.. ,Guitry fut le seul à aider Max Jacob emprisonné à Drancy en 44. Antisémite notre Guitry? J'en veux bien des millions comme lui!
La période qui a suivi la libération est honteuse et horrible et ce qu'il y a de plus vil dans les français trouva toutes les formes d'expression : à vomir ( et pas mal de points communs avec les militants actuels du FN)

Patrick Mandon a dit…

Nuage est dans une forme olympique, et je m'en réjouis ! Oui, Nuage, avec des antisémites tels que lui les Juifs n'eurent rien à craindre. Il s'est en effet démené comme un beau diable (avec Cocteau, également) pour tirer le grand Max (Jacob) des griffes nazies. Quant à la vilenie française, à la Libération, il est vrai qu'elle a trouvé le terrain de quelques-uns de ses exploits…

Anonyme a dit…

exacte nuage, une bonne rage, rien de tel pour condamné les pires racailles de la "libération", des tigres de vestiaire et autre salope de la dernière heure, un grand salut nuage, ainsi qu'a Patrick

jdll

Patrick Mandon a dit…

« des tigres de vestiaire »
Bien vu, JDLL ! Et un retour de salut aussi grand !