vendredi 10 juin 2011

Belle gueule d'ombre

Était-ce en 1980 ? Un an avant, ou après ? Une sorte d'ange déchu surgissait du fond d'un paysage post-atomique, un grand type mince. Il chantait des textes habiles, contenant un peu d'obscurité, et sa voix, comme une lime sur une feuille de fer rouillée, annonçait une apocalypse. Il s'appelait Jean-Patrick Capdevielle. Il connut un succès foudroyant.
Il fut l'objet d'attaques violentes de la part des critiques, qui virent en lui un Bob Dylan « mercerisé ». Puis il disparut. Je me souviens de sa belle gueule et de ses chansons lancinantes.

« Quand t'auras trainé trop longtemps dans les rue jaunes,
En d'ssous du soleil qui sanglotte,
Et quand l'ironie viendra pour te d'mander l'aumône
[…] »
(Les rues jaunes)


http://youtu.be/TEAe_WzYrl0

Et ceci, encore, qui pourrait vous étonner :

http://www.deezer.com/en/music/playlist/43881013 (choisissez « Salomé »)

Et encore, ce beau texte d'étrangeté :

http://youtu.be/sYbN0rpbueY

Pour celles et ceux qui n'étaient pas nés, pour celles et ceux qui se souviennent vaguement, pour en finir, aussi, avec la séquence Capdevielle, cette chanson, qui fut un immense succès.

http://youtu.be/Mkzw7Wop9pU

Après cela, Capdevielle devint l'objet d'un véritable lynchage, dans la presse spécialisée : une opération punitive, conduite par MM Manœuvre et de Caunes. Le premier vit confortablement de sa rente de notaire de la pop, le second tente désespérément de nous convaincre qu'il est un metteur en scène…
Dans cette vidéo, où il chante en direct, me semble-t-il, Capdevielle se démarque nettement de toute la production de son temps.
Belle gueule d'ombre, n'est-ce pas ?

6 commentaires:

Vincent Deyveaux a dit…

Soutien inconditionnel.

Joël H. a dit…

Arrivé en fait en même temps que Bashung - sans doute n'y avait-il pas alors de la place pour tout le monde (sans doute Bashung occupait toute la place).

Anonyme a dit…

Soutien plus qu'inconditionnel. J'ai découvert Capdevielle alors qu'il n'était plus au sommet, en 88je crois. Tant mieux, j'ai eu l'impression de découvrir et garder une pépite pour moi toute seule.
Patrick, vous ne pouviez pas me faire plus plaisir. Pour moi, il y a Capdevielle et les autres, tous les autres. Si je n'en garde qu'un, c'est lui. Vivre l'éternité entre Saint Just et Capdevielle, le reste peut crouler. Je connais toutes ses chansons par coeur. En plus, il était beau comme un Dieu. Bashung(que j'aimais beaucoup) peut aller se rhabiller posthumement. Je n'y avais jamais pensé mais Joël a raison bien sûr, il n'y avait pas de place pour deux. Comme souvent.
Décidément, vous êtes épatant, étonnant, unique et surprenant.
Ecoutez ces mots poignants, qui me ramènent 20 ans en arrière, quand j'avais l'impression qu'il ne les avait écrites que pour moi. Je voudrais le voir en concert avant de mourir.
Je pourrais vous les mettre toutes. Juste pour le plaisir.
Elle est comme personne
salomé

"J'ose pas me regarder dans l'eau que ses mains retiennent
Elle dit "De quoi t'as peur ?" et mon orgueil explose
Les portiers de ma raison se sauvent
Le jeu de ses doigts m'emprisonne
Elle est comme personne"

Patrick Mandon a dit…

À la suite de cette remémoration, j'ai repris le dossier Capdevielle. C'est effarant ce que les Antoine de Caunes et autres Philippe Manoeuvre ont pu écrire sur lui ! Il était devenu la cible, l'homme qu'il fallait abattre ! Quand on voit ce que M. de Caunes laisse derrière lui ! Un Napoléon plus morne que toute la plaine de Waterloo, un film sur Coluche, qui n'a même pas retenu l'attention des habitués des restos du cœur, et la soirée annuelle des César, où il fait l'animateur pour noce et banquet républicain !

Anonyme a dit…

Antoine qui ? Philippe quoi ? Des courtisans. Qui se souviendra de Gilles Gros-Paquet et Raoul Bitembois (sic) dans deux secondes ?
Que voulez-vous qu'ils comprennent à l'histoire, quand :

"Le bout des rues, c'est ta seule tendresse
Tu perds ta vie par délicatesse
Sur les boulevards, les secours de néon
Mâchonnent l'espoir, tu connais la chanson
Tes lunettes noires, tes pilules de brouillard
Ça va rien changer à l'histoire
Mais parfois t'espère être encore sur la Terre
D'ici la fin du millénaire"

Anna Valenn a dit…

de l'avis de Nadia, Patrick, vous m'étonnez autant que vous m'enchantez

mais pas touche à Bashung qd même ! une voix, renversante, ah nul ne peut dépasser la subjectivité (j'aurais adoré écrire pour lui...)

anna