lundi 17 juin 2013
Un moment d'égarement
Il y a quelque temps de cela, j'avais imaginé les aventures, parfois licencieuses, de ma cousine Émilie (on trouvera l'ensemble de ces textes ainsi que les réponses et interventions de ma cousine et des lectrices de ce blogue sous la rubrique La marquise perd le nord et le sud) . Voici, sous la forme d'une lettre, le récit que m'adressa mon ami Edouard de G., à propos de cette adorable parente, dont il fit la connaissance chez moi, au cours d'un souper fin.
(Émilie vient de sonner à la porte de l'appartement qu'occupe Edouard)
« Elle entra, je lui dis :
– Vous avez bien fait de venir.
– Non, je ne le crois pas. D’ailleurs, je ne reste pas.
– Dans ces conditions, asseyez-vous !
– Merci !
Elle retira ses gants. Elle prit place sur un fauteuil, s’y tenant bien droite et sans croiser les jambes.
Je lui offris de prendre une collation. Elle refusa, précisant :
– J’ai vraiment eu tort de venir !
– Pourquoi donc ?
– Parce que je sens…
– Que sentez-vous ?
– … que je vais rester !
À partir de ce moment, tout alla très vite. Elle n’osait pas me regarder franchement, elle «circulait» entre les objets, les meuble et les tableaux. De mon côté, je ne la quittais pas des yeux.
– C’est donc ici que vous entraînez vos proies ?
– Mes proies ?
– Vous comprenez fort bien ce que je veux dire.
– Peut-être désignez-vous par ce mot les jolies femmes qui consentent à me rendre visite ?
– Précisément !
– Elles viennent de leur plein gré.
– Oui, enfin c’est ici que… vous les consommez ?
– Non.
– Comment non ?
– Eh bien, cela ne se passe pas dans cette pièce, mais dans cette autre.
– Que vous êtes bête ! je sens que que je vais m’en aller.
– J’aimerais mieux que vous sentiez que vous allez partir.
Elle pâlit, elle rosit, elle rougit. Puis elle rit :
– Goujat ! D’ailleurs, prouvez-moi que vous êtes capable de me faire partir, avant que ne me prenne l’envie de m’en aller.
– Vraiment ?
– Puisque je vous le dis !
Il y eut un silence.
– Mais, si je veux partir, dois-je entrer là (elle montrait la chambre) ?
– En effet. ! Et moi ici (je désignais une partie de son anatomie) !
– Goujat !
– Vous l’avez déjà dit ! Allons-y de conserve. Je vous précède.
– Non, vous me suivez.
Et elle entra dans la chambre…
Par la suite, nous eûmes de brefs échanges. Je me souviens en particulier de celui-ci :
– Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaah, je sens que je pars !
– Oooooooooooooooooh je sens que je viens !
Galant homme jusqu’au déduit, je m’inquiétai :
– Puis-je rester ?
– Ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !
– Ahhhhhhhhhhhh, je pars !
– Oooooooooooooh, je reste !
« Voilà, mon cher Patrick, le récit que je voulais te faire de la visite que me rendit « contre son gré » ton adorable cousine.
Je suis ton ami pour le reste de ma vie, et j’espère vivement que tu me présenteras quelques autres de tes délicieuses cousines .
Edouard.
Note : j'ai pris, à l'insu de ta cousine, quelques photographies de nos ébats. Elle a un teint de porcelaine, et son corps a la souplesse du caoutchouc. Elle gémit adorablement, elle geint superbement. Entre mes mains, elle fut comme l'eau vive, et je m'épuisai à la poursuivre. Mais quel voyage ! »
Illustration : ma cousine, encore jeune, se distrait de son ennui provincial avec un jeu de bouche bien innocent… (dessin de Charles Chaplin, 1825-1891)
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
7 commentaires:
Votre texte, cher Edouard, est un bien doux enchantement... Et n'en déplaise à Rimbaud on y découvre que deux voyelles répétitives et sonores suffisent à combler ces deux amants-là.
Je suis venue par hasard et... Oh!!! Je sens que je vais rester!
Célestine, je vous en prie, demeurez, prenez vos aises. Votre réponse trahit un esprit qui n'est pas pour nous déplaire. Mon cousin Edouard, si vous le souhaitez, vous tiendra une conversation, que chacun s'accorde à trouver brillante. Elle est si brillante même, que jusque dans les onomatopées et les soupirs, on aime à la partager…Cela dit, il ne se montre jamais importun, ni, bien sûr, entreprenant à l'excès. Mais au jeu des Oh ! et des Ah !, il est d'une redoutable efficacité.
Bref, Tous les garçons vous salue, Ernestine, et vous retrouvera avec un plaisir non dissimulé (mais moins expressif cependant que celui qu'Edouard partagea avec ma délicieux cousine, laquelle possède une pupille d'un éclat semblable au vôtre, mais dans un œil noir).
Cher Nuageneuf, vos deux lignes sont dignes de Sacha (Guitry).
C'est toujours un immense plaisir de retrouver votre ami Edouard et votre très chère cousine.
Je viens souvent mais je n'ai pas toujours le temps de m'arrêter.
PS : auriez-vous des nouvelles de Nadia et Corinne
Bien à vous
Très heureux de retrouver Euréka ! Corinne, Nadia et ma cousine (surnommée La Stromboli, pour son tempérament volcanique) ne se montrent plus. Mais il est possible qu'elles viennent ici sans faire de bruit et sans laisser de trace. Quoi qu'il en soit, tout comme vous, je les salue et vous enlace toutes.
Mais non,la Stromboli est là, mon cher cousin ! Je me suis beaucoup amusée de relire ce texte ! Je vous embrasse et j'embrasse Corinne aussi
Ah, chère cousine, je vous accueille avec plaisir, et j'espère que vous avez conservé ce tempérament de feu, qui vous avait mérité votre surnom… La Stromboli ! Savez-vous qu'à la seule évocation de votre personne, mon cousin se trouve comme transporté ! Dans son regard, alors, surgit une lueur dans un cratère… Connaissiez-vous ce portrait de vous, que j'ai le plaisir de publier ? C'est un souvenir tout à la fois de famille et personnel… Avez-vous jamais été plus innocente qu'avec ce petit appareil à bulle entre les mains ?
Enregistrer un commentaire