vendredi 2 avril 2010
Blaise pascal…
Je descends à grands pas vers le bas de la ville,
Le dos voûté, le coeur ridé, l’esprit fébrile.
Votre flanc grand ouvert est comme un grand soleil
Et vos mains tout autour palpitent d’étincelles.
[…]
C’est à cette heure-ci, c’est vers la neuvième heure,
Que votre Tête, Seigneur, tomba sur votre coeur.
Je suis assis au bord de l’océan
et je me remémore un cantique allemand,
Où il dit, avec des mots très doux, très simples, très purs
La beauté de votre Face dans la torture.
[…]
Peut-être que la foi me manque, Seigneur, et ta bonté
pour voir ce rayonnement de votre Beauté.
Pourtant, Seigneur, j’ai fait un périlleux voyage
Pour contempler dans un béryl l’intaille de votre image.
Faites, Seigneur, que mon visage appuyé dans mes mains
Y laisse tomber le masque d’angoisse qui m’étreint;
Faites, Seigneur, que mes deux mains appuyées sur ma bouche
N’y laissent pas l’écume d’un désespoir farouche.
Je suis triste et malade, Peut-être à cause de Vous
Peut-être à cause d’un autre, Peut-être à cause de Vous.
Seigneur, la foule des pauvres pour qui Vous fîtes le Sacrifice
Est ici tassée, parquée, comme du bétail, dans les hospices.
D’immenses bateaux noirs viennent des horizons
Et les débarquent pêle-mêle sur les pontons.
Il y a des Italiens, des Grecs, des Espagnols,
Des Russes, des Bulgares, des Persans, des Mongols.
Ce sont des bêtes de cirque qui sautent les méridiens
On leur jette un morceau de viande comme à des chiens.
C’est leur bonheur à eux que cette sale pitance.
Seigneur, ayez pitié des peuples en souffrance.
BLAISE CENDRARS
Les Pâques à New York (extrait)
Photographie © PM
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10 commentaires:
Magnifique poème Patrick, je ne connaissait pas Blaise Cendrars, je vais m'empresser de me le procurer, mais ô faite, blaise cendrars ou blaise pascal,? Oui je sais, suis pas très,très fut-fut,,,, de tout les manière, magnifique , cordialement jean
Blaise, mon cher Jean de la Lune, quand vous l'aurez «ouvert», vous n'en sortirez plus. Je vous en parlerai plus longuement dans quelque temps.
Jean, moi non plus je n'ai jamais rien lu de Blaise Cendrars, un bien beau poème, on se sent plus humain après l'avoir lu. Patrick, est-il vrai qu'on y a vu des similitudes avec celui d'Apollinaire, "Zone", cet éloge à la modernité naissante encore chargée de promesses, éloge de la foi mêlé de nostalgie, de mélancolie amoureuse, d'impuissance face à la fuite du temps..Un choc de lecture pour moi, tout y est. Je vous embrasse tous les deux, because I leave tomorrow !
.. et quelle belle photographie !
Corinne, je ne savais si vous étiez encore en France. «Puisque vous partez en voyage», acceptez que je vous charge d'un poids peu utile mais léger : le souvenir de ce blogue, où vous êtes comme chez vous.
Pour Apollinaire, il est tout à fait vrai qu'il avait lu la poésie de Cendrars, et que cette lecture a modifié sa «manière». J'admire Apollinaire, sa puissante mélancolie, sa fantaisie, mais je reconnais dans Cendrars le premier poète «cubiste», le père de l'accélérateur d'électrons dans le regard du XXe siècle. Cendrars lui-même le savait, mais s'en fichait. Nous parlerons de tout cela prochainement.
Bon voyage, «puisque vous partez en voyage… (voir Ses chansons (1))
Merci de vos lumières, très cher Patrick. Je ne serais jamais partie sans vous dire au revoir ! J'emporte cette chanson que j'aime tant et vous dis à très bientôt. Paradoxalement, je ne me sens jamais si Française que lorsque je suis hors de France, mais quand je suis ici, je rêve d'ailleurs ! C'est avec bonheur que je vous lirai de là-bas si je le peux.
Corinne, n'oubliez pas ; «puisque vous partez en voyage», emportez avec vous votre appareil photographique et un carnet de notes. Au retour, vous nous montrerez et vous nous raconterez !
Bonsoir, cher Patrick.
Un des poètes les plus chers à mon coeur.
Pour entendre sa voix récitant Iles,
ce lien. Document magnifique.
Bien à vous
http://www.larevuedesressources.org/spip.php?article533&PHPSESSID=9f92df4c89f2394cf0ed3ab148b204ee
Magnifique cadeau, Jérôme ! Notre grand, notre cher Blaise. Je suis très ému, vraiment. Merci intense.
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