En haut : Août 1949, avenue Montaigne, Paris : le mannequin Dorian Leigh (née Dorian Elisabeth Leigh Parker, 1917-2008) porte un manteau signé Christian Dior. On considère Dorian Leigh comme le premier Top model moderne. Et, en effet, elle possède cette sorte de distance dans le regard, de froideur aimable, qui signale tout à la fois un engagement total sous l'œil du photographe, une lucidité exigeante, et un contrôle constant de ses postures comme de sa physionomie. Elle est en représentation, mais elle n'est pas toute entière là ! D'une intelligence très supérieure à la moyenne, brillante même, elle eut une vie d'audace et d'aventure. Elle aurait inspiré au grand Truman Capote le personnage de Holly Golightly dans Déjeuner chez Tiffany. Plus tard, elle ouvrit, à Paris, une agence de mannequin, profession où son œil exercé lui permit, par exemple, de révéler, parmi d'autres visages, celui de la célèbre Twiggy, star de la mode dans les années soixante et soixante-dix. Mariée quatre ou cinq fois, animatrice de la dolce vita, incarnation du glamour, traînant tous les cœurs et les corps après elle, Dorian Leigh ne fut nullement épargnée par le chagrin. Son fils, victime de la drogue, se suicida. Au terme d'une longue crise morale, et surmontant les épreuves, l'âge venant, elle trouva un vrai réconfort dans la personne du Christ. Si l'on sait l'anglais, on lira son autobiographie : The girl who had everything (La fille qui avait tout, voir photo plus bas), sous-titré The story of Fire and ice girl (L'histoire de la fille du feu et de la glace). Ce sous-titre rappelait qu'elle avait posé devant l'objectif de Richard Avedon, en 1952, pour une publicité qui fit grand bruit, en faveur du parfum Le feu et la glace (voir photo plus bas). Elle était accompagnée d'un questionnaire à l'adresse des femmes, destiné à leur faire connaître la réponse à la grave interrogation suivante : « Êtes-vous faite pour le parfum Le feu et la glace ? ». Parmi les questions, on trouvait ceci : « Avez-vous déjà dansé après avoir retiré vos chaussures. » ; « Espérez-vous secrètement que le prochain homme que vous rencontrerez sera un psychiatre ? » ; « La musique tzigane vous rend-elle triste ? » ; « Fermez-vous les yeux lorsque vous embrassez ? » ; « La zibeline vous excite-t-elle, même portée par une autre femme ?»… Si l' on répondait au moins neuf fois par l'affirmative, on était une femme « Ice and fire » ! Heureuse époque ! Sa sœur, Susy Parker, mannequin elle aussi, fit une belle carrière cinématographique. (Don des parfums Nina Ricci, © The Richard Avedon Foundation).
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Ci-dessus : Août 1947, Place de la Concorde, Paris : Renée, premier mannequin de la maison, porte un ensemble de la collection New Look, de Christian Dior. Veste courte cintrée, épaules adoucies, « attendries » (la langueur Dior), jupe très ample, coupée nettement sous les genoux (la longueur Dior) : la mode selon Dior environne la silhouette féminine d'un abondant et luxueux tissus. Il revient à la femme d'animer cette profusion : elle donne vie, par sa grâce et sa légèreté, au fameux « appareil ondoyant », que Baudelaire évoquait. (Don des parfums Nina Ricci, © The Richard Avedon Foundation).
On consultera aussi Madame Grès, Le tremblant des vitrines, Les dames dans la vitrine 1, Vitrines, Le don d'Avedon, Obsessed by Auermann -1-, Obsessed by Auermann -2-, Obsessed by Auermann -4-, Obsessed by Auermann -5-, Mad about Magoo, Addicted to…, En vitrine
13 commentaires:
Vous excellez en bien des domaines, cher Patrick. Mais force est de se réjouir que le thème qui surpasse tout, c'est toujours L'ONDOYANCE... Et c'est tant mieux pour nous.
Amis de "Tous les garçons", si ce n'est fait, profitez-en pour vous délecter en outre des articles passés repris en fin de billet.
ps : le tailleur Dior est une merveille.
Cher Nuage,
En effet, ce tailleur est une réussite absolue, comme tout ce que fit ce grand rénovateur de la mode, que fut Christian Dior.
Vous reconnaîtrez, je le pense, que la magnifique Dorian Leigh est une reine de l'Ondoyance.
N'est-ce pas un peu ce qu'en des temps très anciens l'on appelait l'éternel féminin...
Je ne sais pas si j'aurais été faite pour "le feu et la glace" mais je ferme les yeux en embrassant, et la musique tzigane me rend toujours triste.
Célestine, votre œil répond oui à toutes les questions : vous êtes faite pour ce parfum. Quoi qu'il en soit, bienheureux celui que vous embrassez en fermant les yeux !
Cette couture donnait l'envie de faire du lèches vitrines à cette époque, la mode est devenue si uniformes a l'heure actuelle.
La bienvenue à Retriever !
Imperméable au charisme (?) de Twiggy, suis-je normal ? Parmi les muses et égéries des 60's, je convoque Christa Päffgen/Nico et Jane Shrimpton. (Ah, Jane...)
René Claude, pour Nico, voyez http://touslesgaronssappellentpatrick.blogspot.com/2010/02/nico-une-allemande-dans-la-factory.html
Pour Twiggy, l'affaire est simple : sa moue, son « absence », ses yeux immenses, sa silhouette androgyne en font le porte-manteau idéal du swinging London. Aujourd'hui, c'est une évidence, à l'époque, il fallait un œil exercé pour saisir ce qui, chez elle, incarnait parfaitement son temps. Il y a une totale adéquation entre les deux.
Jane Shrimpton est magnifique, bien sûr, mais plus intemporelle. Pattie Boyd est charmante, mais un cran en-dessous relativement à cette question de l'«incarnation ». Quant à moi, j'ai un faible pour l'actrice Jane Asher, une rousse vraiment anglaise, acide, ironique, d'une sensuelle curiosité : ma mémoire visuelle d'adolescent fut longtemps troublée par son rôle dans le fil de Jerzy Skolimowski, Deep End. J'enviai Paul McCartney, auprès de qui elle demeura, dans les années soixante, lorsque Londres régnait sans rivale sur le monde.
Il faudra que nous parlions de tout cela.
Christa Päffgen a piqué le pseudo de Nico à l'ex-mari d'Anouk Aimée*, le producteur Nikos Papatakis qu'elle fréquenta à Paris à la fin des 50's et au début des 60's. Je ne le savais pas avant d'ouvrir "Maurice Ronet, les vies du feu follet" de Jean-Pierre Montal, un essai biographique plutôt agréable à lire.
* Anouk et Maurice Ronet se sont aimés peu de temps mais avec passion selon son biographe.
un cocktail dans un lieu enchanteur, et j'observais les femmes d'affaires ou épouses, gris tout était gris, d'un gris triste et fatigué - j'étais en chemise, jeans sombre et boots, un soupçon de mascara, rouge à lèvres rouge de texture légère, ongles impeccables, limés courts, guitare oblige, et vernis d'un rose coquillage, et je me sentais femme. - l'éternel féminin n'est pas qu'affaire d'escarpins, enfin, je ne crois pas.
Certes, Anna, certes, néanmoins rien ne met en valeur la jambe, la cambrure, le dos d'une femme qu'une paire d'escarpins. Enfin, vous n'étiez pas dépourvue d'arguments : mascara rouge, vernis rose coquillage, et toute votre personne…
Si des escarpins vous font plaisir, qu'à cela ne tienne, je porterai pour vous rencontrer ma jolie paire de salomés !
« Des filles m’ont raconté qu’elles ne peuvent vivre qu’en talons.
A plat, elles se sentent trop petites et supportent mal de ne pas être à la hauteur du regard de leur interlocuteur, surtout quand il s’agit de négocier un contrat important.
D’autres m’ont dit qu’à plat, elles se sentent “grosses” : les talons allongent leur silhouette.
J’en connais qui ne peuvent plus redescendre : à force d’être sur des échasses, le triceps sural (muscles du tendon d’Achille) se rétracte, elles ont des crampes aux mollets et mal au dos dès qu’elles tentent les derby ou les ballerines. Il leur faut au moins 10 cm pour se sentir à l’aise.
C’est vrai, les talons, c’est joli… Si c’est bien porté.
Dans la rue, je croise parfois des cigognes vacillantes ou des démarches de camionneur sur 16 cm. Aïe…»
(extrait de : http://blogs.lexpress.fr/styles/mode-personnel/2012/06/11/comment-marcher-avec-des-talons/
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