jeudi 16 juillet 2009
Delon ne mégote pas
La censure entre les doigts
On ne remarque pas l'infime détail dont il sera question ici, on ne voit que la beauté fulgurante de ce jeune homme. On le reconnaît, bien sûr, même si l'on hésite un peu : dans cette hésitation, il n'entre pas seulement les métamorphoses du temps, de l'âge, de la personne, il y a également l'effet de surprise, l'incrédulité : il fut donc si outrageusement beau ! Cette masse sombre des cheveux d'où s'échappent les mèches par vague, ce visage aux yeux tendres mais au regard blessé, cette lèvre inférieure gonflée d'une bouderie de gosse contrarié, cette allure d'adolescent tout en méfiance… Ainsi, cette perfection fut possible et rassemblée dans un seul être ! Alors, on éprouve une reconnaissance infinie pour le miracle de la grâce physique que Dieu, assisté de la génétique, n'accorde qu'à quelques-uns d'entre nous. Nous aimons l'innocente cruauté de l'évidente beauté.
Quant au détail, le voici : sur la photographie originale, Alain Delon tient une cigarette entre ses doigts ; sur le document qui vient illustrer la dernière campagne de Dior pour son parfum Eau sauvage, tout est conforme au code de la santé publique… Aujourd'hui, une icône ne fume plus. L'excellent photographe Jean-Marie Périer, auteur du portrait, un esprit d'une réelle acuité, d'une exquise courtoisie, toujours émerveillé mais jamais dupe, a donné son accord. Nous déplorons la soumission à la censure hygiéniste du temps, mais nous remercions vivement JMP d'avoir saisi la posture d'envoûtement d'Alain le Magnifique. (Photographie : Alain Delon en 1966, par Jean-Marie Périer).
Note : Sur ce document, Delon, me semble-t-il, reprend le geste, presque le tic, de Bogart : le glissement du pouce sur les lèvres. JMP le lui a-t-il soufflé ? Lui est-il venu naturellement ? Dans À bout de souffle, de Jean-Luc Godard (1960), Belmondo, comme un salut de la mémoire, reproduisait ce mouvement, en l'appuyant un peu…
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26 commentaires:
Vous avez raison, la grâce et la beauté à l'état pur. Un peu trop lisse et parfait pour être touchant toutefois. Il lui manque une petite bosse et une cicatrice, juste là.
Mais Delon, malgré ses traits lisses, porte la bosse et la cicatrice dans son regard. Il a en lui un drame intime (peut-être ses parents, leur mésentente). Il m'est arrivé de le croiser, assis, seul, sur un banc, car il réside, à Paris, près de chez moi. Quelqu'un, qui le connaît un peu, m'a dit qu'il était imprévisible. Il a des yeux de naufragé. je vous salue comme je vous estime.
Quand j'ai revu cette photo sur les murs de la ville, ces jours-ci, j'ai pensé que sa beauté était demeurée sans égal, à cause peut-être de ce regard singulier, si triste...
Mais, juste après lui, dans mon hit-parade personnel, il y a Steve Mac Queen au regard tendre et au sourire si doux, et aussi le flegmatique Robert Mitchum à la démarche chaloupée inimitable... Quels hommes !
sans égalE, pardon !
Mitchum, Émilie, quelles épaules ! Dire que ce si beau gosse a pu incarner l'ogre dans La Nuit du chasseur, de l'incomparable Charles Laughton ! Steve Mac Queen, je n'étais pas sensible. En revanche, j'aimerais vous entendre sur Marlon Brando. Plus brisé, plus naufragé que cet homme, cela n'existe pas. J'adorais son mépris vrai d'Hollywood, sa chute permanente, son redressement… L'homme floué, biaisé du Dernier Tango à Paris, c'était vraiment lui. Bertolucci lui a pris son être, il l'a dépouillé, et l'a montré en public. Brando lui en a longtemps voulu, puis il lui a pardonné. Le cinéma aimait ces femmes et ces hommes du trouble et de l'angoisse. C'était avant…
J'ignore pourquoi j'ai oublié Brando, alors que je guette les rediffusions de ses films.Sans doute parce que je l'ai aimé après les autres ! C'est bien le plus sexy, le plus troublant, le plus fascinant de tous. Ce regard pénétrant et tragique,cette présence qui crevait l'écran.Un charnel, un sensuel, un sensitif. Beau comme un dieu dans l'Equipée, Un tramway, Le Tango, je me rappelle comme ce film à sa sortie avait choqué, perturbé la jeune fille que j'étais !
Et aussi une mention spéciale beau gosse à Paul Newman !
Chère Beauregard, dans le Tango, c'est la jeune fille qui gagne. L'un de mes films de référence.
Pour Paul Newman, hélas, je ne vous suivrai pas. Je le considère comme le pire de «l'actor's studio». il n'a jamais su se débarrasser des tics qu'on leur donnait. Et, comme son successeur dans le cœur des dames, Robert Redford (très beaux yeux, lui aussi), je lui trouve le sex appeal d'une bretelle. Mais défendez-donc votre beau Paul, et parlez-nous du trouble que la jeune fille Émilie ressentit, après la projection du dernier Tango… La jeune fille Émile, la claudellienne Émilienne !
Bien vu Patrick, Redford préfigure l'actuel chéri de ces dames, le si fade Brad Pitt.
Moi je préfère Clark Gable, en Rhett le voyou magnifique ou plus encore dans les misfits, et Burt Lancaster en prince Salina. L'élégance suprême des temps anciens. Mille Tancrèdes pour un Salina. Vous savez, "Nous fûmes les guépards, les lions ; ceux qui nous remplaceront seront les chacals et les hyènes." Je pourrais vous citer quelques acteurs roumains des années 50, des ouvriers émérites mais torrides qui tombent amoureux de lianes paysannes avec des yeux de braise... Mais je suppose que le nom de Stefan Banica ne vous dira rien...
Entre les trois Paul mon coeur balance ?
Le Tango ne pouvait que désespérer les jeunes filles romantiques qui bovarysaient encore beaucoup ! Ce film sur l'impossible dialogue m' a enseigné que la libération sexuelle ne pouvait mener qu'à une impasse qui ressemble beaucoup à un esclavage...
D'ailleurs le site érotique dont vous faites la publicité m'a beaucoup amusée ! Il s'affiche hypocritement cul-turel, mais il est surtout cul...Pardon, mais je ne suis pas parisienne, ça me gêne, ça me gêne. Je ne suis pas dans le vent
C'est navrant, c'est navrant
Aucune bizarrerie
Ça m'ennuie, ça m'ennuie...!
Émilie : Le dernier Tango me paraît très éloigné de la libération sexuelle. Ce n'est, ni de près ni de loin, son objet, me semble-t-il. Certes, l'homme et la femme s'y livrent à des pratiques qui ont pu choquer les spectateurs, mais le propos est ailleurs. Les féministes, à l'époque, avaient voulu boycotter le film, sous le prétexte qu'il glorifiait le membre viril ! Quelle erreur ! Ce pauvre macho rouillé, au bord du précipice, tombe dans les filets de la jeune femme, lui procure des sensations fortes et neuves, mais il s'éprend d'elle, se met à bêler, alors qu'elle l'a utilisé, et ne veut, après, que s'en débarrasser. Cherchait-il son exécutrice ? Voyez-le, au moment de sa mort, sur le balcon, il a retrouvé la position du foetus. Les hommes ne devraient jamais lâcher la main de leur maman !
Pour ce qui est du site de Paul et de Catherine, qui sont des amis, je comprends fort bien qu'il ne vous intéresse pas, mais je vous trouve injuste : ils ont vraiment cherché à marier le cul et le turel. Tous deux sont de vrais coquins, des libertins sans doute, et ils aiment tous les aspects de la vie. Je ne sais pas s'ils parleraient de «libération sexuelle», trop connotée mai 68, trop libéral-libertaire à leur goût, je pense qu'ils se réclament plus du XVIIIe siècle.
Je souhaite vivement que cette contrariété ne vous détourne pas de ce blog, Beauregard, j'en serais vraiment désespéré. Que pense Nadia de cette initiative ? Il me vient à l'esprit que Paul et Catherine voudront peut-être vous répondre…
Cela n'a rien à voir, mais je ne résiste pas au plaisir de vous livrer le message amical que m'a fait parvenir Paul Wagner, photographe des femmes, peintre des voluptés, ex directeur artistique de Vogue, homme de goût et d'une éducation parfaite. En voici la preuve :
«Cher Patrick,comme vous le savez,je vais mieux, depuis cette soirée, à la fin du mois de janvier,où, voulant faire le jeune-homme, je me suis déchiré
le tendon d'Achille, lors d'une danse effrénée ! Il est vrai que ma partenaire en valait la peine : une belle blonde d'Afrique du Sud ! Figurez-vous que la sublime dame se lamentait et se sentait énormément coupable, car c'est elle qui m'avait invité à danser. Vous savez que je suis galant homme ; voyant son embarras, je lui dis en riant :
«Allons, ce n'est rien, ma chérie ! je suis prêt à perdre toutes mes jambes pour une autre danse avec toi ! ».
Je vais placer votre blog dans ma
barre des signets, pour vous consulter souvent.
A bientôt
Paul Wagner
Émilie, lorsque je dis : «Je souhaite vivement que cette contrariété ne vous détourne pas de ce blog, Beauregard, j'en serais vraiment désespéré.», c'est surtout du présent blog que je parle.
Pour le Tango, disons que je me suis certainement arrêtée à l'aspect malsain de l'histoire qui venait déranger, malmener l'idée que je me faisais alors des relations amoureuses et de ce que devait être un homme,ce que devait être une femme...Je n'ai plus revu le film depuis, j'imagine que je serais aujourd'hui plus indulgente pour cet homme "rouillé" et détruit !
Je sais bien qu'il est du dernier chic de se référer à Sade et aux libertins du XVIIIéme et que 68, c'est ringard...mais...Homo Festivus dirait Muray !
Le dernier tango est certes "libéré" puisqu'il montre sans fard ni voile ce que la morale réprouvait alors mais il me semble qu'il est plus emblématique d'une certaine "culture pop" que de la libération sexuelle proprement dite. J'avais trouvé Maria Schneider agaçante et inexpressive, hormis d'un point de vue poitrinaire, mais Brando m'avait terrassée. Simplement parfait. J'aurais aimé lui prendre la main.
Quant au blog de vos amis, il est libertin assurément et ce n'est pas pour me déplaire.
Émilie, je savais bien que vous ne me passeriez rien ! Pour Le tango, rien à reprendre de vos derniers propos. mais si vous avez l'occasion de le revoir, n'hésitez pas. On le trouve à bas prix. Par ailleurs, la musique de Gato Barbieri est excellente.
En revanche, pour ce qui est des libertins versus les libéraux-libertaires de mai 68, il en va tout autrement. La notion floue de «ringardise» n'entre pas dans mon appréciation. Je ne soutiens pas les uns contre les autres, je me réfère au moment historique des premiers pour considérer d'un œil morne les petits vertiges sensuels des seconds. Nuance, Beauregard !
J'aimais déjà beaucoup votre côté cravache, voilà que vous le pimentez d'une plaisante figure de «cousine de province». Mais savez-vous que je vous adore !
D'accord avec vous, Nadia, Maria Schneider jouait très mal...et une vraie tête à claques !
Le film est sorti en 72, on était en pleine "révolution sexuelle"...Mais aujourd'hui, on efface et censure les cigarettes sur les photos d'Alain Delon !
Alors, comme ça, vous aimez les sites libertins, Nadia ? Je dois être très vieux jeu !
Nadia, veuillez m'excuser, je n'avais pas encore pris connaissance de votre intervention. Culture pop, c'est certain, mais sans l'allégresse, sans la joie, sans même la liberté proclamée par ce mouvement. Le Tango relate l'oppression d'un homme, son enfermement : d'ailleurs, l'essentiel se passe dans un appartement vide. L'hôtel appartenant à la femme de Brando, où elle s'est suicidée, est presque borgne. Et même quand il se retrouve au dehors, toutes ses postures sont mutiques, closes, «anti-sociales». La sexualité du Tango est vraiment tragique, elle ressortit, en cela, à un autre temps que celui de la culture pop. Je n'avais pas été physiquement émue par Maria Schneider, mais j'avais apprécié sa fraîcheur. Vous savez sans doute que sa carrière n'a jamais pu décoller à cause de ce rôle. Le milieu du cinéma, qui se prétend si libéral, l'a toujours regardée comme «la fille au beurre». le préjudice pour cette jeune comédienne a été terrible. Je me réjouis de constater que vous voyez le site de mes amis comme libertin. Car, n'en déplaise à Beauregard, ce fut bien leur intention. Je leur demanderai de préparer une ballade coquine, pour votre fiancé (le joli mot) et pour vous même, en Angleterre. Mais, avez-vous besoin de leurs conseils ?
La cousine de province à la cravache ! Quelle synthèse, quel court-circuit ! Mais vous savez que je me suis étouffée de rire !?
A propos de "beurre", on a dit que Maria Schneider ignorait cette scène, préméditée à son insu par Brando et Bertolucci ? Cher Patrick, vous qui savez tous les secrets d'alcôve et fréquentez "le grand monde", si loin de notre Sud, mettez-moi au parfum et dites à la provinciale provençale si c'est exact .
Chère cousine,
Pour ce que j'en sais, la pauvre jeune fille ne savait pas ce qui l'attendait. Bertolucci ne la mit dans la confidence qu'au dernier moment. Je crois qu'elle ne supportait pas les projections publiques du film. On peut la comprendre.
Mais chère cousine, je m'étonne un peu, vous sachant si prude, de vous voir aussi attentive à ce genre de détail… parisien. Il est vrai que votre usage courant du beurre, cuisinier et pâtissier, vous tient fort éloignée de ces pratiques.
Bien joué Callaghan !
Notez que l'huile d'olive, si présente dans la cuisine méridionale, mais inutile dans la pâtisserie, aurait pu… comment dire… faciliter tout aussi bien la figure érotique dont il est question mais qu'on ne nommera pas. Alors pourquoi pas l'huile d'olive ? La réponse me paraît relever de la pure dramaturgie. Imaginer Brando se saisir de la bouteille d'huile, verser son contenu, reposer la bouteille… Il n'eût plus manqué que du vinaigre ! Il fallait évidemment du beurre, et ce mouvement de la jambe, périlleux avec une bouteille, pour ramener à soi l'objet… du délit. Croyez-moi, chère cousine, considérez comme auparavant votre huile d'olive et votre beurre. Ils sont bien faits pour la cuisine, mais non pour le déduit !
Émilie, Nadia, je vous abandonne quelque temps. Je vous retrouve dans la cuisine ?
Il est vrai que le dernier tango restera à jamais marqué par cette histoire de beurre... Dommage, la matière grasse a occulté ce que le film contenait de dramaturgie pure. Décidément, j'en reste à Brando et à son regard noyé.
Cher Patrick, si vos amis sont taquinés par une ballade coquine, mon "fiancé" et moi sommes preneurs naturellement.
Patrick en partant vous avez dû oublier de fermer les portes. Ce blog est plein de courants d'air coquins ! Figurez-vous, cher cousin, que le dernier post de nadia s'est envolé un moment... pffft, plus rien... puis a retrouvé mystérieusement sa place !
Permettez-moi cette expression du pays de l'olive, mais commen-ce-fesse ? Il faut dire que ça décoiffe : dans notre provence lointaine, le vent souffle et fouette si fort que les cigales en ont le sifflet coupé !
Emilie, mes posts sont volatiles ? Ciel, je vais devoir les arrimer. C'est sans doute le vent du Nord qui souffle terriblement sur Londres aujourd'hui et nous prive fort heureusement d'une pluie mortifère.
Après m'avoir demandé de lui faire parvenir une livre de beurre «parisien», pour en faire un usage sur lequel je ne sais rien, sinon qu' il ne sera point pâtissier, ma cousine provençale, la marquise de Beauregard m'écrit : «Figurez-vous, cher cousin, que le dernier post de nadia s'est envolé un moment... pffft, plus rien... puis a retrouvé mystérieusement sa place !».
Elle est charmante, la Beauregard, elle dit à tout le monde que je sème des créatures numérisées, elle me fait mille reproches, et prétend maintenant que je fais apparaître et disparaître les lettres «diplopatrick» que m'envoie une bienveillante amie, parente par la cuisse gauche, de mon cher prince de Ligne, présentement en poste dans une capitale exotique !
On me dit que la Beauregard est allongée sur le sable la plupart du temps, mais que, très prude, elle ne présente au soleil et à la concupiscence du peuple de la plage, que la nudité de ses pieds, tout son corps étant revêtu d'une sorte de long voile post-moderne ou encore pré-mahométan. Quelque espion à ma solde, qui a pu l'observer, m'a affirmé qu'elle semblait absorbée dans la lecture d'un gros ouvrage de dame, mais qu'à la vérité, derrière les verres opaques de ses lunettes, elle ne cessait de jeter des regards brillants vers le maître-nageur, un grand blond qui fait l'avantageux et invite les demoiselles à trouver de l'ombre fraîche sous ses pectoraux…
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