Le théâtre de Sacha Guitry, surtout lorsqu'il est mis en scène par Bernard Murat et interprété par des carriéristes de télévision, est démodé, vieilli, et toujours trahi car respecté. Il faudrait un voyou pour lui redonner une vigueur, ou alors un homme d'aussi bel esprit (Jean-Laurent Cochet).
Non, le vrai Guitry est au cinéma, dans ses films, dans ses dialogues, dans ses comédiens, cette troupe de grands et petits rôles qu'il traitait avec le même soin et le même respect. Comme Cocteau, Guitry est d'abord un enchanteur, un bonimenteur éclairé. Il nous fait asseoir, se présente, commence un récit, l'interrompt, feint de s'éloigner, puis revient ; il sent bien que nous accrochons, que nous voulons la suite, alors il la donne, il l'offre avec une pleine et entière générosité. Et l'esprit lui vient avec le cœur. Et nous avons tant besoin de l'un et de l'autre !
Quelque jour, je vous rapporterai mon après-midi chez et avec Arletty, ce qu'elle m'a dit de Sacha…
Vous noterez au passage que Sacha n'abandonne jamais ses amis, ni qu'il n'oublie les offenses et les trahisons dont ils (il) ont (a) été victime(s). Ainsi, au début de cet extrait, prend-il bien soin de rappeler que Charles VII a lâchement abandonné Jeanne d'Arc… Lui aussi, Sacha Guitry, fut trahi, abandonné, sali à la Libération ! Ceux qu'il avait aidés dans les années noires, soudain, souffraient de trous de mémoire.
Extrait délicieux, avec Paul Colline en Charles VII et Danielle Darrieux en Agnès Sorel.
Si Paris nous était conté ( 1956)
Réalisation, scénario, adaptation, dialogues : Sacha Guitry
Réalisateur adjoint : Eugène Lourie, assistants réalisateur : Jean Vivet, Daniel Aubry
Images : Philippe Agostini
Opérateur : Jean-Marie Maillols Raymond Letouzey, assistés de Barsky
Musique : Jean Françaix
Direction musicale : Marc Lanjean
Décors : René Renoux, Henri Schmitt, assistés de Pierre Tyberghein
Costumes : Monique Dunan, Jacques Cottin
Robes : Maggy Rouff
Montage : Paulette Robert, Nadine Marquand
Son : Joseph de Bretagne, Emile Lagarde
Maquillage : Simone Knapp, Monique Archambault
Coiffure : Alex Archambault
Photographe de plateau : Jean Klissak
Chef de production : Clément Duhour, Alain Poiré, Henry Deutschmeister
Directeur de production : Gilbert Bokanowski
Administrateur de production : Pierre Aubart
Production : C.L.M - Gaumont - Franco London Films (France)
Distribution :Gaumont
4 commentaires:
J'adore Sacha Guitry ! Et Danièle Darrieux, insolente ingénue, une diction parfaite, un jeu si juste ! Ma maman l'adore, elle lui ressemblait d'ailleurs. Avec ce ton si particulier, Guitry savait exprimer toute l'hypocrisie, les petites et grandes lâchetés du petit et du grand monde.
Merci Patrick.
Ceci-dit, Patrick, si la province est "le pays des vaincus", le parisianisme dans ses excès nous rappelle qu'effectivement certains de ses propagandistes ont de belles têtes de vainqueurs !
Justement, Corinne, cette idée de provincialisme me paraît souvent utilisée à mauvais escient. Il faudra que nous fassions un développement sur ce sujet, qui trahit de mauvaises pensées, des frustrations et un snobisme étroit. Le parisien vrai n'est pas cet arrogant détenteur d'un quant-à-soi, au fond ridicule et démodé.
Voyez cet extrait du film de Sacha : la jolie Darrieux vient de province, et fait observer à son roi maussade que sa capitale s'endort…
Mais je suis invité à déjeuner, j'ai un mal fou à me presser, et j'ai le chagrin de devoir interrompre cette délicieuse conversation avec vous, que je reprendrai, si vous le voulez bien, un peu plus tard.
Patrick, hâtez-vous donc lentement ! Ici, au pays des ducs et des escargots, on sait donner du temps au temps. Il est également des nostalgiques d'un temps révolu, celui de la Toison qui, hélas pour ces derniers, aujourd'hui dort.
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