mardi 28 juillet 2009

Ferveur et marquisat


Dans un récent message (voir ci-dessous Aliocha, Yashband, Goga)
je vous faisais part de ma découverte
, sur youtube, d'un enregistrement des
Deux guitares, chanson tzigane, par le grand Aliocha Dimitrievitch (décédé en 1986, il repose dans le beau cimetière orthod
oxe de Sainte-Geneviève-des-Bois). J'ajoutai à la vidéo, le témoignage qui l'accompagnait, signé Yashband. Par politesse, je fis connaître mon initiative à ce dernier. Voici sa réponse :

Cher Monsieur,

Vous ne m'avez froissé en aucune façon, bien au contraire.
Je vous remercie pour votre appréciation, et je suis heureux que la mémoire de mon Ami Goga soit honorée par votre sensibilité.
J'ai connu Goga à Bruxelles, au cabaret russe Le Slave, qui était le dernier établissement russe «ancien» véritable chez nous. Il était devenu un ami proche et venait à la maison régulièrement. Après avoir été en tournée avec Ivan Rebroff, pendant près de 3 ans, il s'est fixé à Paris, et travaillait à l'Étoile de Moscou, situé rue Arsène Houssaye. Il s'est marié ensuite avec la chanteuse Tzigane Lovara, Zina.
Bien cordialement,

Yashko
Avez-vous vu la vidéo suivante, avec la voix de Goga ?
:
http://www.youtube.com/watch?v=0zBucjdXEHo
Je précise que Yashko, sous le pseudonyme Yashband, publie sur youtube de rares images et chansons des Dimitrievitch et d'autres interprètes tziganes et russes. Il le fait avec un soin et une ferveur proprement slaves. Que vive l'éternelle, la nouvelle et la future Russie !

Photographies : ci-dessus,
Yashko, en tenue traditionnelle.
Ci : dessous : Dziga Vertov, L’homme à la caméra, 1929, DVD en vente
sur le site http://www.russie.net/.

Je reconnais les amoureux du cinéma au seul fait qu’ils se lèvent quand on prononce le nom de Dziga Vertov. Il ne commit, selon moi, qu’une seule erreur d’appréciation : avoir cru à la Révolution.

135 commentaires:

Unknown a dit…

Mon cher Patrick, je n'ai pas de commentaire sur ce sujet, je voulais juste vous dire que je me suis permis de faire un lien sur mon site : paulwagner.book.fr parce que j'aime votre blog... voilà... et je vous adresse toutes mes meilleures pensées du matin...
Paul

Patrick Mandon a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Patrick Mandon a dit…

Cher Paul, votre mot vous ressemble : élégant, aimable, tendre. Si les dames qui fréquentent ce lieu, savaient quel homme vous êtes, et quelles femmes vous photographiez, toutes voudraient assurément poser devant votre objectif. J'enserre votre large carrure…
(J'ai effacé mon dernier message, car je n'avais pas accordé les verbes. On doit toujours décliner les verbes au pluriel quand il s'agit de dames.)

Unknown a dit…

Cher Patrick, merci mais c'est trop !... la vieille bête que je suis verse une larme de crocodile ému... Mais je prie qu'elles vous entendent... Ceci dit, la confiance est là, puisque vous avez l'Art de soigner les mots... merveilleux préliminaires...
Je vous embrasse...

Patrick Mandon a dit…

Vieille bête, Paul ! J'invite les dames à se rendre à votre adresse -je ne veux pas dire à votre domicile, tout au moins pas encore… mais sur votre site. Elles verront que mon cher crocodile n'est pas de ces sauriens dont on fait les peaux de chagrin, mais plutôt les très beaux sacs à main… Paul n'a d'ailleurs jamais cessé d'être au bras des jolies femmes… Les plus coquines d'entre elles se promèneront avec ravissement parmi vos photographies, les plus austères passeront leur chemin. Aucune ne restera insensible.

Emilie a dit…

Je me suis promenée dans la galerie de photos; elles sont belles.Mais celles que je trouve les plus réussies, celles que je préfère sont celles qui suggèrent, parfois dans un clair-obscur, qui laissent deviner...j'aime moins celles qui exhibent et qui ne font que sacrifier à la mode... C'est dommage !

Unknown a dit…

Chère Emilie, j'aime votre promenade dans mon jardin d'images et je partage vos goûts pour le clair-obscur et le contre-jour, mais je ne sacrifie rien à la mode... non, il faut un peu de tout pour faire un monde... et certaines images ne sont que des premières étapes pour aller plus loin... Revenez quand vous voulez... vous êtes chez vous...

Emilie a dit…

Comment cela "aller plus loin" ? Et où ? Vers des plans carrément gynécologiques ? C'est justement là qu'est le problème, mon cher Paul !

Unknown a dit…

Pouvez-vous, chère Emilie, me dire, avec des arguments précis et logiques, ce qu'il y a de répréhensible dans le fait de montrer à des adultes une image dite "pornographique" ?... Cela m'intrigue et personne ne m'a jamais apporté une réponse indiscutable !... Il faut me donner une réponse où je ne peux pas rajouter : "pourquoi ?"... bonne chance...

Patrick Mandon a dit…

Cher Paul,
La sculpturale marquise de Beauregard, retirée du monde à présent, et de son chaos sentimental, depuis la mort de son cher mari, n'épuise plus ses sens qu'en de longues courses à cheval. Elle reçoit les dames de charité, quelques parentes du voisinage et leurs vieux époux bedonnants, et se rend à la messe. On ne l'aperçoit dans les rues de sa ville que dans une sorte de camisole grise et ample, boutonnée «du haut jusques en en-bas». Elle avance à pas vifs,salue d'un bref hochement de sa tête encapuchonnée les couples de sa connaissance, et contraint, de son seul regard impérieux et ulcéré, tout homme qui voudrait la croiser, à changer de trottoir. Elle s'est plainte l'an passé au maire, du comportement «malhonnête et attentatoire à la pudeur» d'un passant qui, la reconnaissant, et levant son chapeau, avait osée dire à voix haute : «Madame» !
Elle se rend à confesse une fois par mois. Elle revêt alors une manière de chasuble de pénitente, et couvre ses cheveux d'une admirable mantille d'un noir d'encre, augmentée d'un voile de dentelle. Dans ces atours de mortification, elle veut incarner la Beauté contrite, le repentir d'être née désirable. Mais celui qui reçoit l'éclat de son regard de braise, malgré la barrière de tissus ajouré qui en atténue l'intensité, celui-là se retrouve comme un cueilleur de feu des temps très anciens…
Inutile de vous dire que ma réputation soufrée lui fait un dégoût, qu'elle ne se prive pas de divulguer par le truchement des commères qu'elle reçoit, et qui s'empressent, de leurs bouches démeublées, d'en porter l'écho jusqu'à Paris… Bien sûr, elle ne me reçoit plus. Mais, que ferais-je auprès d'elle ? J'avoue que la perspective de l'accompagner aux Vêpres ne me réjouit pas outre mesure. On dit qu'elle se nourrit d'un peu de pain frotté d'ail et ne boit que d'eau claire. Et puis, il me faudrait m'épuiser chaque jour à suivre cette statue de marbre, à cheval dans la garrigue !
Ah, mon cher Paul, que n'avez-vous encore à votre disposition cette merveilleuse villa tropézienne, où paraissaient de sublimes créatures ! Elles prenaient devant vous des pauses, dont la seule évocation m'émeut toujours autant…

Emilie a dit…

Tout d'abord,l'accès à la galerie de nus dépend d'une réponse positive à la question "avez-vous plus de 18 ans"? Vous êtes dans la légalité, mais croyez-vous vraiment à l'efficacité de ce pseudo-barrage ?

Unknown a dit…

Chère Emilie, comme les autres vous esquivez la question... enfin non, certains se perdent dans les paradigmes... Je dirais plutôt, si je suis les témoignages de mon ami Patrick, que vous franchissez les pseudo-barrages du haut de votre monture et là, nous sommes d'accord... ils sont bien petits...

Unknown a dit…

Cher Patrick, je vous trouve injuste... j'ai connu des écuyères jolies et fières qui allaient à la confesse sous leur voile de dentelles et qui méritaient toutes les absolutions... Non, je pense que la marquise de Beauregard a juste une position cavalière pour nous faire comprendre qu'elle n'est pas insensible à nos âmes libertines... elle a, je crois, une méthode bien à elle, de nous prendre en croupe...

Patrick Mandon a dit…

«[…] d'un passant qui, la reconnaissant, et levant son chapeau, avait osée dire […]»
On osera surtout écrire «avait osé». Encore une mauvaise audace que ma cousine de Beauregard mettra sur le compte de ma parisienne dépravation !
Mon cher Paul, elle vous a pris dans ses rets, la Beauregard. Elle argumente comme un parlement et délibère comme un gouvernement. C'est un fauve qui n'est pacifié qu'en apparence. J'observe votre duel, et je vous souhaite bonne chance. La dame de Provence est un rude adversaire.

Emilie a dit…

Ah, voilà bien de mes libertins, toujours prompts à se railler de la vertu !

L'un, mon cousin Patrick de Monbeautandon, plût à dieu qu'il ne le fût pas, mais on ne choisit pas sa famille, se vante que sa réputation soufrée me ferait l'éviter et changer de trottoir!

Et l'autre son complice de débauche,j'ai nommé Paul de Lorgnecul, qui photographie des femmes de rien, des vénales, des greluches qui monnaient leurs appâts et leurs charmes, pour paraître, vous parlez d'une gloire, sur les calendriers des Postes, distribués le premier Janvier par le facteur Olivier B. !!

Et dans des poses...à Saint-Tropez, parlez-moi d'une référence cul-turelle, qui ne cèlent rien de leur intimité ratiboisée et offerte au premier tocard venu !

Sachez Messieurs que votre persiflage ne saurait m'atteindre, dans les hauteurs où je respire!Oui,je vous regarde du haut de mes beaux étalons et de ma vertu sans faille.

Quant à vous, cher cousin, n'est-ce pas vous que j'aperçus tantôt au bras d'une gourgandine,nommée Alice, dont il m'a semblé que vous deviez la soutenir, et dont, parait-il, les charmes étaient sans égal ?

Pardonnez-moi, mais ce que j'en ai vu, car cette écervelée ne craint pas de s'exposer, m'a plutôt fait songer à une jument sur le retour, fourbue, défaite, la vue basse et dont la démarche m'a évoqué plutôt un percheron que "Une de Mai" !

Mais je vous laisse à vos libidineuses errances dans des clairs-obscurs glauques et des canapés Ikéa... mon palefrenier a sellé mon pur sang arabe, je vous quitte au galop, je suis déjà loin !

Unknown a dit…

Chère marquise de Beauregard, je me permets de vous rappeler, même si votre vie ne manque pas de selles, que les hauteurs où vous respirez embaument le N°5 de Cheval... et que je respire dans mes bas-fonds des fragrances sensuelles et envoûtantes de toutes ces intimités ratiboisées... c'est une question de nez !...
Votre dévoué Paul de Lorgnecul.

Patrick Mandon a dit…

La Beauregard est dans une agitation ! Elle m'envoie un poulet plein de fiel, écrit sur un papier aussi urticant qu'une botte d'orties. Tout cela parce que j'ai pris le parti de mon ami Paul contre elle, dans la querelle qui les opposait, relative aux femmes de vertu et d'ennui comparées aux filles tendres et dégourdies ! Est-ce ma faute si la Beauregard s'est réfugiée dans une posture altière de veuve prétendument inconsolable, voulant paraître vertueuse à force de vêtements de contention et d'exercices harassants ? Suis-je coupable de son isolement volontaire, qu'elle supporte si mal à ce qu'en dit sa camériste, récemment congédiée ? «Madame vit en reléguée mais pense en amoureuse. Elle brise, chaque soir, de rage et de dépit sensuel, tel vase que lui offrit feu son mari, lequel était bien brave, à la vérité. Il subit de son vivant sans jamais se plaindre l'humeur capricieuse et enfiévrée de sa belle marquise d'épouse, qui lui reprochait son peu d'empressement, son usure précoce et son manque de savoir-faire.». Elle rapporte encore que, lassée d'attendre de son faible conjoint l'assaut amoureux qui l'eut enfin laissée pantelante, elle aurait, un jour, lancé à son jeune et robuste palefrenier : «Il n'y a pas que les chevaux qui se montent ! ». L'autre, qui n'est point benêt, vit dans cette remarque ce qu'il fallait y voir : il l'avait déjà prise par la taille, et s'apprêtait à lui démonter comment, dans son village natal, pour reprendre l'expression dont il usa alors, «on selle les femmes et on les éperonne» ! Mais le brave marquis, déjà malade, goutteux et claudiquant, fit entendre son pas. Se ressaisissant, la marquise haussa la voix pour commander durement à son valet de «préparer Hercule (le nom de son cheval) pour une course dans la campagne, et de le placer près du perron». Puis, prenant le bras de son marquis, elle s'éloigna sans un regard pour l'«étalon» dépité. Quelque temps après, le mari rendait l'âme. La Beauregard congédia le palefrenier, le remplaça par un idiot contrefait, et porta un deuil qui ne la quitte plus.
Elle brise la vaisselle, lance les carafes contre les murs, bouscule son personnel de maison, hurle à la lune par la fenêtre presque chaque nuit. Il se murmure qu'elle commanderait des «articles de Paris», que les élégantes du faubourg Saint-Germain s'échangent en riant dans leurs salons. Il paraît que, l'autre matin, elle exigea que le jeune postier de la commune, joufflu, et ennuyeux comme un meneur de troupeau, vînt jusqu'à sa chambre lui porter son courrier ! Elle décommanda aussitôt ce souhait, mais vous imaginez que les bonnes et les valets l'ébruitèrent, en pouffant !
Le lendemain, elle se vêtit de bure et marcha sur du verre pilé, puis elle se rendit à confesse.
À la vérité, mon cher Paul, cette forteresse n'est nullement imprenable, mais il faut lui opposer les stratagèmes et la persuasion d'un Vauban. Je vous crois fort capable de la circonvenir ou de l'envahir, vous disposez pour cela de la ruse et de la force indispensables. Mais prenez garde, après que vous serez dans la place ! N'allez pas, comme vous en avez l'habitude, vous attarder auprès des jupons des cuisinières et des petites boniches ! La Beauregard pourrait bien vous pousser dans les oubliettes de son château !

Emilie a dit…

Là, c'en est trop, mon cousin !

Vous vous vautrez maintenant dans les ragots peu ragoûtants des domestiques ? Et puis, dites-moi, que faites-vous à rôder ainsi à l'office ? Trousseriez-vous ma camériste, culbuteriez-vous mes soubrettes, pour prêter aussi complaisamment l'oreille aux caquets et gloussements malveillants et stupides de mes gens de maison ?

Quant à Paul, savez-vous qu'il vient de me rétorquer avec beaucoup d'insolence et sans la moindre honte que si je me délecte de respirer, en haut, les effluves chevalins, lui se trouve plus heureux de renifler, en bas, les émanations et essences féminines, comment dire...sui generis ?!!!

Paul de Lorgnecul ! Il ne fait donc pas que les photographier et les coucher sur le papier !

Unknown a dit…

Paul de Lorgnecul est mort de rire dans ce délicieux après-midi de juillet !... il lègue toute sa collection de photos grivoises à la marquise Emilie de Ciboire et les adresses des modèles à son ami Patrick... Il compte sur la marquise pour ne pas l'oublier dans ses prières...

Patrick Mandon a dit…

Chère cousine,
Vous perdez votre sang-froid ! Je crains, ce soir, le bris d'une nombreuse vaisselle et, contre votre personnel, des mots blessants et des emportements. Je conclus de votre vivacité, que vous avez abrégé, aujourd'hui, votre course à cheval. D'habitude, vous rentrez de vos sorties «montées» quotidiennes épuisée, presque chancelante, mais apaisée.
J'épouse la cause de mon ami Paul, dites-vous ? La belle affaire ! Assailli, agressé en place publique par une marquise plus qu'énervée, et, par surcroît insulté, que penserait-on de moi si je l'abandonnais dans cette situation sans intervenir en sa faveur ? Et si je me suis acoquiné à lui, c'est que je l'ai trouvé assez coquin pour moi ! Il a parlé de «fragrances sensuelles et envoûtantes». Saurait-on dire mieux pour décrire l'adorable vertige qui saisit un homme amoureux, lorsqu'il se penche avec un peu d'attention vers son aimée ? Je ne vois là rien qui puisse offenser une femme intelligente. Si je comprends ce qui pourrait faire rougir une jeune fille pudique, en revanche,je ne m'étonne pas que la suave poésie de Paul lui attirent le courroux d'une bigote, d'une hypocrite, d'une délaissée, ou d'une cavalière insatisfaite…
Mais il me vient à l'esprit, tout soudain, que votre colère, votre vocabulaire outrancier, les excès et les débordements qu'ils occasionnent, traduit un trouble plus profond que vous ne consentirez à vous l'avouer…
Mon cher Paul, je vous le dis : la marquise est furieuse, elle crie qu'on l'assassine, elle se sent cernée, acculée, elle jette dans la bataille ses dernières forces, mais, ce tantôt, reconnaissant sa défaite, sa forteresse prise, elle se livrera à son vainqueur… Ne faiblissez pas, Paul : vous connaîtrez bientôt le prix de votre victoire !

Patrick Mandon a dit…

[…] votre colère, votre vocabulaire outrancier, les excès et les débordements qu'ils occasionnent, traduit […]

On lira «traduisent»

Emilie a dit…

Apaisée, dites-vous ? Ah, mais c'est trop fort, après ce que j'ai vu, de mes yeux vu cet après-midi ? Chancelante, oui, mais pas comme vous le croyez, mon coquin de cousin ! Et je verrai bien tout à l'heure jusqu'où vous pousserez votre art consommé du mensonge, car je me charge de vous confondre à l'instant, vous et vos comparses !

L'après-midi était chaude, mais l'air marin caressait agréablement nos peaux déjà bronzées, le long des chemins côtiers que nous avions choisi de suivre, moi et mon palefrenier Hercule (non, ce n'est pas le cheval, et c'est même un prénom très bien porté par ce garçon !). La côte, à cet endroit est sauvage et pleine de criques où l'on peut se baigner sans crainte d'être vu.

Eh bien, justement !

Je souhaite m'arrêter pour boire un peu, nous descendons de cheval. Soudain, nous sommes attirés sur notre gauche, en direction de la mer par des froissements de feuilles dans les buissons.

Intrigués, nous nous approchons, mais tout en restant prudents et en gardant nos distances. Nous pouvions voir sans être aperçus. Nous ne vîmes d'abord que deux jeunes femmes dans l'eau, à mi-cuisses, entièrement nues; je me signai aussitôt...et détournai les yeux... Mal m'en a pris ! Là, dans le buisson, trois hommes en embuscade, en train de contempler avec avidité les baigneuses !

Où étiez-vous cet après-midi, mon cousin ? Je vais vous le dire . Vous étiez là, dans ce buisson et avec qui ? Les deux Paul !

Le premier, Paul de Lorgnecul était armé de son habituel appareil à télé-objectif, et mitraillait les naïades, sans vergogne. Le deuxième, que nous connaissons aussi, Paul de Bitenfeult, avait sa combinaison du dimanche en latex et portait en bandoulière plusieurs objets en plastique multicolore, dont un, remarquable par sa couleur verte fluorescente, dont la forme m'a rappelé étrangement le légume que nous appelons en Provence, une cougourde ? A quoi cet objet devait-il servir, je l'ignore !Quant au troisième, je ne le reconnus pas tout de suite, mais j'observai son comportement : il prenait des notes dans un petit carnet. Mais oui, l'écrivain, c'était mon cousin Patrick !Qu'écriviez-vous, que prépariez-vous tous les trois ? Un article, un reportage pour Causeur, du genre qui fait de l'audience et si possible mille commentaires ? Le titre :"Pas de poils sous la burqa " ?

Je sentais mon coeur galoper, j'eus un éblouissement et...

la tête me tournit,
je chancela,
vacilla et tombis...bref j'en perdus la notion du présent et surtout du passé simple !

Patrick Mandon a dit…

Émilie, vous êtes donc l'un des travaux d'Hercule !
Cela dit, votre dernier billet est un bijou : les deux Paul et moi, dans les fourrés, trois voyeurs azuréens, les deux baigneuses nues, votre évanouissement… Quel touchant tableau d'une humanité gentiment crapuleuse.
Paul W., merci pour le legs de votre précieux et très riche carnet d'adresses…
Et puis, rentrant d'une délicieuse soirée, dans cette nuit parisienne un peu fraîche de juillet, je pensai à ce blog, et particulièrement à ce fil. Me revint alors un mot de Mae West, adressé à Cary Grant, dans «I'm not an angel». il l'invite à danser, elle se serre contre lui, puis elle dit :
«Vous avez un revolver dans la poche ou vous êtes simplement heureux de me voir ? »

Saul a dit…

le mot de Mae West me fait penser à celui de Richelieu, disant à je ne sais plus quelle comtesse ( ou duchesse ?)comme quoi elle ne le laissait pas indifferent :
"Madame, si ma robe était de bronze, vous entendriez sonner le tocsin "

( en gros, je n' ai plus la phrase exacte )

Emilie a dit…

Patrick, je comprends que vous ayez pensé à Gary Grant, c'est en effet un fil très dansant, "Ferveur" !

Commedia dell'arte, légèreté, futilité...ô volupté !

C'est Mae West, cette chipie, qui a dit aussi :"Quand je suis douce et gentille, c'est agréable, mais quand je suis vilaine, c'est encore meilleur." !

Saul, avec le cardinal, n'était-ce pas plutôt, une certaine marquise,veuve très prude et très bigote ? On raconte, que rougissante, interloquée, horrifiée par ces propos peu catholiques, presque s'étouffant, elle tourna les talons et quitta aussitôt la pièce !

Saul a dit…

Emilie,
oui c' est très possible, je ne me rappelle plus le titre exacte de cette dame. c' était au cours d' un banquet je crois.

dinez vous avec des cardinaux, Marquise ? XD

Emilie a dit…

A cause de certaines vapeurs d'hier, bien compréhensibles, ayant entrainé de sérieux troubles orthographiques, j'ai écrit "cougourde" alors qu'il s'agit d'une "coucourde", portée en bandoulière par l'individu latexé dont je répugne à prononcer le nom !

Oui, Saul, je dîne avec les cardinaux. Ma vie pieuse, mes oeuvres de charité m'y contraignent et je vous prie de croire que ce n'est pas toujours amusant ! Il n'y a que la foi qui sauve !

Patrick Mandon a dit…

Émilie est mise en émoi par la pourpre cardinalice. Habillez-vous en évêque, elle se mettra à vos genoux, en murmurant «Je suis la servante de Monseigneur». Et elle baisera votre anneau…

Mon cher Paul : si vous poussez un peu votre avantage avec Émilie, et si vous pouvez retrouver l'usage, pour quelques jours, de cette superbe piscine tropézienne qui nous a laissé un souvenir ému, je ne doute pas que la Beauregard vous y rendra plus d'une visite de courtoisie.

Unknown a dit…

Hélas, mon cher Patrick, la piscine tropézienne est de l'histoire ancienne... une histoire qui a mal fini !... un mauvais souvenir maintenant... Que voulez-vous, tout le monde n'a pas votre élégance, votre humour et vos bonnes manières... Mais, surtout, je ne veux pas piétiner vos plates-bandes, si j'ose m'exprimer ainsi, mais j'ai cru déceler chez notre chère marquise une irrésistible attirance pour son cousin... je suis certain que toutes ses petites agressions ne sont que provocations... Mais, peut-être, êtes-vous partous... pardon partageux ?...

Patrick Mandon a dit…

Cher Paul,
Je partage volontiers, en effet. Pour la piscine, j'ignorais qu'elle fût un aussi mauvais souvenir : gardez en mémoire les merveilleuses rencontres que vous y avez faites.
Mon cher Paul, je vous félicite pour vos brèves, toujours malicieuses et spirituelles interventions : que faisons-nous, tous deux, dans ce XXIe siècle ? Nous sommes du XVIIIe européen, entre Paris, Vienne, Prague, Venise ; nous fréquentons la canaille et le beau linge, nous poursuivons une conversation avec la marquise de B., que nous dûmes interrompre à cause du retour inopiné de son mari, et nous en commençons une autre avec l'adorable petite camériste qui nous fit les yeux doux, hier. Mon ami le prince de Ligne, nous invite tous deux en son château de Beloeil, dans le Hainaut : il possède le plus beau jardin du monde. Il m'a assuré que Casanova et l'exquis cardinal de Bernis seraient présents.
Demain, j'ai un duel avec ce faquin qui vous a reproché vertement votre goût prononcé pour les beautés exotiques. Lundi, je l'ai souffleté, demain je l'embrocherai. Ou je serai mort !

Patrick Mandon a dit…

Chère marquise de Beauregard,
Une erreur d'inattention vous a fait écrire Gary à la place de Cary Grant. Vous aurez confondu le beau Cary, né Archibald Alexander Leach et anglais, avec Gary Cooper, autre magnifique specimen de l'espèce humaine mâle.
Ni l'un ni l'autre ne sont connus pour leur qualité de danseurs…
Mais hier, vous étiez dans un tel état d'émotion, provoqué par le spectacle étourdissant que vous nous avez décrit, et dans lequel je me trouvai, que je peux comprendre cette petite erreur.
À ce propos, mon ami Paul B. et sa Catherine m'ont fait savoir qu'ils tenaient à votre disposition un catalogue complet de divers objets qui ont, semble-t-il, retenu toute votre attention.

Unknown a dit…

Mon cher Patrick, le propriétaire de la piscine est un mauvais souvenir... ou plus un souvenir du tout !... en revanche, les délicieuses créatures nues qui plongeaient dans ces ondes limpides, toutes ces sylphides sont gravées dans les pages secrètes de ma mémoire... et quelques soirs de pleine lune, au plus profond du bois qui jouxte le château, je hurle mon désespoir de ne plus les voir... Dans le duel qui vous oppose à ce faquin, je me propose d'être votre témoin et je vous l'album de mes bottes secrètes...

Unknown a dit…

et je vous confie l'album de mes bottes secrètes !... Moi non plus, je n'ai plus ma tête !!!

Emilie a dit…

J'ai été retenue aux écuries pour le travail d'Hercule, mon palefrenier,et je rentre fourbue!
Mais je prends le temps de vous répondre, mon cher Paul, de peur que vous ne vous égariez.

A propos de mon cousin, là où vous voyez provocation de ma part, il ne s'agit que de défense, croyez le bien.
Sachez que Patrick me poursuit de ses assiduités depuis toujours. Il a tenté de faire pression sur mon père pour que je n'épousasse pas mon premier mari, le comte de L'Ennuyade; il a eu le même comportement pour mon deuxième époux, le marquis de Carabas.
Pour vous prouver que je dis vrai, lisez donc son dernier ouvrage "Lettres à Marquise" et vous verrez que non seulement il prend un malin plaisir à dévoiler des pans entiers de ma vie, mais encore il invente mille folies qui sont la preuve que sa passion toujours déçue lui a dérangé l'esprit !

Voyez la suite.

Je voyage à Florence et je le croise au musée des Offices. Je me rends à Sienne et il me surprend chez un bouquiniste, Piazza del popolo. Je me trouve à Barcelone et il me bouscule sur la Rambla de Santa Monica ! Et avec cela, toujours aimable :" Bonjour ma chère cousine, mais quel heureux hasard !Permettez que je vous accompagne !"

Dernièrement, j'étais en villégiature à Nice où j'étais descendue à l'hôtel Negresco.Il m'envoie par son laquais, un billet que j'ai gardé, tant il est étrange: " Rendez-vous demain, au bout de la promenade des Anglais, au cadran solaire, à midi.
Sous le soleil exactement,
pas à côté,
pas n'importe où,
sous le soleil.
Exactement !"

Il ajoutait qu'il souhaitait m'entretenir d'une affaire concernant les terres de mon père, son oncle. C'était l'occasion d'une jolie balade devant la mer, j'y allai et y fus à midi, comme prévu.Il arrivait en sens contraire, je pouvais l'observer. Sa démarche laissait deviner son agitation,il approchait, je pouvais voir ses cheveux en désordre et quand il fut à ma hauteur, son regard ombrageux m'effraya. Il m'invita chez lui afin, dit-il, de me montrer des papiers importants...

Je suis malheureusement contrainte d'interrompre mon récit, mon cher Paul, Hercule vient de me prévenir qu'un de mes étalons est souffrant.
Mais déjà, vous pouvez vous faire une petite idée...

Unknown a dit…

Ma chère Emilie, ceci prouve tout simplement un désir fort et amoureux de la part de votre cousin Patrick... et, connaissant ses goûts pour les jolies femmes, je peux aisément vous imaginer caracolant, cambrée, les cheveux au vent, dans la lande sur votre destrier... Et, il est évident que nous envions tous ce prêtre qui vous a donné rendez-vous pour écouter vos confidences les plus secrètes... Est-ce que ces gens là connaissent leur bonheur ?... Mais, je suis un vieux renard avec un oeil vif, comme ceux que vous croisez dans cette lande, et je devine que tous vos griefs sont mouillés de tendresse... Vous joutez avec votre cousin dans l'espoir de tomber et dire : "tu as gagné, fais de moi, ce que tu veux...
Ce jour là, j'enfile une soutane pour vous entendre... c'est promis...

Patrick Mandon a dit…

Paul écrit : «[…] caracolant, cambrée, les cheveux au vent […]».
C'est très bien vu, cher Paul ; la marquise caracole, elle cherche à s'épuiser à cheval, à user la folle énergie inemployée, bien avant la mort et depuis le décès de son mari. Je l'ai connue adolescente, l'œil déjà de braise, un corps de statue antique, avec cela une audace, une insolence, un dévergondage. Au fond du parc, il y avait un grand cerisier. Il donnait, certains étés, d'énormes «cœurs de pigeon», gonflés d'un jus sucré, qui attiraient les maraudeurs. La jeune Beauregard venait me chercher, et m'entraînait vers le cerisier. Au pied de l'arbre, elle m'ordonnait toujours de la suivre. Elle saisissait les premières branches, se hissait, puis me faisait signe de venir. Elle portait toujours, dans ces occasions, une petite jupe plissée, des souliers noirs et des chaussettes blanches d'écolière pervertie. J'étais bien sûr contraint de regarder vers elle, ne fût-ce que pour empoigner la branche supérieure. Et, bien sûr, elle feignait de s'émouvoir et de se scandaliser, alors que sa position et ses manœuvres, m'obligeaient à fixer l'affolante perspective de ses jambes : «Ne regarde pas sous mes jupes, vicieux !», disait-elle en pouffant. Je rougissais, elle le savait : «Tu seras tantôt comme ces cerises !». Et elle riait de mon trouble comme de son esprit de débauche !
Ah mon cher Paul, vous l'avez démasquée, elle n'a pas de secret pour vous, et vous connaissez si bien les ruses sensuelles des femmes !
Une chose encore, Paul : je vous sais grand coquin, amoureux toujours, expert en jeux de mains si peu vilains, rusé d'amour, aimant à prendre langue, et friand de toutes les choses qui réjouissent un honnête homme solidement bâti par surcroît ; je n'ignore pas que vous êtes un explorateur, un savant, un expérimentateur dans les figures du désir, mais j'ignorais que vous aviez poussé la curiosité jusqu'à «enfiler une soutane» !

Emilie a dit…

Tant de mensonges me coupent le souffle ! Le cerisier ? Mais c'est Patrick, qui, profitant de ma candeur m'invitait à y grimper, prétextant qu'étant plus légère que lui, je ne risquais pas de casser les branches !
Vous voyez bien mon cher Paul que j'ai raison et que mon cousin n'est qu'un pervers (polymorphe) !

Mais je vois qu'à tant lorgner les corps féminins, vous avez appris à connaître les âmes dont ils sont le doux écrin.Vous évoquez ces femmes qui souhaiteraient capituler devant plus fort et meilleur qu'elles, être domptées, en somme.

Ce sont en effet des êtres que la nature a choyés. Elles ont de l'esprit, de la fantaisie, du caractère et sont agréables à regarder. Et elles paraissent si fortes ! Les femmes les jalousent; les hommes les convoitent, mais la plupart en ont peur.Oui, ces indomptables effraient : elles paraissent encombrantes, elles peuvent faire de l'ombre. Alors, le sachant, elles se prêtent et se laissent aimer un temps. Car elles ne peuvent s'offrir qu'à celui qui saura découvrir ou faire renaître en elles, pardonnez mon lyrisme d'un autre siècle, cette petite fille qui tremble et pleure que des bras forts viennent l'entourer, et qui vous colle au coeur son sein égratigné et ses yeux, aux étoiles !

L'une d'elles, de mes amies, m'a confié qu'elle désespérait de rencontrer un jour " l'homme dont le regard vous dit qu'il est celui qui peut vous aimer tout en vous respectant, qui sait vous chérir sans vous flétrir, et qui vous adore sans vous incarcérer."

Je plains bien volontiers ces femmes-là, en pensant à ces mots de Somerset Maugham :"Pourquoi les femmes charmantes épousent-elles toujours des hommes insignifiants ? Parce que les hommes intelligents n'épousent pas les femmes charmantes !"

Alors, mon cher paul, Dieu me garde de vouloir leur ressembler et puis, entre mes prêtres et mes chevaux que ferais-je d'un homme ? Comme mon aïeule, la "de Clèves", je me garde des tourments de la passion et n'éprouve pour ce cher Patrick, votre ami (dans la débauche aussi ) et mon cousin, qu'une tendresse (je sais bien que ces mots vont le rendre furieux et qu'il va redoubler de sarcasmes!)pleine de sollicitude, cousinitude et indulgence, car vous le savez, les débordements de sa vie dissolue, les déséquilibres de ce garçon qui, je le sais, se vautre dans le stupre, me désolent et déplaisent hautement !

Patrick Mandon a dit…

Le cerisier ? Vous me précédiez toujours dans son ascension, toujours ! Et, comme je n'étais pas si dégourdi, et vous plus habile, vous m'accabliez de vos lazzis : «Ah, mon joli cousin ! Si vous grimpez aussi mal les filles, vous ne leur ferez jamais atteindre à la cime !» Vous aviez quinze ans, et je rougissais comme un jeune marié d'Ancien régime. La même année, alors que je prenais tous les risques pour saisir des cerises à l'extrémité d'une branche trop fine, et que je ne ramenais que les fruits, vous eûtes ce mot, dont la la trivialité faillit me faire chuter : «Ah ça mais, cousin ! N'irez-vous pas me les cueillir avec la queue !».
Voilà les faits, cousine, et je vois bien que vous continuerez à propager votre mauvaise foi et vos arrangements de vérité comme il vous plaira. Quant à moi, je crois que Paul n'est pas loin de dire la vérité quand il prétend que vos cercles à cheval ne sont que feintes d'éloignement, mais qu'à la vérité ils vous rapprochent de plus en plus de votre cousin…

Unknown a dit…

Mais c'est merveilleux de vous entendre, pardon, de vous lire, de parcourir vos pages de souvenirs... je vous imagine sur la même branche, les bouches pleines de jus de cerises, les doigts barbouillés de plaisirs et le sol, sous vos pieds, jonché de noyaux et de queues vertes... Comme je vous envie ces intimités sous le feuillage, ces cueillettes de fruits, ces gestes de gourmandises exquises et ces escalades pleines de surprises... Un peu de franchise... toutes ces petites agaceries traduisent une secrète et sensuelle nostalgie... qui ne demande qu'à faire surface !... qui ne demande qu'à remonter sur la branche... Mais, si d'aventure, vous retourner sur les lieux et que les cerises sont rouges, s'il vous plaît, chère Emilie, laissez-vous faire la courte-échelle parce qu'il n'est pas élégant pour nous, les garçons, de monter pour vous tirer...

Emilie a dit…

Je vous prends à témoin, Paul, même si pour soutenir votre ami, vous vous faites parfois aussi vulgaire que lui.

Enfilez la soutane, vous allez m'entendre !
Sachez qu'à travestir la vérité et me faire passer pour une ingénue perverse, Patrick montre une habileté démoniaque ! Sauf qu'à l'époque du cerisier, votre Patrick, plus âgé que moi, écoutait des musiques de sauvages, des rythmes de blousons noirs, bref, versait déjà dans la vulgarité, tandis que moi, loin de tout ce vacarme, je vivais dans les dictionnaires, je traduisais avec ferveur, Cicéron et César, Thucydide et Homère, je découvrais la poésie romantique et me prenais de passion pour Racine.

Comment aurais-je pu avoir à l'esprit cette plaisanterie de soudard (dont il est l'auteur) sur la queue des cerises, que, d'ailleurs, je n'ai pas comprise alors ? Pour moi, seuls, les cerises, quelques fruits et légumes, les chiens, les chats et beaucoup d'animaux en avaient une.

Et comme il aimait se jouer de mon innocence et de ma pureté, chaque fois qu'il le pouvait !

Un jour de juillet, par un été torride, nous nous étions réfugiés tous deux dans la bibliothèque du château, à l'ombre fraîche des murs de pierre. Patrick, désoeuvré, comme toujours, s'était avachi dans un fauteuil, fumant une Dunhill et sirotant une menthe à l'eau. Il me regardait lire mon cher Racine, assise en face de lui, vêtue d'une robe blanche légère et décolletée.

Soudain, avec l'air de celui qui veut s'instruire et s'intéresse à mes études, il dit :"Sans vouloir vous déranger, chère cousine, vous avez, parait-il, de magnifiques Robert, voulez-vous bien me les montrer ?"

Surprise, mais au fond, tout peut arriver, je le pense touché par la grâce. Peut-être est-il pressé de découvrir le fascinant trésor de la langue française, caresser la rondeur de ses mots, découvrir leur saveur, ou encore se familiariser avec la géographie des plaines et des monts, que sais-je encore !

Je me levai aussitôt et pris sur les rayons, celui des noms propres et celui des noms communs ....J'entends encore son rire sardonique emplir la vaste bibliothèque !

Je ne m'étonne donc pas qu'aujourd'hui ce vicieux, ce bringueur,lorgne et louche, tous azimuts, l'air hébété, sur vos photos de nus aux monts chauves et déforestés !

Patrick Mandon a dit…

La marquise, au comble de la fureur, s'égare et rapporte une histoire à la manière d'un trafiquant de faits et d'effets. Elle nous affirme qu'elle traduisait «avec ferveur, Ciceron et César, Thucydide et Homère» ! Mais c'est à se rouler par terre en implorant la vengeance du ciel ! Mes dons naturels en latin (tous mes premiers prix, conservés, en témoignent), mon aisance à me jouer des difficultés de cette belle langue, que je pratique toujours presque quotidiennement, m'a fait plus souvent qu'à mon tour prendre en pitié l'air ahuri de ma cousine, tirant la langue et suant à grosses gouttes devant tel discours de Ciceron, ou ânonnant sans la comprendre telle longue description extraite de IVLI CAESARIS COMMENTARIORVM DE BELLO GALLICO (je suis certain qu'elle pâlit à l'évocation de ce seul titre).
Pour me venger des humiliations qu'elle avait coutume de me faire subir quotidiennement, dans les choses de la vie et du corps (cf le cerisier), j'avoue que je me plaisais à observer à la dérobée son visage aux expressions ahuries, de terreur morale, d'anéantissement intellectuel qu'elle présentait dans ces moments. Je la voyais littéralement se transformer. D'arrogante, méprisante, cruelle, elle devenait humble, perdue, égarée. Ne voulant pas s'humilier à m'appeler à l'aide, elle feignait de chercher et d'improviser une traduction. Je m'approchais alors, et je découvrais de vagues mouvements de crayon qui ne signifiaient rien.
-«Il semble que ma cousine souffre sous Cesar.»
-«Je ne souffrirai sous aucun homme !» hurlait-elle.
-«Souffrez au moins que je vous aide.»
Je parcourrais rapidement le texte puis, comme en me jouant, sans réfléchir plus que cela, sans hésiter, je lui dictais une traduction qu'elle s'empressait de noter avec un zèle et un soulagement qu'elle ne parvenait pas à dissimuler, quoiqu'elle en ait…
Vous souvenez-vous, cousine Beauregard ? : «Id hoc facilius iis persuasit, quod undique loci natura Helvetii continentur: una ex parte flumine Rheno latissimo atque altissimo, qui agrum Helvetium a Germanis dividit; altera ex parte monte Iura altissimo, qui est inter Sequanos et Helvetios; tertia lacu Lemanno et flumine Rhodano, qui provinciam nostram ab Helvetiis dividit»
Pour vous, c'était du chinois, pour moi c'était d'abord du latin que je changeais en français impeccable. Que de belles notes vous me devez dans cette matière. Au reste, si je me souviens bien, à l'exception de la gymnastique et de la couture, vous ne brillâtes point…
Alors, j'en viens à l'épisode des dictionnaires. Dans mon souvenir, vous vous approchez de moi, et vous me proposez de me montrer un peu plus que ce que votre décolleté dévoilait. Or, j'ai répondu, et vous en fûtes déconfite et profondément vexée :
-«Non merci, je ne consulte jamais le petit Robert, je préfère les gros Larousse !»
Vous conviendrez que par votre attitude mensongère, vous m'avez contraint à révéler ce détail, au risque de blesser profondément ma morale et ma courtoisie habituelles de gentilhomme.

Emilie a dit…

Non solum comicus et vanus es, sed etiam mihi in odium venis !

Vous avez conservé le Gaffiot, champion ? C'est facile mais je ne sais si vous y arriverez !

De quels prix parlez-vous ? Les miens sans doute, car c'est vous qui tiriez la langue sur le Bellum Gallicum, pourtant facile à traduire ! Vous avez perdu la raison, vraiment ! Les seules récompenses que vous ayez eues, ce fut un accessit, le deuxième (et, hélas dernier), en technologie pour la construction, ( travail besogneux d'une année !) d'une grossière maquette d'avion de 30 cm en carton et aussi un accessit en sport, qui venait récompenser, quoi d'étonnant, vos talents de coureur et de sauteur ! Tandis que moi, mon cher, souvenez-vous, je caracolais (déjà !)en tête, partout : français, version grecque, version latine, maths et décrochais régulièrement la timbale du Prix d'Excellence, récompense suprême !

Vous en avez toujours pris ombrage, ce qui explique votre besoin de bomber le torse aujourd'hui, comme celui de réécrire l'histoire pour me faire du mal et tenter de m'humilier, puisque vous n'avez jamais pu m'épater.

Je maintiens également ma version de l'histoire en ce qui concerne les Robert. Votre dépit, votre amertume vous font oublier sans doute, qu'on me surnommait, ma pudeur et ma modestie dussent-elles en souffrir,et puisque vous m'obligez à le dire : "double obus" ou "le canon"!

Patrick Mandon a dit…

Certes, ma cousine, certes ! Mais votre réponse est de dépit, quand mon billet était d'esprit…
Je ne reprendrai pas tout dans le détail cela serait lassant. Néanmoins, vous me parlez de canon ; celui qu'on surnommait «La petite Bertha», sans douté ! Quant à «double obus»… J'ai le souvenir de deux petites grenades, pleines de pépins. Me serai-je trompé de cousine ?

Emilie a dit…

Vous vous consolez comme vous pouvez, mon cher cousin, et l'amnésie a bon dos !

Evidemment, pendant que les petites pointures comme vous se chargeaient du banal déminage de bombinettes de prisunic en kit prêt à démonter, c'est à un commando de choc, expert en explosifs que revenait le périlleux assaut des deux Canons de NA-VA-RO-NE !!!!

Patrick Mandon a dit…

Mon cher Paul,
Ma cousine Émilie nous apprend que quelqu'un s'est chargé de ses «canons de Navarone». Fort bien ! Quand on sait comment l'affaire s'est terminée pour les fameux canons, nous voilà débarrassés de cette périlleuse mission…

Emilie a dit…

La Marquise fait savoir à son cousin Patrick et à son ami Paul que le fou-rire l'empêche d'écrire, mais qu'elle reviendra.

Sa camériste,Pimprenelle

Unknown a dit…

Mon cher Patrick, ce commando de choc n'a déclenché que des fous-rires !... Après votre message, je m'apprêtais à décharger le bazooka, mais je pense qu'il faut rester vigilant... les obus de Navarone sont toujours pointés sur nous... et malgré votre sous-estimation sur la situation, je pense que nous ne sommes pas trop de deux pour investir cette place...

Patrick Mandon a dit…

Voilà que ma cousine, une fois de plus acculée, égarée, cherchant des repères qui s'éloignent devant sa course affolée, masque sa déroute par un fou-rire ! Restons sur nos gardes, en effet, Paul, mais retenons que la place fut prise, conquise, soumise.

Emilie a dit…

Mon cher Paul, votre avant-dernier message me permet de rebondir sur le sujet initial : vos photos.

Attention à l'escalade !

Je schématise un peu, mais c'est pour être plus explicite. La prétérition est au style ce que le clair-obscur est à la photo. Vous savez, cette figure de style qui consiste à prétendre ne pas vouloir dire (ou montrer)tout en disant. C'est bien ce que vous faites ( même si c'est pour provoquer ) :"je n'ai pas dit que...;" mais vous le dites quand même. Vous ne voulez pas être vulgaire, mais vous l'êtes malgré tout, en toute innocence, puisque protégé par la négation.Et au fond, n'en va-t-il pas de même pour vos photos ? Les précautions oratoires ne sont que masques et paravents qui ne gardent pas de la chute dans le vulgaire.

Méditez cela mon cher Paul et ne vous étonnez pas d'offusquer une Marquise de Beauregard, habituée aux égards !

Toutefois, votre remarque m'a semblé bien présomptueuse, mais en cela rien de surprenant : nous savons toutes que les hommes réduisent leur virilité à la taille de leur appendice caudal, ce qui nous fait pouffer entre nous (les femmes ) à tea time !

Sachez aussi que l'on n'a pas besoin d'arbitre, lorsqu'on joue réglo et exclusivement avec un chevalier, un honnête homme !

Notez que je vous pardonne bien volontiers vos écarts de langage, sachant que vous êtes habitué à vous adresser à vos "modèles" !

Unknown a dit…

Chère Emilie, Marquise de Beauregard, je me permets de vous dire que vous portez bien mal votre nom ! Votre oeil est malade et gangrené par trop d'éducations religieuses, vos jugements sont faussés par une mauvaise perception des images... Prenez la peine d'enfiler vos lorgnons ou de réajuster votre monocle et vous constaterez que les photographes, comme moi, travaillent dans la nuance... que l'écriture de nos instantanés se conjuguent en ombres et en lumières, en indiscrétions et en "bougés"... Et, que nous ne sommes que les témoins et peintres de la réalité toute nue... J'ajoute que je ne me permets pas de jugement sur ce qui est vulgaire ou non, c'est une question d'appréciation très personnelle... Et aussi, pour revenir à mon rôle d'arbitre, en bon photographe que je suis et contrairement à ce que l'on raconte dans les textes religieux, je ne crois que ce que je vois... Je vous engage d'ailleurs à en faire autant et à ne pas vous perdre en éventuelles et utopiques dimensions sur les choses que vous avez abandonnées depuis trop longtemps... Le tea time entre copines bigotes c'est bien... mais pour ma part, je vis intensément et passionnément mes 5 à 7 en clair-obscure... Je vous pardonne aussi...

Unknown a dit…

Ah, j'oubliais... Chère Emilie, comme il n'est pas du tout dans mes habitudes de céder à la vulgarité et que les exemples dans ces domaines ne sont pas nécessaires entre nous, je tenais à reprendre cette expression grossière "ma bite etc..." J'ai parlé à Patrick pour voir s'il pouvait modifier ce malentendu... et lui ai proposé : "ma batte entre vos mains" et je sais que, sportive comme vous l'êtes, vous préférez cette image... Mes hommages du soir...

Patrick Mandon a dit…

Paul a, de lui-même, voulu supprimer son message malicieux, dont un passage aurait pu blesser les oreilles chastes ou simplement bien élevées. Je l'approuve entièrement, et j'ajoute que cet homme, qui vit entouré des plus beaux modèles du monde, est un parfait gentleman quoique le plus coquin d'entre nous.
À l'attention particulière de la marquise de Beauregard, je veux rappeler l'essentiel du propos de Paul, qui disait, dans ce message :
«[…] mais jamais, dieu m'en garde (et voilà que je tombe dans vos expressions !), je n'ai utilisé de tels mots... moi, qui suis sous le charme, qui respecte votre personne et vos écrits... moi qui me roule dans vos syllabes et me vautre dans vos paragraphes... Non, jamais, je ne tremperai ma plume dans la vulgarité... Et même, s'il m'arrive d'argumenter en faveur de mon ami Patrick (solidarité masculine oblige), je ne me permettrais pas de charger un "canon" tel que vous !... En revanche, je vous envie vos souvenirs, vos années-découvertes de cousin-cousine, vos journées de compétitions studieuses, vos études du Robert... et là, j'aurais adoré jouer l'arbitre dans vos récréations...».
J'ajoute que, dans les courriels privés que Paul m'adresse, il me fait part de son grand plaisir à intervenir dans ce blog et ne tarit pas d'éloge sur le style et l'esprit de la marquise.
Paul est un délicieux ami, un amoureux des dames, un seigneur du XVIIIe siècle égaré dans notre millénaire hypocrite et menteur. Je le remercie de son élégance, l'invite à déjeuner, et organiserai prochainement en son honneur une soirée de fête et de réjouissances.
Je l'invite également à continuer sans vergogne, mais avec sa légèreté coutumière, à «agacer» la Beauregard.

Emilie a dit…

Mon cher Paul,

Un peu lasse des chevauchées éreintantes dans la guarrigue et des coups de cravache, je suis descendue de mon cheval. Et je vois bien, à sa façon de remuer la queue, qu'il est content de goûter ce repos bien mérité !

Ainsi donc, après confesse et une séance de mortification, courte mais obligatoire, me voilà partie à la plage, à pied. Une méditation romantique et pieuse devant la mer qu'on voit danser le long des golfes clairs, loin des harcèlements de mon cousin, les cheveux dans le vent, ma robe de bure déboutonnée, ma peau (une partie seulement !) offerte au soleil, voilà qui me ferait le plus grand bien !

J'étais donc là, sur le sable mouillé, regardant tour à tour le ciel et la mer, éperdue, l'esprit noyé dans tout ce bleu, ravie d'entendre les cris joyeux des enfants se jetant à l'eau et les vociférations des mouettes. Comme on devait être bien là-haut ! Je les suivais des yeux, avec elles je sillonnais l'azur et l'immensité profonde, j'étais un oiseau, presque un ange aux ailes de gaze et de soie, je volais dans les espaces limpides, je comprenais le langage des fleurs et des choses muettes et même celui des mouettes ! Oui, mon cher Paul, n'allez pas croire que je galège ou que j'ai perdu la raison, mais j'ai compris qu'elles s'adressaient à moi, elles pointaient leurs becs dans ma direction, oui, les mouettes me parlaient, c'était un prodige, l'oeuvre de Dieu !

YAOL... YAAUL..YAUL, YAUL...PAUL?? PAUL !!!
Oui, je jure, Dieu m'en soit témoin, je jure qu'elles ont crié, crié "PAUL " pour qu'il revienne. et j'ai pleuré, pleuré, oh ! j'avais trop de peine. Je me suis assise près de son âme, mais le bel homme s'était enfui, je l'ai cherché sans plus y croire... Dans cet orage il avait disparu !

Patrick Mandon a dit…

La marquise entend le chant des mouettes ! Bientôt, elle entendra des voix, qui lui diront de montrer ses dictionnaires à tous les passants «afin qu'ils voient et croient».
C'est une épistolière de première force, une grammairienne sûre, une cavalière émérite, une femme enfin !

Unknown a dit…

Très chère Emilie, vous avez donc rencontré mes mouettes... me voici soulagé !... elles vous ont retrouvée, toute seule sur cette plage, toute seule aussi sage... J'étais inquiet ! et j'ai, pardonnez-moi, demandé à tous mes amis... des nouvelles de vous... Aussi, ne vous étonnez pas, demain matin, lorsque vous chevaucherez dans la lande, d'entendre les lapins et les lapines, les souris et les mulots, les hérissons et les hérissonnes vous crier "Paul... paul... paul"... Même les taupes, modèle de discrétion m'ont promis de hurler mon nom !... Seule la chouette qui habite sous la charpente m'a promis de ne pas crier... mais comme elle insistait un peu, je l'ai autorisé, ne vous en déplaise, de susurrer, cette nuit, ces quatre lettres à vos oreilles... Comment ?... je monopolise beaucoup de monde pour vous retrouver... Mais c'est parce que vous le valez bien...

Patrick Mandon a dit…

Paul est revenu, l'homme d'esprit, le charmant coquin, le galopin de Paris et des Îles. La Beauregard, notre Walkyrie provençale, est une wagnérienne convaincue. Et voyez le peuple des animaux, qu'il a convoqué, afin qu'il porte jusqu'à vous le doux prénom de Paul. Ah, marquise, que de servants pour vos charmes, que d'admirateurs, que de bras solides pour vous porter (je n'ose dire vous étreindre, ou alors en camarade)!. Vous êtes la plus admirée, la plus convoitée des provençales austères. Que diront vos commères ?

Emilie a dit…

Eh bien, bonjour mon cher Paul ! Avez-vous vu l'heure ?

Vous m'honorez et vos hommages animaux et matineux me sont allés droit au coeur ! Mais vous n'imaginez pas comme ils furent bruyants ! Sans doute vos bêtes me crurent-elles sourde ou dormeuse comme loir, car dès potron-minet, dans un excès de zèle, elles vinrent me donner l'aubade jusque dans la cour du château, transformée, pour le coup, en arche de Noé ! Quel orchestre ! Quel assaut ! Quel tintamarre ! Comme dirait notre ami Rimbaud, nulle Marquise ne subit tohu-bohu plus triomphant ! Et mes chevaux qui se joignirent au concert et leur donnèrent la réplique en hennissant leur bonheur !

Je fus contrainte de descendre, à peine et vite vêtue, Dieu me pardonne, pour les saluer et prier mes gens de nourrir la ménagerie.

A peine avais-je franchi le seuil du perron que je fus éblouie par la lumière d'un flash ! Le coquin de photographe que vous ne cessez d'être, pour éterniser l'instant de notre réconciliation avait confié son objectif au plus dégourdi et au plus rusé de la meute, le renard, qui fut bien prompt à faire sortir le petit oiseau et à fixer sur papier glacé mon ramage et mon plumage dans leur désordre matinal !

Je vous en prie, que cette photo ne reste qu'un amical souvenir. Je vous défends bien de la joindre à vos albums infestés de créatures immorales, luxurieuses et déchues, posant alanguies dans le plus simple appareil, ni même à votre collection de drôlesses harnachées de plumes ( partout, quelle horreur !) comme des chevaux de cirque ! Et surtout, ne la montrez pas à mon cousin !

Avez-vous vu qu'il est encore là pour m'empoisonner ? Et comme il est studieux ! Il cherche encore mes dictionnaires ! Je ne jurerais de rien, mais je flaire qu'il est entré en jalousie de vous !

Ma foi, nous verrons bien ce qu'il fomente encore de machiavélique !

Il fait très beau, mon cheval est sellé et Hercule m'attend. Je vous salue bien affectueusement.

Patrick Mandon a dit…

La Beauregard est plus redoutable qu'une pensée politique de Machiavel. Elle sème la zizanie entre deux amis sans qu'il y paraisse. Elle prétend que je deviendrais jaloux de Paul, après m'avoir reproché de la délaisser ! Mon cher Paul, elle vous montrera une griffure que lui aura occasionnée une branche, et vous affirmera que je l'ai violentée. L'instant d'après, elle se précipitera dans ma chambre, les cheveux défaits, la mise en désordre, et feindra le plus grand affolement : «Ah mon cousin, protégez-moi ! Votre ami Paul a voulu me faire subir les derniers outrages. Je ne me suis arrachée à son étreinte de gorille en rut que par miracle. Dire que je lui accordais toute ma confiance ! Songez, cousin, que je l'avais fais mander dans ma chambre pour connaître son avis sur la couleur des bas que je portais. C'est en me tournant pour lui montrer l'effet qu'ils produisaient à la naissance de ma cuisse, que j'ai senti son souffle odieux et ses mains brutales enserrer mes hanches ! J'ai réussi à lui échapper, pour me placer sous votre protection. Voyez par vous même dans quel état je me trouve. Tenez, ces beaux sous-vêtements, cette guêpière en dentelle, ce bustier ouvragé, ces bas de soie noire que j'ai choisis dans le catalogue de vos amis Catherine et Paul B., voyez vous-même mon cousin, touchez ce délicat travail, voyez comme tout cela vient couvrir comme un voile pudique ma peau ambrée ! Approchez, mon cousin, approchez ! Ah, vous êtes plus timide que votre brutal et concupiscent camarade, le photographe vicieux ! Gardez-moi auprès de vous, cher cousin. je me glisse dans votre lit, tout contre vous, afin de retrouver un peu de calme et de sécurité. Je suis encore bouleversée !»…
Je vous confierai prochainement la suite de cette affaire, et les manœuvres auxquelles ma cousine à recours afin de rompre notre vieille amitié.

Unknown a dit…

Je vous rassure, mon cher Patrick et reviens vers vous dans un instant, mais permettez-moi cette parenthèse, j'ai un petit message pour votre cousine la Marquise...
Chère Emilie, je suis confus ! Vous réveiller de bon matin... toutes ces bêtes qui vous prennent au saut du lit ! sans même vous laisser le temps d'enfiler une robe de chambre... Il n'y a vraiment que les escargots et les tortues qui savent attendre... Et, pardon aussi pour Goupil qui m'a bien remis ce que vous savez... là, je parle tout bas pour vous dire que les photos sont chez moi, enfermées et ne seront jamais divulguées... vous avez ma parole... Mais, si je peux me permettre, la bise fraîche et indiscrète du matin a bouleversé les pans de votre chemise et, bien malgré moi, j'ai jeté un regard admiratif sur les obus de Navarone !... et, je dois vous l'avouer, j'ai capitulé... En vieux militaire, je vous rends les honneurs, au garde-à-vous dans ma capote... Devant de telles armes je vous remets mon épée...
Voilà, je vous souhaite une délicieuse journée...
Mon ami Patrick m'attend pour m'entretenir d'une petite agression parait-il...
Mon cher Patrick, me voici de retour... Comment ?... c'est stupéfiant, ce que vous me racontez !... je pense que la Marquise a inventé cette histoire pour vous rendre jaloux !... pour mieux se glisser dans vos draps... Et surtout, me comparer à un gorille !... Brassens va se retourner dans sa tombe sans même toucher des droits d'auteur... En revanche, je vous envie quand même... Emile de Beauregard dans votre lit !... et là, c'est mon petit doigt qui le dit : Les canons ne sont pas une légende...

Patrick Mandon a dit…

Mon cher Paul,
Merci pour les photographies. Oui, en effet, Navarone, canon, obus, tout cela convient à la description de la personne.
Je comprends mieux pourquoi, parlant d'elle, un gaillard de Provence, un nommé Hercule Poireau, solide et rustaud, une espèce de sanglier au poil dru, me fit la confidence qu'elle avait eu pour lui «des douceurs». Puis il ajouta, comme pour balayer la réputation d'austérité de la dame en question : «Avec elle, pas d'hésitation, faut aller droit aux buts». Et il accompagna ces deux derniers mots d'un geste ample des deux mains sur sa poitrine…
Il s'éloigna, en chantant à tue-tête un air militaire, avec des paroles très osées, dont le refrain disait :
«C'est bien vrai, t'as pas la berlue,
Te voilà transporté aux nues
Dans c'cas-là, faut pas êt'obtus,
Faut charger c'te bell' pair' d'obus»

Unknown a dit…

Mon cher Patrick, ne me dites pas : "merci pour les photographies" !... vous me mettez dans un immense embarras !!!... J'avais promis à la Marquise... Se peut-il que Goupil vous ai fait un double ?... Oh, le traître de renard !... Comment vais-je expliquer cela à la Marquise... Pourvu qu'il ne les cède pas à tous ces magazines à scandales... Et puis, vous en rajoutez... vous me dites, mon cher Patrick, que nous avons un concurrent !... ce Poireau qui a déjà investit la place ?!... La journée finit mal...

Emilie a dit…

Mon cher Paul,

Pardonnez-moi de vous donner une réponse si tardive. Mais à la lecture des divagations ignominieuses de mon cousin, j'ai tout à fait défailli, croyant perdre souffle et raison. Le médecin a été mandé et devant l'apathie mélancolique qui s'est emparée de moi, m'a ordonné de garder la chambre quelques jours.

En cette minute, je peux à peine parler, mais sachez que le feu de mon courroux n'est pas près de s'éteindre, et que, dès que mes forces me le permettront, je me charge de vous éclairer. Juste un mot avant de retrouver ma chaise longue : je ne connais pas d'Hercule Poireau. Vous savez bien que mon palefrenier se nomme Hercule. Je vois là encore une marque de la malveillance diabolique de mon cousin. Il sait très bien que ce pauvre garçon, touché dans ses chairs dès l'enfance, à la suite d'un accident de cheval, une mauvaise ruade, ne peut plus espérer ni connaître une femme au sens biblique du terme, ni fonder une famille ! Alors "poireau", n'est-ce pas vile moquerie , basse félonie ?

Pour le reste, mon cousin, grand rêveur s'il en est, nous a peint un tableau où se révèlent les plus odieux de ses fantasmes qu'il semble, malheureusement pour moi, confondre avec la réalité ! Il faut dire qu'il s'enivre avec mes valets et fait l'agréable auprès des femmes de chambre, divertissements guère propices à le conserver: "mens sana in corpore sano" !

Je n'en dirai pas plus, car je suis épuisée, mais je vous réserve le récit complet des faits dans mon prochain courrier.

Je vous quitte bien vite, ma tisane est sur le point d'être trop froide .

Unknown a dit…

Ma très chère Emilie,
Pardonnez-moi, j'étais moi-même parti par monts et par vaux, à la recherche de ce traître de Goupil... pour lui demander des explications et, par la même occasion, réparation !... Il est rusé, ce petit gangster, mais pas très courageux !... un instant, je me suis laissé étourdir par un flot de paroles... un vrai roman ! Mais tout est bien qui finit bien, j'ai récupéré vos images... Et sur le chemin du retour, je songeais à ce que j'allais vous dire "Tout va très bien, Madame la Marquise, tout va très bien, tout va très bien"... Mais cependant, il faut que je vous dise que je suis contrarié et inquiet pour votre santé ?!...
Vous, si gaillarde sur vos montures, vous voilà fragilisée !... Si je n'étais pas ce pauvre photographe libertin, débauché et irrécupérable, j'irais jusqu'à l'église, prier pour votre santé... mais j'ai confiance, votre silhouette fière et altière, chevauchant votre destrier, va rapidement reprendre sa place dans les tableaux de la Garrigues au petits matins...
Merci, vous me rassurez aussi... franchement, je ne vous imaginais pas avec ce Poireau !...
Surveillez bien votre température, je vous souhaite un prompt rétablissement... Votre dévoué Paul

Patrick Mandon a dit…

Ah, cher Paul ! Je vous reconnais bien dans votre dernier billet. Par devant, le charmant garçon, près à ouvrir sa bourse (!) pour venir au secours d'une femme riche, par derrière, le coquin de la lande et des bruyères, faisant affaire avec Maître Renard, tout en feignant de récupérer des clichés compromettants. Mon cher Paul, une vieille amitié nous unit, et rien ne pourra l'ébranler, mais permettez-moi de sourire quand je lis votre dernière adresse à la marquise de Beauregard. À l'heure qu'il est, vous devez être en possession de la somme que j'ai remise à Goupil en échange des doubles des photographies de ma cousine, prises à la volée, alors qu'elle se présentait presque nue pour entendre le fameux concert des animaux.
Cela dit, ami Paul, les documents sont d'une excellente qualité et je ne regrette pas le coût excessif que vous m'en avez demandé.
Si marquise rime avec banquise, baronne se fût parfaitement accordé à Navarone…

Unknown a dit…

Mon cher Patrick, je tombe des nus, pardon, des nues... Je suis stupéfait !... Ce renard n'est qu'une hyène !... il ne m'a remis aucune somme et je n'ai jamais été acoquiné à ce triste sire !... Nous voici trois victimes de cet escroc, la Marquise, vous et moi !... Et, impossible de le rattraper maintenant... Je suis arrivé à lui reprendre quelques photos, juste avant son départ pour les Bahamas... Mais, au fait, comment un renard peut-il se payer les Bahamas ?... Vous lui avez sûrement versé une somme conséquente ?... Si la Marquise apprend cela, sa santé ne va pas s'arranger... Il faut absolument, mon cher Patrick, que ceci reste entre nous... et d'ailleurs... tout à fait, entre nous... comment avez-vous trouvé ces clichés ?... excitants, non ?... Ah, je voulais vous dire aussi... Ce Poireau, ce n'est pas vrai... jamais il n'a pénétré chez la Marquise... je le sais... de source sûre...

Emilie a dit…

Mon cher Paul,

Me voilà tout à fait rétablie et décidée à dissiper les malentendus. Il est en effet peu souhaitable de surseoir plus longtemps à la nécessité de confondre mon cousin, comme à celle de déciller enfin vos yeux !

Tandis que je revenais d'une course à cheval, je décidais de faire un détour par le charmant petit village de Condé-Tesmaures, où je savais que c'était jour de marché.

En effet, je n'aime rien tant que de choisir moi-même les fruits dont je me régale l'été et qui poussent à profusion dans nos campagnes : pastèques rafraîchissantes, melons fondants, brugnons juteux et parfumés, abricots dorés ! Mon panier était déjà plein lorsque je fus attirée par un attroupement d'où s'échappaient des interjections de surprise, des rires goguenards ou étouffés :
-Boudiou, qu'es aco ?
-noun sai
-oh ! qu'acò's bèu !
-que couionado !
-Fai pas bon travaia quand la ciga lo canto !

-Mies vau pan à la paniero !
-Fan de chichourle! Vé la coucourde, elle a la cou bien long, et vé celle-là, elle a deux cous, c'est'y pas de la transgénique ?


Intriguée par ce vacarme et pensant trouver là, sur l'étal, une nouvelle sorte de primeur, je m'approche et me fraie un chemin dans toute cette presse.

Deux camelots, un homme et une femme, vendaient à la criée des marchandises qui ne laissaient d'étonner nos paysans. Le gandin qui faisait l'article, vêtu d'une longue chemise bleue, d'un pantalon de velours rustique et qui portait un immense chapeau de paille sous lequel il semblait vouloir passer incognito, s'exprimait cependant dans un langage châtié, étonnant pour un homme des champs. Je le regarde avec plus d'attention, et je reconnais, Dieu, c'était impossible, le comte de Bitenfeult ! Sa femme restait à l'écart et paraissait fort contrite dans sa robe de grossière cotonnade !
A quelles extrêmités étaient-ils rendus et acculés ! Je compris que gagnés par la banqueroute de leur très chic magasin d'accessoires cul-turels, ils en étaient réduits à solder les invendus, les fins de séries, bref, écouler leur stock sur les marchés ! Ciel, quelle déchéance, quelle horreur, les Bitenfeult en colporteurs et bonimenteurs ! Voilà où mène le vice ! J'eus honte pour eux, et, résolue à les secourir, le rouge au visage, me faisant violence et les yeux fermés, j'achetai tout pour une somme modique :bas de soie, dentelles, guêpières, et même vos calendriers obscènes qui se trouvaient là également !

De retour au château, évidemment je rencontre mon cousin, batifolant sans doute depuis le matin avec ma nouvelle camériste, Alice, une fille si discrète dont on se demande parfois si elle existe. Mon cousin approche : "Mais quel panier, ma cousine, souffrez que mes mains de gentilhomme vous aident à porter cette jolie moisson !"
Faisant fi de ses habituelles plaisanteries, je m'ouvre à lui de cette mésaventure et lui montre mes couffins.Je vois bien qu'au milieu des fenouils, melons et céleris il a bien quelques idées qui dansent, mais son intérêt va au reste. Mon maraud de cousin, l'oeil allumé, fouille et farfouille dans les rubans et les soieries...

Nullement étonnée par le comportement de ce libertin, je lui demande de me débarrasser de ces vanités dont je n'ai que faire.

Il emporta le tout et je veux ignorer l'usage qu'il en fit.

Voilà la vérité, je n'ai jamais porté ces parures du diable et je ne pouvais donc lui demander d'y venir voir !

Patrick Mandon a dit…

Ah ça, mais ! La Beauregard refait l'Histoire ! Avec elle, Napoléon n'a jamais existé, Jeanne d'Arc n'est qu'un invention, de Gaulle un locataire grincheux, et Mitterrand un homme de gauche !
La belle Alice, qui rentre à l'instant d'une longue absence, requiert tous mes soins dans l'immédiat. Je me consacre entièrement à elle, je lui fais connaître quelques étoiles, et je reviens vers vous, afin de rétablir les faits.
Tout de même, la Beauregard, quelle plume !

Unknown a dit…

Très chère Emilie, Marquise de Beauregard, c'est avec la tête dans la valise et la mort dans l'âme que je vous adresse ce court message : Je vous quitte... Non, ne défaillez pas !... je vous quitte pour une semaine seulement... Je vais vivre ma vie de Palaces quelque part au Maroc du côté de Casablanca... Mais je reviens bien vite, pour boire vos paroles et m'enivrer de vos paragraphes... Vous allez me manquer... et, si vous le permettez, je vais faire court... je ne supporte pas de vous voir pleurer... Vous au moins, vous avez mes calendriers, pour compter les jours... Votre très respectueux Paul

Unknown a dit…

Mon très cher Patrick, j'ai un déguisement de lapin... voulez-vous que je vous le poste demain matin avant mon départ pour Casablanca ?... Alice adore ça !...

Patrick Mandon a dit…

Mais, voyons cher Paul, vous avez déjà donné à la belle Alice une panoplie de lapin ! Mais, peut-être en avez-vous touché une nouvelle série ? Votre longue amitié avec Hugues Hefner vous place dans les meilleures conditions pour recevoir les derniers modèles…
À votre retour de Casablanca, où, je n'en doute pas, vous partez en belle compagnie, je vous montrerai d'intéressants clichés de la Beauregard. Vous verrez qui, de la marquise ou de moi, dit la vérité au sujet de l'épisode que je vous rapportais ici-même, le 4 août à 13 h 40. Quant à Hercule Poireau, je vous assure bien que ce gros légume m'a rapporté les propos que je lui prête : se sera-t-il vanté ?
Mais je vous laisse, il me semble que le jolie mannequin à la taille de guêpe, qui vous accompagne, s'impatiente. Est-ce avec elle que vous partez à Casa ? Ah, vous avez toujours su choisir vos bagages à main…

Unknown a dit…

Oh, pardonnez-moi, mon cher Patrick !... Il y a confusion... le costume était pour vous !... Je tiens cette information de mon ami Carroll Lewis... toutes les Alice adorent le lapin... NON ! décidément, je m'exprime très mal !... elle ne va pas vous manger !... Croyez-moi, ce costume va la séduire et, très franchement, je ne vous imagine pas dans un costume qui vient de chez Hefner !... mmm... non, vraiment pas !

Emilie a dit…

Mon cher Paul, je vous souhaite un agréable séjour au Sud...

Après le plaisir du sens, celui des sens, après celui de la plume, celui des plumes(si j'en crois les photos du calendrier 2009 et votre goût des accoutrements )! Mais prenez garde qu'à votre retour, je ne vous attende avec le goudron !

Mais, ai-je bien lu ? Patrick en lapin ?????? Ce n'est guère flatteur !

Emilie a dit…

Pardon, il manque "que" : "Prenez garde QUE je ne vous attende.."

Emilie a dit…

Non, finalement, je ne l'avais pas oublié ! J'ai la plume qui fourche !

Emilie a dit…

Sans doute à cause du lapin !

Patrick Mandon a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Patrick Mandon a dit…

J'ai connu la Beauregard en tireuse de lapins. En effet, il fut un temps où elle se levait de bon matin, partait à cheval dans la lande, et tirait tous les lapins qui se présentaient à sa vue. Bonne tireuse, notre Diane chasseresse était douée d'une énergie folle : elle pouvait tirer plusieurs coups sans s'épuiser ni se lasser. Son valet, derrière elle, chargeait et rechargeait son fusil dès qu'elle avait déchargé… Le brave homme !
J'ai observé qu'aux lapins, la Beauregard préférait les lapines…
Le fameux Hercule Poireau, dont je vous ai récemment entretenu, m'a certifié que dans ses moments d'abandon, il n'était pas rare que la marquise se mît à fredonner le refrain de la chanson gaillarde bien connue, La femme de M. Pin, ou l'épouse lapine :
-«Ah, mon brave, sarcle et bine !»
Dit la Pin à lapine…

Unknown a dit…

Chère Emilie, je suis "écroulé" de rire... et j'ai des doutes sur mon passage en douane avec toute cette bonne humeur... voici ce que je trouve à côté des mails... à côté de nos commentaires :

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Je préviens mon ami Patrick immédiatement...
Ah, aussi... garder le goudron pour une autre fois... Au Maroc, je ne suis pas en vacances, mais au boulot... hélas... Je vous remercie pour vos bons voeux...

Patrick Mandon a dit…

Poireau ou les travaux d'Hercule en Provence…
La marquise, paraît-il, conserve de très beaux specimen dans des cages à lapine.
Revenez bien vite, Paul, nous nous ennuyons de vous déjà !

Unknown a dit…

Attention, mon cher Patrick !... ne courez pas la lande dans votre costume pour rejoindre Alice... Je ne veux pas apprendre, là-bas au Maroc, qu'au détours d'un monticule, vous vous êtes fait tirer par Madame la Marquise... ou alors, chantez à tue-tête, une de vos chanson, pour qu'elle vous reconnaisse... A très bientôt... j'espère...

Patrick Mandon a dit…

Mon cher Paul,
De votre luxueux exil marocain, vous n'aurez rien su de ce qui était arrivé à la Beauregard. Voici l'aventure, telle que me l'a donnée l'une de ses servantes, dont la taille bien tournée a plus d'une fois attiré… mon regard.
La Beauregard, donc, galopait non loin d'une plage déserte. Il faisait chaud, l'air était humide, lourd. La mer, tout près fut une tentation à laquelle la marquise ne sut pas résister. Il n'y avait personne en vue. Elle gagna le bord de mer, descendit de cheval ; elle était en sueur. l'eau paraissait si agréable, un bain la rafraîchirait… Elle observa attentivement autour d'elle : quelques rochers, des pins au loin et des taillis courts, mais nulle présence humaine.
Alors, elle laisse tomber un à un ses vêtements sur le sable, jusqu'à être nue. Puis, tenant son cheval par la bride, elle s'avance dans les petites vagues. AH, l'adorable sensation ! Elle ferme les yeux, tandis que l'onde vient éclabousser son corps sculptural. Elle progresse encore, s'éloigne de la rive, son corps est à présent entièrement immergé, sa monture hennit de plaisir. Quel couple étrange pour ce bain de mer improvisé ! Ses longs cheveux bruns lui font un cortège qu'on ne voit que par instant, au gré des flots qui les découvrent. Elle a fermé les yeux, elle se donne à la Méditerranée, elle s'offre… Un instant d'éternité que signale un sourire de joie intime… Puis, elle reprend ses esprits, fait demi-tour, apaisée. Hélas, hélas, hélas ! Les vêtements ne sont plus là ! S'est-elle si éloignée du lieu où elle les avait quittés ? En mer, on perd vite l'orientation ! Elle court à gauche, elle court à droite, tenant son cheval. Plusieurs minutes passent ainsi. Imaginez son affolement : enfin, cette femme est nue ! Qui lui aura dérobé sa robe blanche, son chemisier, son jupon, sa culotte, ses bas, ses chaussures ? Elle est nue, sur cette plage, comprenez-vous ? La suite fut un cauchemar pour cette créature si pudique et si fière.
Elle se hissa sur la selle de son étalon, partit en direction du taillis, saisit une branche qui lui irrita l'épiderme plus qu'il ne couvrit son corps, et gagna un sous-bois. Elle attendit ainsi, sursautant au moindre bruit, la tombée du jour. Hélas encore, c'était une nuit de pleine lune ! On y voyait comme en plein jour. Ses formes généreuses se reflétaient sur les arbres, sur la chaussée, sur les murs ; on eut dit une cavale en rut parcourant la campagne ! Enfin, elle parvint près de la grille du château. Et que vit-elle, dans la clarté lunaire ? Tous ses vêtements maintenus par des ficelles, pendant lamentablement. Et, venant d'une pénombre de bosquet, des rires d'hommes lui firent prendre un masque d'épouvante et de honte. Sans plus tarder, elle piqua des deux, pénétra dans le parc, gagna les écuries…
Elle est au lit, avec la fièvre, depuis huit jours. Elle dit qu'elle va mourir, elle a mandé trois fois l'abbé Jolicœur, afin de se confesser. Au village, l'aventure de la marquise a réjoui tous les foyers. À présent, le récit a passé les montagne et se répand dans la plaine. Comme vous pouvez vous en douter, il grossit chaque fois d'une invention croustilleuse. On en est à une étreinte méditerranéenne de la Beauregard et de son étalon ! Le peuple est moqueur et cruel.
J'en saurai plus ce soir, après que la soubrette m'aura rejoint dans ma chambre d'auberge…

Patrick Mandon a dit…

Paul, mon ami, mon frère !
Entendez mon appel ! Figurez-vous que la petite bonne, après que je lui ai donné toutes les galanteries dont elle est fort gourmande, m'a fait cette confidence : la marquise est persuadée que je suis coupable du forfait qui l'a contrainte à revenir au château, nue, à cheval, et sous les rires de gredins dissimulés. Elle dit qu'elle en la preuve !
Il est vrai que je suis à l'origine de tout cela, je le confesse ; j'ai soudoyé un brave idiot de village, afin qu'il guette sa venue sur la plage où les faits ses sont produits. Je connaissais les habitudes de la Beauregard, pour l'avoir suivie, à plusieurs reprises, à son insu. Je savais que, sous la canicule, elle aimait à se baigner à cet endroit, très isolé, très tranquille. C'est bien ce qui s'est produit ce jour-là. Le pauvre hère en a profité pour dérober ses vêtements, puis il est rentré au village, non sans avoir prévenu quelques valets de ferme de sa connaissance. Toute cette engeance de stupidité et de rouerie mauvaise s'est cachée, attendant l'arrivée nocturne de la marquise.
Voilà la vérité, Paul. Mais la Beauregard ne me pardonnera point ce mauvais coup. La petite bonne, qui est aussi cruelle qu'on peut l'être dans les campagnes, m'a dit, avant de partir, et en riant fort, que sa patronne avait convoqué le fameux Hercule Poireau, cette brute dont je vous ai déjà entretenu, et pour lequel elle manifesta naguère un intérêt aussi étrange que sensuel. Elle l'a prié, moyennant une forte somme d'argent et la promesse de se donner à lui, de réunir des brigands de son acabit, afin de me retrouver.
Pour ma sécurité, je dois m'enfuir, quitter la région. Ma cousine est animée d'une haine de Borgia contre moi. Elle veut ma peau. Hélas, nullement pour s'y frotter, mais pour faire une descente de lit !

Anonyme a dit…

Revenez vite, cher ami. Je sens qu'à votre retour, une boyarde moldave, amie de couvent de notre baronne, quittera ses montagnes subcarpatiques pour lui prodiguer les soins et attentions que son état impose. Son nom ? Nadia Draculesco, descendante en ligne directe de Vlad Tepes, mieux connu chez vous sous le sobriquet peu flatteur de vlad l'empaleur.

Patrick Mandon a dit…

Eh bien, mon cher Paul, si cette Nadia Draculesco vient au château, les longues soirées d'hiver ne seront point tristes. Figurez-vous que ma cousine m'a parlé de cette femmes à la réputation plus que soufrée, digne héritière de son terrible ancêtre, allié des rats, buveur de sang et empereur des mondes ténébreux. La Beauregard a en effet évoqué devant moi cette forte personnalité, et dans une occasion que je ne peux vous celer et qui vous réjouira. Un soir, j'entre sans me faire annoncer dans le salon de la marquise. Allongée sur un sofa, couverte d'une lourde couverture de laine sombre, elle est en train de lire un ouvrage,que, surprise par mon arrivée, elle s'empresse de faire disparaître sous son châle. J'avais eu le temps d'en déchiffrer le titre :
«Alors, ma cousine, on se plonge dans les livres licencieux ?»
Elle rougit, bredouille, fixe le mur.
«Et je constate que vous le lisez d'une seule main. Que faisait donc l'autre, sous votre couverture ?».
À ces mots, la Beauregard devient rubiconde, puis, reprenant ses esprits, elle me jette un regard de feu et semble me lancer des flammes à la figure en me répondant :
- Apprenez, monsieur mon cousin, que je ne faisais que m'informer sur le sujet du prince Vibescu, dont l'arrière-petite-fille, Nadia Draculesco, une amie de collège, me viendra rendre visite tantôt.

Vous l'avez compris, mon cher Paul, la Beauregard était plongée dans les aventures érotiques rapportées par Guillaume Apollinaire dans Les onze mille verges ou les amours d'un Hospodar.
Honteuse, prise sur le fait, ma cousine, tout en protestant de sa bonne foi, renversa du pied un guéridon et brisa un joli flacon de verre en voulant me le lancer à travers la figure. Je la laissai, en récitant à très haute voix les premières lignes de l'œuvre, sous le regard ahuri mais amusé des femmes de chambre et autres valets :
«Bucarest est une belle ville où il semble que viennent se mêler l'Orient et l'Occident. On est encore en Europe si l'on prend garde seulement à la situation géographique ; mais on est déjà en Asie si l'on s'en rapporte à certaines mœurs du pays, aux Turcs, aux Serbes et autres races macédoniennes dont on aperçoit dans les rues de pittoresques spécimens. Pourtant c'est un pays latin, les soldats romains qui colonisèrent le pays avaient sans doute la pensée constamment tournée vers Rome, alors capitale du monde et chef lieu de toutes les élégances. Cette nostalgie occidentale s'est transmise à leurs descendants : les Roumains pensent sans cesse à une ville où le luxe est naturel, où la vie est joyeuse. Mais Rome est déchue de sa splendeur, la reine des cités a cédé sa couronne à Paris et quoi d'étonnant que, par un phénomène atavique, la pensée des Roumains soit toujours tournée vers Paris, qui a si bien remplacé Rome à la tête de l'univers !
De même que les autres Roumains, le beau prince Vibescu songeait à Paris, la Ville-lumière, où les femmes, toutes belles, ont toutes aussi la cuisse légère. Lorsqu'il était encore au collège de Bucarest, il lui suffisait de penser à une Parisienne, à la Parisienne, pour…»

Anonyme a dit…

... Les parisiennes ont de tout temps enfiévré l'esprit de mes compatriotes, ils leur prêtent mille raffinements mielleux et nous reprochent nos manières barbares. Ne sont-ils pas prêts à franciser leurs noms, couper leurs moustaches tombantes et jeter aux moulins leurs bonnets en peau d'ours pour plaire à ces délicates sylphides ?
J'ai du moi-même me plier à vos coutumes occidentales pendant mes années de couvent, ma chère Emilie m'a initiée à l'art de vos conversations légères et de vos bonnes manières. Elle les maîtrise mieux que quiconque. Las, sitôt rentrée dans ma Moldavie, la créature de salon a cédé le pas à la byzantine, j'ai abusé des messes noires, des liqueurs fortes et des voyageurs égarés que l'hiver interminable conduisait à ma forteresse. Il est temps pour moi de revenir à la civilisation et consoler ma languissante amie..

Patrick Mandon a dit…

Ah, mon cher Paul, il vous faut rentrer au plus vite et laisser derrière vous les anciens délices de Capoue, qui perdirent les soldats d'Hannibal !
Car il se précise que la roumaine incandescente sera bientôt au chevet de la Beauregard. La marquise retrouvera bien vite la santé et, dans la personne de Nadia, une complice en rouerie. Or, je tiens de source sûre que la Draculesco est d'une audace folle, sous des dehors très réservés, tout le contraire de ma cousine, qui est de marbre sous un aspect flamboyant. Néanmoins, nous savons que le dénommé Hercule Poireau a su embraser ce marbre et l'a réduit en cendres ardentes… Rentrez, Paul, rentrez ! Nous ne serons pas trop de deux pour affronter ces créatures infernales !

Emilie a dit…

AAAAH, ma chère Nadia, vous me voyez bien attristée de vous recevoir alors que je suis au plus mal. Je quitte un instant la chambre pour vous parler et respirer un peu.

Voyez dans quel état m'a mise mon horrible cousin, à force de médisances et d'humiliations ! C'est un homme perdu, un diable, qui n'a de cesse de me poursuivre et de me faire du mal !Heureusement, l'abbé, ce saint homme, fut pour moi d'un grand secours dans ces moments de douleur. Dieu vous bénisse, je suis bien heureuse de vous savoir près de moi au château, car j'ai d'importantes révélations à vous faire sur les raisons de la fuite de mon cousin ! C'est horrriiible !

Quand vous m'entendrez, quand vous saurez la vérité, vous en frémirez, ma toute belle ! Il me faut reprendre quelques forces pour ne pas défaillir au récit que je compte vous faire de tant de turpitudes. Pour l'instant, cette seule pensée, me bouleverse et me glace le sang !

Ne croyez rien de ce qu'il raconte sur ma personne. Je ne connais pas de Guillaume Apollinaire.

Patrick Mandon a dit…

Il se trouve que, quelques jours après l'épisode du livre d'Apollinaire, nous nous retrouvâmes, ma cousine et moi, en compagnie d'autres convives, à la table de l'évêque. Je cherchais en vain à croiser le regard de la marquise, qui se dérobait toujours. On nous servit les desserts. L'abbé Jolicœur, curé de la paroisse de la Beauregard, nous informa de ses lectures, puis il interrogea Monseigneur l'évêque. Celui-ci, après nous avoir rendu compte du dernier ouvrage qu'il avait lu, se tourna vers moi et me posa la même question. Alors, sans quitter des yeux ma cousine, et prenant l'air le plus sérieux, je répondis, d'une nvoix suave :
-«Ah, Monseigneur, je suis plongé dans le livre que la marquise de Beauregard m'a confié, l'autre soir.»
-«Fort bien, et quel en est le titre».
-»Les onze mille VIERGES, Monseigneur. Une sorte de compilation fort pieuse sur toutes les femmes, martyres de notre foi! Remarquable, et très bien documentée.
-«Tiens donc ! Je ne connais point ce volume. Voudrez-vous avoir l'obligeance de me le prêter, si, toutefois, Mme la marquise le permet.»

Imaginez le trouble qui saisit alors la Beauregard. J'ai bien cru qu'elle allait chavirer. Elle bredouilla de vagues excuses, prétexta un malaise et quitta la table, au grand désarroi de tous. Monseigneur pria l'abbé Jolicœur de l'accompagner. Puis le dîner s'acheva rapidement, et l'évêque oublia le livre.
Mais avouez qu'une fois de plus, je me suis bien joué de ma cousine !

Anonyme a dit…

Chère amie,votre désarroi me bouleverse. Je vous amène en cadeau un jeune pope fort habile à expliquer ces saints mystères qui dépassent notre entendement féminin. Comme vous ne l'ignorez pas, l'hortodoxie autorise nos moines à toutes les expériences pour être au plus près de nos tourments. Renvoyez votre abbé à sa cure.
Je vous amène également un cuisinier qui fait merveilleusement les poale n'briu et les sarmale cu foi de varza, mets rustiques dont je ne saurais me passer dès le mic dejun. Un palefrenier, un cocher et un piqueur. Tous ces gens sont à moi, ils sont donc à vous. Leurs familles nous appartiennent depuis Etienne le grand. Ils me sont tout dévoués, votre cousin n'a plus qu'à bien se tenir. S'il persiste, je connais des filtres remarquables qui le rendront aussi inoffensif qu'un chaton. Vous verrez, ma belle, votre langueur va s'évaporer comme neige au soleil moldave.

Emilie a dit…

Chère Nadia,

Là, vraiment c'en est trop ! Je ne peux plus me taire ! Il parle à l'évêque, à l'abbé, mais comment cela se pourrait-il, quand on sait les évènements survenus la semaine dernière ?

Nous devisions agréablement, l'abbé et moi, quand tout à coup, des vociférations venant de la cour du château nous obligèrent à prêter l'oreille puis à nous approcher de la fenêtre. Cela ressemblait à un chant à deux voix :

"Prenez garde, prenez garde
Vous les sabreurs les bourgeois les gavés
V'la la jeun' Garde, v'la la jeune Garde
Qui descend sur le pavé
C'est la lutte finale qui commence
C'est la revanche de tous les meurt-de-faim
C'est la révolution qui s'avance
C'est la bataille contre les coquins
Prenez garde, prenez garde
V'la la jeun' Garde

Enfants de la misère,
Nous sommes de force des révoltés
Nous vengerons nos pères
Que des brigands ont exploités.
Nous ne voulons plus de famine,
A qui travaille il faut du pain.
Demain nous prendrons les usines,
Nous sommes des hommes et non des chiens"

L'abbé faillit s'étouffer et moi, rouge de colère et de honte, je reconnus les deux chanteurs, qui de plus, semblaient être sérieusement éméchés. Ils se tenaient par l'épaule et paraissaient en parfaite intelligence. Mon cousin avait donc amené une fois de plus au château, ce garçon qu'il a rencontré dans l'auberge où il s'enivre régulièrement et aime à s'encanailler avec le petit peuple.

C'est lui qui lui a tourné l'esprit et l'a comme envoûté.Il ne jure plus que par lui, Jérôme par ci, Jérôme par là, et il lit constamment, comme une Bible, Le Capital de Karl Marx ! Ce Jérôme Leroy( qui porte bien mal son nom) est parait-il journaliste, or, j'ai pris mes renseignements et il s'avère qu'il exerce les fonctions de commissaire politique et de censeur à l'agence parisienne de LA PRAVDA ! Jugez encore de la pernicieuse influence de cet homme, puisque, pas plus tard qu'hier, toujours en présence de l'abbé, mon cousin descendit les escaliers en criant à tue-tête "LA RELIGION EST L'OPIUM DU PEUPLE ! "
Un communiste dans la famille ! Il ne nous aura donc rien épargné !

N'est-ce pas ce Jérôme encore qui lui a mis en tête que le communisme pouvait être sexy et balnéaire ? Et voilà notre Patrick en route pour Cuba ! Son ami Paul, de passage là-bas, pour son travail de photographe de charme, m'a envoyé ce cliché de Patrick dans les rues de La Havane, voyez vous-même :
http://www.photos-voyages.com/cuba/beret.htm

Emilie a dit…

Je ne pas encore très familiarisée avec ces machines !

Ce lien est plus direct :

http://www.photos-voyages.com/cuba/beret1.htm

Emilie a dit…

Merci, chère Nadia, je suis sûre que vos gens sauront apporter gentillesse, gaieté et savoir-faire au château et nous reposeront des caprices de mon cousin !

Sachez qu'à propos de Patrick, je n'ai pas tout dit et que ces jours-ci, j'ai reçu, de certaines gens, certaines confidences qui vont vous ébahir !

Patrick Mandon a dit…

La Beauregard et la Moldave pourront toujours dire, médire et me maudire ; il restera que la marquise lisait Apollinaire d'une main !
Restera également la scène du dîner chez l'évêque, où la marquise fut en quelque sorte prise «la main sous la couverture» !
Quant à la photographie… Demandez-donc à vos soubrettes ce qu'elles disent de la ressemblance avec l'original…

Anonyme a dit…

Mma chère Emilie, mon étonnement ne connait pas de borne. Figurez-vous que je connais ce Leroy, ou Elrege tel qu'il s'était présenté à moi cet hiver. Une nuit de tempête comme on en voit peu, il a frappé à la porte de ma forteresse. Nos traditions d'hospitalité moldave ne sont plus à vanter, elles ont dépassé les frontières. Il faisait peine à voir. Nos villageois l'avait cruellement mis à mal. Il venait leur prêcher le soulèvement, la révolution, que sais-je encore. Or mes gens sont les plus heureux du monde. Ils ne manquent ni de pain, ni de vin, ni de feu et je leur offre une tenue nouvelle à chaque épiphanie. Ma main est ferme mais juste, bref ils m'adorent. Ils ont proprement bastonné celui qui voulait faire leur bonheur malgré eux. J'ai pensé ses plaies, fait recoudre ses vêtements lacérés et réchauffé son corps et son âme de vieilles tuicei et palincei dont je vous amène quelques flacons. Je vous avoue que je n'ai pu m'empêcher d'y glisser quelques filtres dont je tiens la recette secrète mais que je vous confierai à l'occasion. Le révolutionnaire s'est transformé en poète, nous avons passé un hiver délicieux. Avec l'été, ses démons l'ont repris, il est parti vers une contrée étrange qu'il nommait espace chaveziste libéré dont les habitants ne pensent, parait-il, qu'à faire l'amour et partager tout ce qu'ils possèdent jusqu'à ne plus rien posséder du tout. Croyez-vous à ce conte ? Aurait-il rencontré votre cousin, qui fait bien peine à voir, dans ces contrées sauvages ? Les voilà revenus et prévenus, nous en saurons plus bientôt.

Emilie a dit…

Mon amie,

Ce que vous venez me dire, loin de me rassurer, montre assez clairement, il me semble, que votre protégé Jérôme est un illuminé, un rêveur, un dangereux paranoïaque !

Avez-vous regardé la photo de mon cousin, symbole, s'il en est, du sex-appeal communiste ?! Patrick, dans cet état ! Lui, naguère si joli garçon, savez-vous qu'à son retour de Cuba, je ne l'ai point reconnu, et que croyant qu'il s'agissait d'un bandit de grand-chemin, j'ai pris peur en le voyant ?
Heureusement, son esprit vicieux me l'a fait reconnaître :

" Alors, Navarone, vous n'avez rien perdu de votre capital !Il va bientôt falloir partager, du passé faisons table rase !"

N'est-il pas incurablement atteint ?

Vous savez combien il aime les héroïnes de Godard, Anna Karina et Chantal Goya, avant qu'elle ne se transforme en amuseuse d'enfants ? Eh bien, figurez-vous que je l'ai entendu chanter, hier, toute la journée :"Bécassine, c'est ma cousine, Bécassine, c'est ma cousine !" Bien entendu, c'est une nouvelle façon de me persécuter, mais avouez que c'est inquiétant, et je ne suis pas de constitution à en supporter davantage !

N'auriez-vous pas dans vos potions, quelque contre-poison qui nous le guérirait tout à la fois du communisme et de Bécassine ? Nous pourrions le lui administrer facilement dans son Chivas du soir ! N'est-ce pas une bonne idée, ma chère Nadia ?

Anonyme a dit…

Je pratique toutes les potions et autres magies depuis mon plus tendre âge, ma belle. N'oubliez pas d'où je viens. Vous souvenez-vous de cette hypocrite péronnelle, la petite Merteuil, dont la bouche perfide crachait un crapaud chaque fois qu'elle l'ouvrait ? Voulez-vous que j'afflige de la sorte votre beau cousin ? Cette allure de traîne misère me semble déjà bien infamante, mais demandez et je sors mes ingrédients.
Quant à mon protégé, il portait beau dans mes souvenirs, plut à Dieu qu'il n'ait point changé, ce serait assurément grand dommage.

Patrick Mandon a dit…

Mes chers Paul, mes amis, mais où diable êtes-vous ? Au moment où je gagne mes terres de l'Est, ces deux marquises infernales m'éclaboussent d'infamie. L'une me destine des potions qui me feront devenir batracien, l'autre montre un document sensé me représenter ! Certes, les cubaines ont éprouvé ma vigueur, certes je n'ai plus vingt ans, mais je suis encore trop avenant et trop exigeant de beauté pour me tourner vers la provençale ou la roumaine… Et d'ailleurs, je préfère les cubaines aux culs-bénis !

Patrick Mandon a dit…

Vous aurai-je clouer le bec, petites dames du marquisat de Perfidie ? On ne vous entend plus caqueter, diffamer Mandon. Quel document allez-vous ramener de votre sac noir à malice ? À moins que vous ne fassiez la ménagère ou l'amoureuse pour votre petit monsieur du moment. Quant à moi, je vais, je vire, je volte ! Et je chante : «Mille e tre ! Mille e tre !…»
À Cuba, je vis des merveilles de la nature, des monts vertigineux, des pentes abruptes, des plaines tendres, des broussailles accueillantes, des lits de rivières jamais à sec… Je fus plus souvent qu'à mon tour accueilli, choyé, entouré des soins les plus attentifs. Le document que ma traîtresse de cousine m'a dérobé (où plutôt qu'elle a payé, si j'ose dire, de sa personne, puisque, pour l'obtenir, il a fallu qu'elle se donnât à celui qui en possédait une copie !), ce document donc, témoigne en effet de mon épuisement, consécutif aux excès auxquels je me livrai sur l'île du barbu (la bien nommée…). Mais, ma robuste constitution m'a permis de retrouver rapidement mes forces, et j'ai à présent l'œil vif, le jarret alerte et des idées plein la tête. Alors, je chante : «MIlle e tre ! Mille e tre ! Mille e tre !»…

Emilie a dit…

Ma chère Nadia,

Il ne fait aucun doute que les bordels de La Havane ont tourné la tête de mon cousin ! Voilà qu'il se prend pour Don Juan !

Préparez la potion ou le bouillon de onze heures, et rajoutez-y du bromure. Mais faites vite, cela devient urgent !

Emilie a dit…

Post Scriptum.

Gardez-en pour Paul, qui revient bientôt !

Emilie a dit…

100 commentaires, ça se fête !

Maintenant 101 ! Et vivent les gens du château !

Patrick Mandon a dit…

Mille e tre ! Mille e tre ! Mille e tre !

Ah ça, mais ma cousine n'est point couchée, à cette heure ? Elle n'a pas son bonnet de nuit, ses chaussons de laine et sa culotte de coton ? À moins que, saisie par le démon de la chair une fois de plus, elle ait encore hurlé son désespoir à la lune ! Voyez cousine, dans la lande, qui accourt : tous les contrefaits, les idiots, les mi-homme mi-bête, les ni-homme ni-bête, tous ceux qui, lassés de leur chèvre ou de leur choux, veulent une fois, au moins «connaître une femme»… Ils trouveront porte close, car si vous espérez qu'ainsi vous attirerez à vous le prince charmant, vous vous trompez, marquise ! Vous n'aurez que le rebut d'humanité qui peuple votre lointaine province. Bah, demain vous irez à confesse !
Et moi, je chanterai : «Mille e tre ! Mille e tre ! Mille e tre !».
Je vous souhaite le bonsoir, bonnet de nuit. Et si le sommeil ne vient pas, réclamez donc la recette d'une tisane contre l'insomnie des femmes à votre amie carpatique. Ou bien faites mander Hercule Poireau…
«Mille e tre ! Mille e tre ! Mille e tre !»

Patrick Mandon a dit…

Il sera tantôt minuit, les deux commères sont endormies. Quant à moi, je chante encore : «Mille e tre ! Mille quattro ! Mille cinque ! Mille sei, Mille sette, Mille otto, Mille nove !

Eh, mon dieu, je sais encore mon italien ! C'est que j'ai appris à compter les dames en Italie…

Anonyme a dit…

Je prépare mes potions ma chère amie, assurément votre cousin n'a plus sa possession. Notre Casanova hurle des paroles d'opéra et énumère ses conquêtes sous vos fenêtres et les miennes accessoirement, faisant un raffut de tous les diables. Je vais de ce pas mander mes gens, il est temps de prendre des mesures et le ramener à la raison. Quelques gouttes de mon fameux elixir devrait y suffir.

Un roturier de passage a dit…

« Pendons ma trique !
Tant pis ! qu'on m'arde ! »,
s'exaspérait parfois le divin Marquis.

Patrick Mandon a dit…

Excellent, Roturier ! Revenez vous frotter de marquisat…

Anonyme a dit…

Les marquises attendent des roturiers de passage des sauve-conduits dûment estampillés et nominatifs.

Unknown a dit…

Mon très cher Patrick, comme on dit "les absents ont toujours tort !"... Comme j'aurais aimé être là, au petit matin et voir la Marquise sortir de l'onde, semblable à la vénus de Botticelli... Mon âme d'artiste me souffle aussi que, comme Courbet, j'aurais eu l'immense plaisir, peut-être, de saisir l'origine des mondes de la Marquise de Beauregard et que cette photo sublime aurait fait le tour du monde... Je rêve... Mais je vous reviens très bientôt... encore un choix de photos à faire et je suis parmi vous... Votre dévoué Paul

Patrick Mandon a dit…

Ah, mon cher Paul ! Vous revenez bientôt, enfin ! La marquise m'en a fait voir de toutes les couleurs, et notre nouvelle correspondante, Nadia Draculesco, venue des Carpates. Elle se flatte de descendre en ligne direct, si j'ose ainsi dire, du pal de Vlad Tepes, que l'Histoire et la mémoire surnomment joliment Vlad l'Empaleur ! Elle s'inspire ouvertement des mœurs et coutumes de Mme de Merteuil ! Ajoutez à cela qu'elle connaît des potions et des filtres qui vous rétablissent les virilités défaillantes, ou vous estourbissent les arrogantes ! Une sorcière adorable, une créature du démon à qui l'on donnerait le Bon Dieu sans confession. Voyez, mon bon Paul, ces femmes qui me harcèlent de leurs malédictions, et mesurez mon désarroi.

Anonyme a dit…

Ne raillez pas si ouvertement le pal de mon ancêtre, cher Patrick. Sachez que je ne me sépare jamais de cet objet totémique pieusement conservé dans notre famille depuis le XIVème siècle.Il figure naturellement en bonne place sur les armoiries de la famille Draculesco qui sont d'argent au pal de gueule. Il a laissé de cuisants souvenirs aux Turcs qui nous lorgnaient d'un peu près et n'a pas laissé la petite Merteuil indifférente. A bon entendeur salut !

Patrick Mandon a dit…

Ah ça mais ! Où voyez-vous, la Carpatique, que j'ai raillé quelque pal que ce soit ?
Je sais trop l'utilité de ce précieux objet pour le moquer ! Certes, je n'en ai pas eu l'usage jusqu'à présent, mais qui sait si une vocation d'empaleur ne naîtra pas en moi un jour. Mais, Nadia, vous pâlissez, pourquoi ?

Anonyme a dit…

Je m'en sers moi-même avec assez de verve
Mais je ne permets pas qu'un autre me le serve

Patrick Mandon a dit…

Ah, certes, l'us du pal est individuel. il ne s'use que peu, paraît-il, s'en servît-on beaucoup. Mais, là-dessus, je ne sais que ce que j'ai ouï dire.
Vous pâlissez énormément . On dit que l'usage fréquent du pal rend les femmes pâles. Je vous entendrai volontiers là-dessus, à moins que vous ne soyez, aussi, devenue sourde…

Emilie a dit…

Très chère Nadia,

Je me porte mieux. Aussi, aujourd'hui après mâtines, ai-je pu remonter à cheval. Une nouvelle folie, un pur sang anglais à la robe alezane, une bête magnifique, un étalon auquel je n'ai pu résister et que j'ai acquis ces jours-ci. Je l'ai nommé Francky, du prénom de mon défunt mari. Il me plait, pour le mettre au galop de l'appeler de la langue et d'ajouter "vas-y Francky" ! Cela me rappelle de doux souvenirs.

Ainsi suis-je allée jusqu'à Monaco, la ville dont le prince est un ami de toujours, Albert, à qui j'ai rendu visite.

Le paysage, de ce côté-ci est féérique. On y surplombe la mer tout du long et le lever de soleil sur Saint Jean -Cap Ferrat est confondant de beauté.

Me voilà donc de retour pour vous conter ce que je vous avais promis et que je ne peux celer plus longtemps.

Je ne vous apprends pas bien sûr que mon cousin Patrick a une maîtresse. Il s’agit de mon amie d’enfance, la comtesse Elisabeth de Lévistrass. Très épris, depuis deux ans, ils s’affichaient souvent ensemble. Il y a quinze jours, elle se fait annoncer et je la reçois. Elle, d’habitude si gaie et avenante, je lui vois une mine défaite, un air sombre et languissant.
-Que se passe-t-il ma chère Zaza, pourquoi cette tristesse sur votre beau visage ? Oh, me dit-elle, votre cousin en est la cause et il n’y a pas plus malheureuse que moi !

Ce chien, cet hérétique, ce Sardanapale, qu’avait-il encore fait ? Je ne tardai pas à le savoir . Elle me raconta par le menu et la voix coupée de sanglots les agissements du traître. Certes, elle connaissait sa faiblesse pour les soubrettes et les cuisinières, mais il lui revenait toujours. Je me gardai bien de lui révéler qu’il s’était même entiché un temps de mon opulente gouvernante marocaine, Malika La Foun, une maîtresse femme bâtie comme un couscoussier. Quand il chante comme un insensé « mille e tre, mille e tre !, c’est seulement le tour de poitrine de MLF qui l’obsède !

Mais non, cette fois, c’était bien autre chose que simple marivaudage !

Emilie a dit…

Figurez-vous, ma chère Nadia, que, faisant ses courses à la ville, elle l’aperçut de loin dans une boutique de mode. Une jeune femme, jolie et vulgaire était là, qui essayait robes et chapeaux. Il faisait l’agréable, la mangeait des yeux, semblait la complimenter, s’approchait d’elle, touchait du doigt l’étoffe des robes qu’elle portait, rajustait un ruban et caressait au passage sa peau et ses cheveux. Elisabeth crut défaillir dans la rue, et de battre, son cœur, un instant s’est arrêté .

Le soir, Patrick vint la visiter et se montra charmant, ne laissant rien paraître. N’y tenant plus, elle lui raconta ce qu’elle avait, de ses yeux, vu, démasqua l’hypocrite et lui demanda raison. Eh bien, il ne se troubla pas plus que cela et avoua.

C’est au Club très fermé des Causeurs, le dernier endroit à la mode qu’il avait rencontré cette fille dénommée Alice comme ma camériste. Toutes les caméristes s’appellent Alice. Car c’est une roturière, une drôlesse, une anonyme, une fille de rien, venue là pour faire mordre à ses hameçons, un comte ou un marquis ! Et ma foi, avec Patrick, endoctriné par le communiste Leroy, ce fut aisé. Comme le font tous les hommes dès qu’ils sont pris en défaut, il lui dit tout et qu’il était bienheureux qu’elle le sût car il comptait désormais être tout à Alice, ajoutant qu’il voulait l’épouser !

« Ne me quitte pas, ne me quitte pas, tout peut s’oublier qui s’enfuit déjà », sanglota Elisabeth, bouleversée et perdant un peu la tête.
-« Mais que me chantez-vous là, Babette, avec le temps, va, tout s’en va, on oublie le visage et l’on oublie la voix ! » lui rétorqua-t-il sans vergogne. Il la quitta ainsi, non sans ajouter qu’Alice Wonderland n’avait nul besoin de quartier de noblesse et qu’il partait bientôt avec elle à Budapest, ville de fièvre et de passion, bien faite pour les amoureux ! « Mais avec quel argent ? » pleura Zaza. « Vous oubliez, ma chère, que je suis écrivain ! »

Alors là, parlons-en, ma chère Nadia ! Ecrivain ! Mon cousin se vante en effet de signer sous de multiples pseudonymes des textes capitaux. Moi qui suis sa cousine, je puis vous assurer que la seule œuvre à laquelle il ait contribué, et encore est-ce seulement pour y faire des bulles, c’est « Bibi Fricotin fait des farces » et aussi « Bibi Fricotin roi du scooter » Nul doute qu’il va pouvoir enrichir son œuvre d’un nouvel épisode désopilant « Bibi Fricotin et sa roture sur le Danube »
Voilà, vous savez tout ma chère Nadia.
P-S Tiens, voilà son complice qui revient de son safari photos , Paul de Lorgnecul ! Avec ces deux marauds, nous montons de sacrés cabochards !

Anonyme a dit…

Ma chère Emilie, ces amours ancillaires sont décidément une insulte au goût et une croix bien lourde à porter. Nos quartiers de noblesse et nos blasons ne pèsent pas lourds quand ces brigands se mettent en tête de pincer une taille un peu épaisse mais bien roulée ou compter fleurette en patois. Laissez ma chère, ils nous reviennent toujours. Le moyen de parler à ces animaux là autre chose que du temps qu'il fait ou du dernier colifichet à la mode !

Ce cercle que vous nommez rendez-vous des Causeurs a fait grand bruit jusque sur les rives de la Dimbovita. Nos bucarestois jamais en reste pour copier tout ce qui vient de ce pays ci s'en sont naturellement emparés. On en dit le dernier bien et les conditions pour y être admis très supérieures à tout ce qu'on peut voir ailleurs. Tant et si bien qu'une inflation de pseudonymes fantaisistes cacherait en fait deux ou trois esprit forts tout au plus. La camériste aura graissé quelque patte pour s'y faire accepter, ces créatures ne reculent devant rien.

A l'évidence, elle cherche le bon parti. Votre cousin est-il un bon parti ? Il porte beau, encore que cette photo récente le montre sous un jour singulièrement défraîchi. Ses poches sont percées et son inspiration flageolante me dites-vous. Rassurez-vous chère amie, point n'est besoin d'utiliser mes filtres. L'intrigante aura vite fait de flairer l'imposture et vous la verrez se rapprocher d'un autre causeur plus fortuné, à moins qu'elle ne tente sa chance dans un beuglant aux Amériques. Bon débarras !

Patrick Mandon a dit…

Mordez, mordez vipères !
Votre venin se perd.
Voyez ces deux commères,
Comme elles sont prospères !
Valsez, valsez, sorcières,
Vous serez solitaires.
Vous êtes trop amères
Pour Mandon de Bel Air.
Piquez, piquez mémères,
Les deux font bien la paire !
Lorgnecul s'exaspère
Et pointe son beau fer
Filez, filez chimères
Vous finirez au pair.
Sifflez, sifflez misères,
Et vous aurez beau faire !
Mandon est bien trop fier.
Vous êtes mousse à bière.
Soufflez, soufflez, mégères,
Vous finirez lenlaires.

Anonyme a dit…

Encore un vers et nous avions droit à rastaquouère sur un plateau. Nous l'avons echappé belle.

Patrick Mandon a dit…

L'empailleuse carpatique, la guêpe roumaine au dard en forme de pal, nous a parlé quelque part de ses quartiers de noblesse. Ses valets vous rapporteront plutôt de croustilleux récit de quartiers mal famés mais fameux, qu'elle fréquente masquée sur les bords de la Seine, à visage découvert près du Danube. Quant aux grandes forêts de Roumanie, elle en connaît tous les sabbats.
Elle rougit aisément, mais son teint habituel est d'une sortie de tombeau : l'usage inconséquent du pal...
Mon cher Paul, pour ce qui est de la Beauregard, je tiens en réserve le récit d'une aventure navrante, qui lui est arrivée il y a peu. Je vous assure que nous allons bien rire, et qu'elle n'a pas pas fini de me maudire.
Je me suis retiré en un lieu admirable, en compagnie de la gracieuse Alice. Mes excès cubains sont derrière moi. Je ne veux plus me consacrer qu'à cette impérieuse mais éblouissante créature.

Emilie a dit…

Patrick, en vers vous persiflez,
C'est en vers que je répondrai:

De son Alice, Patrick, nous bassine
Créature que nul n'a rencontrée
Il lui prête paroles assassines
Un caractère,un corps,il lui dessine
Mais jamais, non, il n'a pu la montrer
C'est sa chimère à lui, sa bécassine.
Et pour épater Emilie sa cousine,
Homme extravagant, farceur, insensé,
De toutes pièces, oui, il l'a inventée !
Il part à l'Est avec cette maligne
Mais nulle trace de cette coquine
En vain cette Alice nous appelons
De la croire vraie nous sommes trop
................................bons !

Patrick Mandon a dit…

(Quand elle fait des vers, la Navarone mirlitone.
Sa poésie est grasse : un morceau de mascarpone)

Sur mes terres de l'Est
En compagnie d'Alice,
Je ne fais point de sieste,
J'aime trop ses délices

Je songe à ma cousine,
Qui se voulant Chimène,
Ne fut que Bécassine,
Même pas Dorimène !

Dans son château, elle déambule,
Faisant seule des conciliabules,
Elle arrache ses coussins,
Poussant des cris d'assassin

Imaginant Mandon sur le doux sein
D'Alice, et aussi son bassin,
Elle broie de ses mandibules,
Tout le mobilier de son vestibule

La Beauregard est désespérée,
Poirau viendra la consoler...

Anonyme a dit…

Ma chère Emilie
Votre cousin me prête des pratiques que la morale réprouve, des sabbats, des bacchanales, que sais-je encore... Il raille mon teint d'albâtre et ma peau de lait, bientôt il m'accusera d'être incommodée par l'odeur de l'ail et de n'avoir point de reflet dans un miroir !
Savez-vous mon amie que son Alice a la forme de sa main gauche ? J'en fis le rêve très précis tout à l'heure, la scène était assurément plaisante et la conclusion des plus attendues. Voilà qui clôt le mystère, nous ne sommes pas prêtes de voir miss wonderland autrement que gantée de cuir de Russie.

Emilie a dit…

Peut-être bien que je mirlitone
Mais c'est prestement,en décasyllabes
Tandis que vous, pour en faire des tonnes
De juste décompte, êtes incapable !

Patrick Mandon a dit…

Il m'arrive d'octosylaber, rarement, je préfère le vers de douze pieds, avec, si possible, rupture à l'hémistyche.
Mais dites-moi,
Combien de verres avez-vous dans le nez
Pour en compter dix au premier né ?

La marécageuses : je suis ambidextre, car j'ai tous les dons. Je satisfais à droite et je comble d'aise à gauche. Idem quand je vise, et tout pareil quand je tire. D'Alice, je suis le pays aux merveilles. Je suis son magicien qui ose.

Patrick Mandon a dit…

Paul, quel trésor me rapportez-vous de votre dernier séjour dans un palace marocain, en présence de l'une de ces créatures de rêve, qui nous font oublier les autres ?
J'ai beaucoup souffert, en votre absence, des attaques répétées, mesquines et cruelles de ma cousine et de son alliée carpatique !

Emilie a dit…

Mais mon cher cousin, connaissez-vous la diérèse ?

Vous voyez, ma chère Nadia, comme cet homme, tout en étant drôle peut-être méchant, dès qu'on lui parle d' Alice, sa loreley ?

Sa voix chante toujours à en râle-mourir ces fées aux cheveux verts qui incantent l'été et son verre s'est brisé comme un éclat de rire !!

.

Anonyme a dit…

Tant de prose, tant de vers, que j'en reste toute chose.
Existe-t-il seulement ne serait-ce qu'un seul lieu pareil à celui-ci ? Non, et pour cause !
On y trouve de tout, des gorgones, des chimères et des Chimène aussi
fraîches que la rose.
Des musiques lointaines et si proches à la fois, des charmes éthérés, d'autres plus incarnés, des immortalités, de modernes fureurs et le tout en symbiose.
Mais aujourd'hui le maître de céans est un peu étourdi, les fleurs de son jardin se parent de névroses ! Pour mieux apaiser leurs clameurs il dispose de ses deux mains gantées et d'un bel instrument. Tel le magicien d'Oz, il manie la baguette et rétablit l'osmose !

corinne

Patrick Mandon a dit…

Ah ça mais ! J'entends, j'entends !
C'est la voix d'une reine !
Le chant d'une sirène
Bienveillante.

Elle ondoie, elle est si lisse,
Elle ondule, elle s'immisce,
Elle se glisse dans un lit
Pour s'y livrer au doux délit,
Commis à deux et quatre mains,
Hier, aujourd'hui, demain !

Dans ce temps si funeste, où ma cousine me harcèle, aidée dans son entreprise par sa sorcière bien aimée, Nadia l'Empaleuse, je suis bien aise de recueillir quelques mots de réconfort d'une inconnue aimable, dont je n'ai qu'aperçu, ici et là, que l'ombre adorable.

Vos manières exquises, votre ironie parfumée, mille choses enfin, qu'on devine et forment un masque heureux, comme une parade au malheur et à la vie banale, vous font inviter, chère Corinne, naturellement, au bal de la marquise.

Unknown a dit…

Ce Patrick, quel heureux homme !
Je ne vous ai pas abandonné...
je suis simplement débordé !
Non, je ne danse pas le dernier tango,
ma vie est faite de labeur...
Je reviens vite parmi vous...
Bien des choses à la Marquise...
Votre admiratif et respectueux disciple.
Paul

nadia a dit…

Mes amis
Je vous abandonne un moment. Je retourne dans mon pays. Comme disait si bien Saint-Just,votre révolutionnaire à visage d'ange, "quelqu'un a flétri mon coeur". Quelqu'un en qui j'avais confiance et qui s'en est malignement servi pour tenter d'atteindre Patrick. Le jeu ne me fait plus rire quand il devient cruel. Je retourne à mes lilas, mes vignes grimpantes, mon soleil et mes amis daces qui jamais ne m'ont fait défaut. Comme vous. Je reviendrai ici bien sûr, je vous embrasse,
nadia

Emilie a dit…

Chère Nadia,
Passez de bonnes vacances, reposez-vous et oubliez tout ce qui s'est passé sur "Causeur" et qui a pu vous faire mal. Pour certains, c'est un jeu virtuel qui, malheureusement entraîne trop loin et déborde sur le réel.
A bientôt, revenez en pleine forme,fabriquez-vous des souvenirs et ensuite, racontez-nous !

Anonyme a dit…

A très bientôt Nadia. Ne vous laissez pas prendre aux pièges lâches de sombres individus. Don't worry, be happy. Et revenez vite !

corinne

Unknown a dit…

Trop occupé, ces derniers temps, je vous ai un peu "négligés" et je vous prie de m'excuser... je n'ai pas eu le plaisir d'entretenir Nadia non plus et je le regrette... j'espère la revoir très vite et mieux faire connaissance... Si j'ai bien compris, un triste sire l'a offensée... qu'il prenne garde... je suis une fine lame et un as du pistolet... Je vous souhaite, chère Nadia que je ne connais pas, une courte mais agréable retraite...

Patrick Mandon a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Patrick Mandon a dit…

Paul, votre petit signe nous rassure. j'ai crains, un instant une fugue lointaine et interminable avec une créature à la peau cuivrée… Quand je dis «j'ai crains», j'ai eu peur que vous demeurassiez (!) absent longtemps.
Le fil de la marquise n'est que momentanément ralenti. Nadia s'est éloignée quelques jours, Émilie prépare sa rentrée et boude son cousin (une fois de plus !), Corinne (laquelle, j'en suis sûr, possède «l'esprit» de ce fil et de ce blog), n'ose pas encore se lancer, et d'autres viendront un peu plus tard. Les aventures de la marquise de Beauregard ne sont point achevées. J'ai le projet de les mettre en page différemment (si cela est possible).
Je ne reviendrai pas, ici, sur les sérieux incidents, qui m'ont violemment opposé, ailleurs, à un personnage très déplaisante. Je ne regrette aucun de mes propos. Et je dis que ce n'est pas seulement «un jeu virtuel qui, malheureusement entraîne trop loin et déborde sur le réel.». C'est, au contraire, révélateur d'une perte du sens de l'esprit républicain.
Mais que cela ne nous entraîne nullement à perdre le nôtre, d'esprit…